Mercredi 10 avril, la commission des finances de l'Assemblée nationale s'est montrée favorable à une proposition de loi pour faciliter l'accès au crédit immobilier. Initialement, cette dernière visait notamment à modifier la règle des 35% d'endettement édictée par le Haut conseil de stabilité financière (HCSF). Certains professionnels du crédit déplorent toutefois le texte adopté.

C'était un jour attendu par de nombreux professionnels du crédit immobilier. Mercredi 10 avril, la commission des finances de l'Assemblée nationale devait se pencher sur une proposition de loi portée par le député Renaissance Lionel Causse. Cette proposition, ayant les faveurs du gouvernement, visait à « compléter les dispositions applicables » au Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF), dans le but d'assouplir les règles pour obtenir un crédit immobilier.

Les députés auteurs de cette proposition souhaitaient en premier lieu voir augmenter le nombre de personnes siégeant au HCSF, de 8 à 10. Les deux nouveaux membres seront un député et un sénateur, désignés respectivement par le Président de l'Assemblée Nationale et le Président du Sénat. « Dans la mesure où, depuis le 1er janvier 2022, les décisions du HCSF sont devenues contraignantes, elles constituent à ce titre de véritables normes macroprudentielles. Il parait donc nécessaire d'y intégrer des élus de la représentation nationale », estime la commission, qui a donné son aval sur ce point.

C'est cependant l'article 2 que les professionnels du crédit espéraient voir être adopté. Initialement, ce dernier devait permettre aux établissements prêteurs de « s'affranchir de la règle du taux d'effort lorsqu'ils sont en mesure de démontrer que le concours proposé ne présente pas de risque d'endettement excessif. » Dans la version originale, les banques devaient donc démontrer que le crédit proposé ne présentait pas de risque d'endettement excessif, en se basant non plus uniquement sur le taux d'effort, mais également sur la notion de reste à vivre.

Crédit immobilier : cette règle pour avoir un prêt est très stricte, faut-il la modifier ?

Mais la commission a largement remanié cet article. Dans la nouvelle version, on peut ainsi lire que « le HCSF, en fixant les conditions d'octroi de crédit, devra veiller à préserver la capacité du système financier à assurer une contribution soutenable à la croissance économique. Sur proposition du gouverneur de la Banque de France, il devra fixer les conditions dans lesquelles les banques pourront déroger à ces décisions, en tenant compte des variations d'offre et de demande de crédit. Les décisions du HCSF seront prises pour une période maximum de 3 mois, qui peut être renouvelée si les conditions ayant justifié leur mise en place n'ont pas disparu, après consultation du CCSF. »

La notion de reste à vivre évincée de la proposition de loi

Ce ne sont donc pas les banques elles-mêmes, mais bien le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, qui aura le dernier mot, même si, dans un souci de transparence, les députés ont également acté que « la proposition du gouverneur de la BdF concernant la fixation des conditions d'octroi du crédit par le HCSF devra être rendue publique ».

Difficile alors de parler de victoire en faveur d'un assouplissement des règles du crédit immobilier, tant le gouverneur martèle depuis des mois que ces règles sont « des critères de bon sens pour éviter le surendettement des ménages » et que l'assouplissement a déjà eu lieu l'année dernière, les banques pouvant désormais y déroger dans 20% des dossiers.

Pour l'association professionnelle CNCEF Crédit, « la proposition adoptée aujourd'hui ne répond plus à l'urgence du moment. Cette proposition de loi vient complexifier au contraire ce qui s'apparentait déjà à une usine à gaz en instaurant un étage supplémentaire ». Alors que la proposition initiale offrait aux banques une possibilité de dérogation en fonction du reste à vivre de l'emprunteur, cette notion « a purement et simplement disparu au profit d'une gestion comptable de l'offre et de la demande. Et qu'attendre d'un Gouverneur qui s'oppose depuis des mois à tout changement ? », déplore CNCEF Crédit.

Adopté en commission, le texte doit désormais être débattu en séance le 29 avril à l'Assemblée nationale. En attendant la suite du feuilleton, que les emprunteurs se rassurent : mois après mois, les taux de crédit immobilier continuent de baisser, pour s'établir désormais sous les 4%. Une bouffée d'air pour de nombreux emprunteurs, qui vont pouvoir relancer leurs projets d'achat immobilier.