Des emprunteurs français résidant près de la frontière suisse portent une revendication inhabituelle : ils réclament l’application d’un taux négatif sur leurs crédits immobiliers à taux variable, conformément à leur contrat. Bref : toucher des « intérêts de remboursement ».

Des résidents de départements frontaliers (Haut-Rhin, Haute-Savoie ou Ain) ont par le passé contracté un crédit immobilier à taux variable en francs suisses, comme le relayait Le Monde la semaine passée. Or ce taux variable est indexé sur le Libor à trois mois, un indice passé en territoire négatif depuis le début 2015 et qui navigue même en-dessous de -0,8% à l'heure actuelle. Conséquence : leur crédit étant à taux variable, leur taux d’intérêt pourrait être proche de 0%, voire même négatif, selon les marges bancaires indiquées dans les contrats.

Sur « Le forum des frontaliers » (forum.frontaliers.io), une discussion lancée le 5 février bat les records d’audience et de nombre de réponses du site. Les emprunteurs concernés échangent sur les pratiques des différentes banques, la politique la plus courante étant a priori de prendre en compte le taux négatif pour arriver à un taux proche de zéro une fois les marges appliquées. Le Monde indique que « cela n’ira pas en-dessous » de 0% au Crédit Agricole. La banque verte « a prévu de ne pas payer ses emprunteurs en francs suisses, même si le Libor poursuit sa glissade », le quotidien évoquant une « source interne » à la banque verte.

La situation apparaît plus conflictuelle au Crédit Mutuel, qui « considère que le Libor négatif, cela n’existe pas » selon un emprunteur cité par le quotidien. Ce client estime qu’il devrait actuellement payer des intérêts à un taux de 0,7% si le Libor négatif était pris en compte (son contrat évoque la base du Libor plus 1,5% de rémunération pour la banque), or le Crédit Mutuel lui applique un taux de 1,5%.

« Du pur délire » pour un directeur de banque

L’affaire commence à prendre de l’ampleur. Deux jours après la parution de l’article dans Le Monde, le quotidien régional L’Alsace relayait l’information en évoquant la volonté du Comité de défense des travailleurs frontaliers du Haut-Rhin (CDTF) de « fédérer la fronde ». Réaction du directeur de la caisse locale concernée du Crédit Mutuel dans ce même quotidien régional : « C’est du pur délire ! Aucun modèle économique ne peut fonctionner si les banques devaient rémunérer un crédit à l’emprunteur », s’emporte-il en faisant référence aux intérêts négatifs. Affaire à suivre.