Les banques doivent désormais inclure systématiquement l’assurance emprunteur dans le calcul du taux d’endettement pour décrocher un prêt immobilier. Nos conseils, dans ce contexte, pour préserver votre capacité d’emprunt.

La récréation est finie ! Bercy a sonné la cloche et les banques sont priées de regagner leur place pour une leçon de mathématiques. Au programme : un recadrage sur les pourcentages ! En effet, jusqu’en janvier, la règle de calcul du taux d’endettement des emprunteurs était peu contraignante. Seul critère officiel : que ce taux ne dépasse pas, à quelques exceptions près, un tiers des revenus du ménage. Autrement dit : une personne gagnant 1 800 euros nets par mois pouvait assumer jusqu’à 600 euros au titre de son crédit immobilier. C’est sur la nature de ces 600 euros qu’un flou demeurait. Prennent-ils en compte uniquement les mensualités du prêt ou incluent-ils aussi l’assurance emprunteur ?

Fin janvier, le Haut Conseil de stabilité financière, présidé par le ministre de l’Economie, a tranché et demandé aux banques de comptabiliser le coût de l’assurance dans les charges d’emprunt pour calculer l’endettement des futurs emprunteurs. Ce durcissement d’un côté s’accompagne toutefois d’un assouplissement de l’autre : le taux d’endettement maximum est porté à 35%, contre 33% auparavant.

Une contrainte de plus pour les dossiers limites

En théorie, ces 2% d’écart devraient permettre de préserver la capacité d’endettement des emprunteurs. D’autant plus que les banques semblaient déjà tenir compte de l’assurance emprunteur dans leurs montages, comme l’ont assuré à MoneyVox le Crédit Mutuel Alliance Fédérale, La Banque Postale ou encore le Crédit Agricole, leader sur le marché du prêt immobilier.

Certes, « les trois quarts des banques intégraient l’assurance emprunteur dans le calcul du taux d’endettement, mais avec une flexibilité pour certaines, nuance Sandrine Allonier, directrice des études du courtier Vousfinancer. C’était un paramètre pour faire accepter des dossiers un peu justes. Désormais c’est max 35% assurance de la banque incluse et 33% avec délégation d’assurance », détaille-t-elle. Les banques conservant la possibilité de déroger à cette règle pour 20% des financements accordés.

Illustration des répercussions à l’aide d’un exemple du courtier Meilleurtaux pour un couple de 40 ans gagnant 4 000 euros nets par mois. Sans assurance emprunteur prise en compte, il peut rembourser 1 400 euros par mois et emprunter 301 500 euros à 1,10% amortis sur 20 ans. Cette fois, en prenant en compte l’assurance avec une quotité de 50% pour chaque personne – au taux de 0,34% soit le prix moyen pour les assurances des banques -, ce couple pourra emprunter au maximum 285 000 euros, soit 16 500 euros en moins, ce qui représente 7 mètres carrés perdus s’il achète dans une ville de taille moyenne comme Rouen.

1. Mettre en concurrence l’assurance emprunteur

Il existe toutefois quelques leviers pour limiter le poids de l’assurance emprunteur et réduire ainsi le taux d’endettement des dossiers un peu limites. La première recommandation est bien sûr de faire jouer la concurrence, surtout pour les jeunes emprunteurs. « C’est pour eux que les mensualités d’assurance vont être le plus fortement réduites. Pour un couple de 30 ans, sans pathologie ni métier à risque, le coût de l’assurance peut être divisé par 2, 3 voire 4 grâce à la délégation », explique à MoneyVox Astrid Cousin, porte-parole du comparateur d'assurances Magnolia.fr.

Ce grand écart, Magnolia.fr l'illustre en prenant l’exemple d’un couple de trentenaires gagnant 4 500 euros nets par mois et souhaitant emprunter 380 000 euros sur 25 ans. Le résultat de ce match entre assurance bancaire et assurance individuelle est présenté dans le tableau ci-après. Mais, en résumé, pour que ce couple respecte la limite de 35% imposée par le HCSF, il faut que leur assurance emprunteur ne leur coûte pas plus de 74 euros par mois, ce qui avec un contrat bancaire n’est pas gagné.

