Des taux bas, une production en berne, un profil d’emprunteur qui évolue : état des lieux du marché français du prêt immobilier en 2012, année paradoxale.

Une production en chute libre

25% ? 30% ? S’il est encore difficile de connaître son ampleur exacte, un fort recul de la production de crédits immobiliers est attendu en 2012. Sous l’effet de la crise, les banques ont légèrement resserré leurs critères d’octroi, si l’on en croit les enquêtes sur la distribution du crédit produites par la Banque de France. Mais la principale raison de cette chute est bien la baisse de la demande. L’année 2012 a en effet été marquée par un fort attentisme des acheteurs. Plusieurs raisons à cela :

  • Le repli, début 2012, de plusieurs dispositifs d’aides à l’accession à la propriété : retour des conditions de ressources et recentrage sur le neuf pour le PTZ+ ; rabot fiscal sur le Scellier.
  • La dégradation du climat économique, avec la promesse d’une crise longue.
  • Le niveau des prix et l’anticipation d’une baisse.

Toutefois, comme le rappelle une récente étude de la Banque de France (1), « le ralentissement de la distribution du crédit est (…) mesuré, les montants accordés restant relativement proches de ceux observés en moyenne sur les dix dernières années. » 2011 était en effet, par comparaison, une année de très forte production.

La même étude montre que cette baisse (au moins en ce qui concerne le premier trimestre 2012) a concerné toutes les régions françaises, à l’exception de la Franche-Comté et de Champagne-Ardenne. Les régions les moins peuplées ont toutefois été particulièrement touchées par le phénomène (–28,2% dans le Limousin, −24,3% en Haute-Normandie, etc). A l’inverse, la baisse a été plus modérée en Ile-de-France (–7,8%) et en Rhône-Alpes (–8,6%).

Des taux historiquement bas

Le paradoxe a déjà été abondamment commenté : cette forte baisse de la production s’est produite dans un contexte de baisse des taux. Une phase enclenchée au 1er trimestre, et qui se poursuit actuellement. Selon le courtier Meilleurtaux, le taux moyen pour un crédit immobilier sur 20 ans, qui était de 4,31% en janvier, se situe actuellement à 3,55%. Ce qui représente, toujours selon Meilleurtaux, une économie de 80 euros par mois pour un crédit de 200.000 euros sur 20 ans et une capacité d’emprunt, pour une mensualité de 1.000 euros, augmentée de 11.006 euros.

Selon l’étude de la Banque de France déjà citée, « les taux des crédits immobiliers ont suivi la tendance générale de ceux des emprunts d’État ». L’OAT (obligation assimilable au trésor) 10 ans n’a en effet cessé de baisser au cours de l’année, jusqu’à passer sous la barre historique des 2% début décembre. Pour Hervé Hatt, le directeur général de Meilleurtaux, cette évolution tient également à la « politique des banques qui face à la baisse de la demande, ont proposé dès le mois de mars des taux et des décotes avantageuses pour conquérir des clients dans un marché en repli ».

Plus d’apport, plus de revenus, mais des crédits un peu moins longs

En 2012, les emprunteurs qui ont acheté un bien immobilier disposaient de plus d’apport, et de revenus plus élevés qu’en 2011. L’apport moyen a sans doute dépassé la barre des 50.000 euros (50.258 euros selon les statistiques de Meilleurtaux). Le revenu moyen des foyers acheteurs a lui atteint 4.543 euros net, toujours selon Meilleurtaux.

Pour la Banque de France, qui surveille depuis septembre 2011 les facteurs de risques sur le marché de l’immobilier, « cette évolution reflète sans doute un accès moins aisé à la propriété des ménages les plus modestes, mais elle pourrait contribuer, à terme, à réduire le taux d’endettement immobilier des ménages (…) ». D’autant que dans le même temps, la durée moyenne des prêts immobiliers a eu tendance à diminuer pour se situer début novembre à 208 mois, contre 214 mois en moyenne en 2011 (2), conséquence de la quasi-disparition des crédits de très longue durée (30 ans et plus).

Meilleurtaux, de son côté, estime que les ménages modestes peuvent encore accéder à la propriété : plus de la moitié des emprunteurs « ont ainsi pu acheter en 2012 avec moins de 4.000 euros nets/mois de revenus par foyer ». Le constat est le même pour l’apport : « Il est (…) encore possible d’emprunter avec moins de 50 000 € d’apport ; 70 % des emprunteurs y parviennent et 20 % ont même pu obtenir un crédit avec moins de 5 000 € d’apport en 2012 » explique Sandrine Allonier, porte-parole de Meilleurtaux.

(1) « Les crédits nouveaux à l’habitat des ménages : tendances récentes », publiée dans le bulletin de la Banque de France n°189 du 3e trimestre 2012.

(2) Source : Observatoire Crédit Logement/CSA de novembre 2012