Alors que les taux de crédit immobilier sont en baisse depuis le début de l'année 2024, le nouveau taux d'usure publié en cette fin mars augmente encore, pour s'établir à 6,39% pour les prêts sur 20 ans et plus. Une hausse qui pose question sur l'utilité du taux d'usure, ou du moins sur son réel mode de calcul.

Bonne nouvelle pour les emprunteurs : après avoir été la source principale du blocage de nombreux dossiers de crédit immobilier entre 2022 et 2023, le taux d'usure n'est aujourd'hui plus une question pour les emprunteurs. Pour rappel, il s'agit du taux maximum « tout compris » (comprenant le taux du crédit mais également l'assurance emprunteur et les éventuels frais du crédit, NDLR) au-dessus duquel une banque ne peut pas prêter.

Une hausse du taux d'usure malgré la baisse des taux

Publié le 27 mars pour une application au 1er avril 2024, il s'établit désormais à 6,13% pour les prêts entre 10 et 20 ans et à 6,39% pour les prêts de 20 ans et plus. Jusqu'ici, il était fixé à 6,01% et 6,39% pour ces deux catégories de prêts.

Taux d'usure pour les crédits immobiliers en avril 2024

CatégoriesTaux effectif moyen pratiqué au cours des
trois mois précédent le 1er avril 2024
Taux d'usure applicable au
1er avril 2024
Prêts immobiliers ¹
Prêts immo à taux fixe < 10 ans3,42 %4,56 %
Prêts immo à taux fixe ≥ 10 ans et < 20 ans4,6 %6,13 %
Prêts immo à taux fixe ≥ 20 ans4,79 %6,39%
Prêts immobiliers à taux variable4,39 %5,85 %
Prêts-relais5,07 %6,76 %

¹ Cette catégorie inclut également le crédit issu d'un regroupement comprenant un ou plusieurs prêts immobiliers dont la part dépasse 60% du montant total de l'opération de regroupement. Source : Legifrance.

Une hausse qui questionne. Après une mensualisation en 2023, le taux d'usure est revenu à son mode de calcul classique, soit la moyenne des taux de crédit des trois derniers mois, rehaussée d'un tiers. Mais surprise : au 1er avril, le taux d'usure est de nouveau en augmentation par rapport à janvier. Et ce, alors que les taux de crédit immobilier sont en baisse depuis le début de l'année, passant de 4,5% environ mi-décembre à 4% en moyenne en ce début avril.

© MoneyVox

« Le taux d'usure (TAEG max) augmente encore à 6,39% sur durées 20 et + alors que les taux ont baissé de + de 50 points de base en 4 mois ! Quand on pense que ce taux d'usure est censé empêcher les banques de trop remonter les taux... L'illustration de son complet décalage et sa totale inutilité », souffle Maël Bernier, porte-parole du courtier Meilleurtaux. Selon elle, les taux utilisés pour établir ce nouveau taux d'usure sont ceux que l'on retrouvait pour des dossiers traités en novembre 2023. Bien loin donc des trois premiers mois de 2024.

Prêt immobilier : à qui profiterait un changement du mode de calcul du taux d'usure ?

Fin décembre, la Banque de France estimait que le retour au mode de calcul trimestriel « devrait contribuer à la tendance vers la stabilisation des barèmes de crédit immobilier, et donner une meilleure visibilité aux emprunteurs ».

Pour Maël Bernier, la publication de ces nouveaux taux d'usure apporte l'effet inverse... et pourrait même engendrer un effet perves pour les emprunteurs : « Aujourd'hui, les banques font le choix de baisser leurs taux. Mais dans les faits, la hausse des taux d'usure pourrait permettre aux établissements bancaires de rehausser leurs barèmes tout en continuant à pouvoir prêter. Difficile de voir où est la protection de l'emprunteur. »