Les vertus de la négociation de l'assurance emprunteur pour Clémence et Aurélien
  Taux de crédit Taux d'assurance Mensualités Taux d'endettement
Sans assurance 1,40% - 1 501 € 33,35%
Avec assurance bancaire 1,40% 0,36% 1 615 € 36%
Avec assurance externe 1,40% 0,11% 1 536 € 34%

Quotité de 50% pour chaque personne
Simulation réalisée par Magnolia.fr

Tout comme les jeunes, les emprunteurs ayant plus de 50 ans peuvent aussi faire des économies en prenant leur assurance en dehors de leur banque. « S’ils ont la moindre pathologie, les banques vont avoir tendance à les surtaxer. C’est très intéressant de comparer, pour eux, car pour une même pathologie d’un assureur à un autre, ils peuvent être couverts à un prix très élevé ou à un tarif correct », souligne Astrid Cousin.

2. Jongler avec les quotités

Toutefois, dans les faits, si le législateur tente de longue date de doper la concurrence sur le marché de l’assurance de prêt, les banques captent toujours près de 90% des cotisations versées, d’après la Fédération française de l’assurance. Les établissements de crédit ont en effet la montre pour eux. Ils ont l’avantage de pouvoir proposer leur assurance emprunteur en même temps que le prêt immobilier.

Dans ce contexte, pour diminuer le coût de l’assurance sans passer par la délégation, la seule solution consiste à baisser les quotités. C’est-à-dire le taux de couverture de chaque emprunteur ou, dit autrement, la part de capital qui restera à leur charge si leur partenaire a un problème de santé ou décède. Car plus la quotité est élevée, plus l’assurance coûte cher. En cas d’achat immobilier seul, il n’y a pas de débat : la banque exige une couverture de 100%. En revanche, pour un couple, il est possible que chaque emprunteur ne s'assure qu'à 50%. Cela a pour conséquence, qu'en cas de décès d’un des emprunteurs, la moitié du capital restant dû restera à la charge du survivant.

Voir notre article dédié : Diminuer le coût de l'assurance emprunteur avec une couverture au plus juste

Agir sur les quotités présente toutefois des limites. Car, pour les couples à risque, le 100% sur chaque personne peut s’avérer prudent et nécessaire pour décrocher un financement. Dans ce cas, il est possible de mixer assurance de la banque et délégation, comme l’explique à MoneyVox Pierre Chapon, cofondateur de Pretto. « L’emprunteur peut monter un premier dossier avec sa banque avec une couverture 50-50 et souscrire un contrat complémentaire, auprès d’un assureur, sans besoin d’en informer l’établissement qui accorde le prêt », détaille Pierre Chapon.

3. Optimiser le montage de votre prêt immobilier

Pour limiter votre taux d’endettement, il est aussi possible de jouer sur le montage du crédit, via plusieurs mécanismes. Premièrement, pour les emprunteurs qui ont des reliquats de crédits (conso, étudiant…), il peut être recommandé d’utiliser tout ou partie de leur apport personnel pour solder leurs dettes. La deuxième technique consiste à lisser les prêts existants avec le prêt immobilier. Ce faisant, les précédents emprunts sont échelonnés sur une durée plus longue, correspondant à celle du nouveau crédit immobilier, ce qui abaisse les mensualités correspondantes. Mais en contrepartie, comme l’emprunteur met plus de temps à rembourser ses crédits existants, ils paient plus d’intérêts dessus. Pour limiter ce surcoût, il est souvent aussi possible d'allonger leur remboursement sur une durée plus faible que celle du crédit immobilier : on parle alors de modulation des mensualités

Enfin, certaines banques peuvent proposer des prêts à paliers, avec une mensualité qui augmente progressivement dans l’idée de suivre la hausse des revenus du ménage. Le taux d’endettement étant calculé en fonction de la première échéance, il s’avère donc plus bas avec ce type de crédit qu’avec un emprunt aux mensualités fixes. A l’automne dernier, la Caisse d’Epargne avait remis en avant une formule semblable, baptisée « prêt Grandioz » avec des mensualités rehaussées de 1% tous les ans. D’après les courtiers sollicités, le prêt Grandioz de la Caisse d’Epargne n’a, pour l’heure, pas fait des émules auprès des autres banques.

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