Entrée en vigueur à l'été 2022, la Loi Lemoine devait grandement faciliter le changement d'assurance de prêt immobilier pour les emprunteurs. 18 mois après, force est de constater que certaines difficultés demeurent, malgré les points positifs.

Résilier son assurance de prêt immobilier à tout moment pour en choisir une autre, sans plus avoir à attendre l'anniversaire de son contrat : voici l'une des principales mesures de la « loi du 28 février 2022 pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur ». Également appelée Loi Lemoine, du nom de la députée Agir Patricia Lemoine, qui a porté cette réforme, elle est entrée en vigueur le 1er juin 2022 pour les nouveaux crédits immobiliers et a été étendue à tous les prêts au 1er septembre 2022.

Assurance de prêt immobilier : ce qui a changé pour les emprunteurs

Les emprunteurs ont profité de cette nouvelle réglementation pour réaliser des économies parfois substantielles. Si le CCSF estime que « pour les deux tiers des clients, l'écart tarifaire est soit favorable au contrat groupe (dans 32% des cas), soit inférieur à 2 000 euros sur toute la durée du crédit (pour 36% des souscripteurs de crédit), ce qui représente une économie mensuelle de seulement 8,50 euros pour un crédit moyen de 20 ans », les chiffres fournis par les alternatifs sont bien différents. Ainsi, Magnolia.fr fait état d'un gain moyen de 10 000 euros. De son côté, le courtier Meilleurtaux assure qu'en moyenne sur les dossiers qu'il a pris en charge en 2023, l'économie réalisée s'affichait à 24 500 euros en moyenne en changeant d'assurance de prêt.

À première vue, la Loi Lemoine est donc une réussite. Mais de nombreux professionnels du secteur, notamment les assureurs alternatifs, alertent sur un effet pervers survenu ces derniers mois. « Le marché de l'assurance de prêt pour les alternatifs est devenu un marché de substitution, assure Astrid Cousin, porte-parole du courtier en assurances Magniolia.fr dans un communiqué. Les emprunteurs baissent les bras face à la pression des banques et préfèrent souscrire à l'assurance du prêteur pour obtenir le financement. Chez Magnolia.fr, nous avons remarqué que le nombre de refus de délégation d'assurance en première intention a augmenté de 30%. »

Une baisse de 20% sur les nouveaux crédits assurés par les alternatifs

« On voit que la loi Lagarde (qui supprimait la disposition législative autorisant les banques, à l'occasion d'une demande de crédit immobilier, à imposer au consommateur d'adhérer au contrat d'assurance emprunteur qu'elles commercialisent, NDLR) ne fonctionne plus du tout, regrette Émilie Ruben, responsable de la communication chez Sécurimut. Je pense que les emprunteurs décident de ne plus se battre au moment de la souscription du crédit, pour ne pas risquer d'avoir de moins bonnes conditions de prêt ou même un refus de financement. Ils préfèrent se dire qu'ils feront ça après, de manière un peu plus sécurisée. »

Alors qu'un emprunteur peut, en théorie, demander avant même la signature du crédit immobilier une délégation d'assurance de prêt, les banques ne joueraient pas forcément le jeu, insistant au moment de la signature du contrat pour que l'emprunteur prenne l'assurance proposée par la banque. Ainsi, « 7,5% des nouveaux crédits ont une assurance alternative, contre 9,3% en 2021, soit une baisse de 20% sur la période, explique Sécurimut. Sur la même période les contrats bancaires défensifs (c'est-à-dire des contrats alternatifs de la banque prêteuse) sont passés de 8,7% à 10,4%, soit une augmentation de +20%. » De son côté, Assurly fait état d'une « part de substitutions de l'ordre de 93,5% contre 6,5% pour les délégations ».

« La tendance des personnes qui souscrivent l'assurance de leur banque en vue d'obtenir leur prêt et procèdent rapidement au changement ensuite, semble ainsi se confirmer »

Une vision également confirmé par Metlife, pour qui « 56% des assurés procèdent à la résiliation dans la 1ère année de souscription de l'assurance contractée auprès de leur banque (et 80% dans les 2 premières années). La tendance des personnes qui souscrivent l'assurance de leur banque en vue d'obtenir leur prêt et procèdent rapidement au changement ensuite, semble ainsi se confirmer ».

Et tous les emprunteurs n'ont pas les mêmes armes au moment de la souscription du crédit. « Les emprunteurs les plus armés négocient avec leur banque et obtiennent une délégation d'assurance avec le crédit. Ceux qui ne voulaient pas compromettre leur crédit utilisent la substitution désormais mieux protégée. La substitution touche donc une cible moins aisée que la délégation », conclut Sécurimut.

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