Votée il y a tout juste un an, la Loi Lemoine permet désormais aux emprunteurs de changer d'assurance de prêt quand ils le souhaitent. Dans un entretien à MoneyVox, la députée Patricia Lemoine qui a porté cette réforme, se félicite des économies réalisées par les emprunteurs grâce à ce nouveau droit. Elle reconnait, cependant, que certains points prévus par la réforme restent à améliorer.

La loi n° 2022-270 du 28 février 2022 pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur souffle sa première bougie. Après une première partie mise en place à partir du 1er juin pour les nouveaux emprunteurs, elle est entrée en vigueur pour tous les prêts immobiliers en cours depuis le 1er septembre 2022.

Elle permet notamment de résilier son assurance de prêt à tout moment pour en choisir un autre, du moment que ce dernier propose des garanties équivalentes. La Loi Lemoine supprime également le questionnaire de santé sous réserve que la part assurée sur l'encours cumulé des contrats de crédit n'excède pas 200 000 euros par assuré. Quelques mois après la mise en place de la Loi, MoneyVox fait le point avec Patricia Lemoine, députée Renaissance ayant porté cette réforme.

Six mois après la mise en place de la loi, quels sont les premiers retours ?

Patricia Lemoine : « On peut dire que l'objectif premier, qui était de rendre du pouvoir d'achat aux ménages, est atteint. Dans les échanges que j'ai pu avoir avec les acteurs du secteur assurantiel, les retours sont extrêmement positifs sur la résiliation infra-annuelle et sur les économies réalisées. Je reçois aussi beaucoup de messages de propriétaires qui disent avoir effectué de grosses économies sur leur contrat et qu'ils ont réussi à changer de contrat d'assurance de prêt grâce à la Loi, ce qu'ils ne parvenaient pas à faire avant, malgré la Loi Hamon (qui permet aux assurés de résilier leur contrat d'assurance après un an d'adhésion, NDLR). »

La loi Lemoine oblige également les banques à répondre sous 10 jours à toute demande de changement. Ce délai est-il tenu ?

P.L : « Le délai de 10 jours est globalement respecté. Même s'il y a encore des manquements, cela s'est clairement amélioré. Avant, certains établissements bancaires ne prenaient même pas la peine de répondre aux demandes des clients. Le fait d'avoir alourdi les sanctions financières permet d'avoir davantage de réactivité. C'est globalement bien tenu, mais on m'a signalé que le délai était parfois dépassé. Si au lieu de 10 jours on est à 15 jours, ça reste acceptable, mais il ne faut pas que ça aille au-delà. La loi doit être respectée. »

Face à la suppression du questionnaire de santé pour les prêts de moins de 200 000 euros, le spectre d'une hausse significative des tarifs était mis en avant. Qu'en est-il ?

P.L. : « L'été dernier, certains assureurs ont effectivement dit que s'il n'y avait plus de questionnaire de santé, les tarifs allaient augmenter pour couvrir le risque que cela allait engendrer. Mais tout le monde n'a pas mis en place ces augmentations. Dans le secteur alternatif, les assureurs ont par exemple préféré attendre de voir s'ils collectaient des volumes supplémentaires suffisants grâce à la résiliation infra-annuelle. De nombreux acteurs restent très compétitifs. D'autres font en effet le choix d'augmenter de façon significative leurs tarifs pour les emprunts de moins de 200 000 euros, à hauteur de 15% à 20%. Mais en réalité, en faisant ce choix, ils risquent de s'exclure et de ne pas capter une clientèle qui n'est pas forcément assujettie à un risque particulier. »

Pour éviter ces hausses de tarifs, certains semblent avoir trouvé des parades pour remplir un questionnaire de santé malgré tout...

P.L. : « On nous a effectivement signalé quelques pratiques qui vont dans ce sens. Certains emprunteurs, en bonne santé et qui font un emprunt proche des 200 000 euros, se sont vus demander d'emprunter 203 000 ou 205 000 euros pour remplir un questionnaire de santé en échange d'un tarif plus compétitif. C'est une façon de contourner la Loi.

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Il sera intéressant, au moment de l'évaluation faite par le CCSF l'année prochaine, de voir ce que ça représente en volume pour voir si c'est une pratique qui reste marginale ou qui viendrait à se généraliser. Il faudra être attentif sur ce point, car cela signifierait que les assureurs ne prennent que les bons risques et qu'il y aurait une augmentation tarifaire pour les personnes dont on ne peut évaluer le risque. Cela serait contraire à l'esprit de la loi. »

Les premiers chiffres montrent que les assureurs alternatifs récupèrent en majorité des contrats déjà existants plus que de nouveaux contrats. Cela signifie que la mainmise des banques sur l'assurance emprunteur continue ?

P.L. : « La bonne nouvelle, c'est que les emprunteurs peuvent désormais partir très vite chez un alternatif s'ils le souhaitent. L'évaluation de l'année prochaine permettra de voir comment évolue la part des contrats entre banques et alternatifs. Quand j'ai fait cette proposition de loi, 88% des contrats d'assurance de prêt étaient détenus par le secteur bancaire. Aujourd'hui, les banques font encore des packages où, pour avoir le meilleur taux, il faut prendre l'assurance emprunteur et l'assurance habitation. Dans certains cas, le contrat proposé est compétitif, mais pas toujours. Dans ce cas, cela va contre les intérêts de l'assuré. L'année 2023 va nous permettre d'avoir du recul et de mieux jauger l'efficacité des dispositifs que l'on a voté et de mettre en lumière les éventuels effets de bord. Dans ce cas, je veillerai à ce que l'on puisse les corriger rapidement. »

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