La pierre-papier traverse une période difficile. Plusieurs SCPI ont corrigé leur prix de part à la baisse en 2023. Et d'autres pourraient suivre très prochainement. Alors quelle place réserver à cette classe d'actif dans votre portefeuille en 2024 ?

En février 2023, les parts de la SCPI Laffite Pierre s'échangeaient à 450 euros. Un an plus tard, ces mêmes parts ne valent plus que 372 euros, soit une baisse vertigineuse de 17,33%. Et la SCPI d'AEW Patrimoine n'est pas la seule à connaître des difficultés.

Au total, 23 SCPI ont vu leur valorisation dévisser au cours des 12 derniers mois. Ce qui semble finalement assez peu sur les plus de 200 véhicules d'investissement recensés en France. Toutefois, ces quelques SCPI représentent à elles seules plus de 35% de la capitalisation totale.

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Crise des taux

À l'origine de ces baisses, la remontée brutale des taux de la BCE, qui a fortement ébranlé le petit monde feutré de la pierre-papier. « Plus qu'une crise des SCPI, on peut parler d'une crise des taux », estime Stéphane van Huffel, cofondateur de Netinvestissement.

Cela dit, les difficultés de la pierre-papier sont aujourd'hui bien réelles. Car les premières baisses de prix de parts ont suscité l'inquiétude de certains épargnants, qui se sont précipités pour retirer leur capital, craignant de nouvelles pertes.

Résultat ? Sur le troisième trimestre 2023, les SCPI ont enregistré pour 1,7 milliards d'euros d'ordres de rachat. Un montant trois fois plus important qu'au premier trimestre de la même année, d'après l'Association française des sociétés de placement immobilier (Aspim).

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Faible liquidité

Ces retraits massifs pourraient à leur tour alimenter la baisse. « Pour honorer les ordres de rachat, les SCPI qui ont peu de réserves de liquidités doivent mettre en vente une partie de leur parc immobilier, ce qui accentue leurs pertes », relève Stéphane van Huffel.

Autre point noir : face à l'augmentation des retraits, la liquidité des SCPI se dégrade, puisque les rachats ne sont pas toujours compensés par de nouvelles souscriptions. Si bien qu'au 30 septembre 2023, pas moins de 98 SCPI avaient des parts en attente de rachat, selon l'Aspim.

Alors la pierre-papier a-t-elle du plomb dans l'aile ? Et faut-il vous tenir à l'écart de ce placement financier en 2024 ? Pas nécessairement. Car le tableau des SCPI n'est pas aussi sombre qu'il peut sembler au premier abord.

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Rendements records

Pour commencer, les rendements, eux, ont bien résisté. « « En moyenne, les SCPI ont distribué environ 4,6% nets de frais sur l'année 2023 et certaines affichent même des distributions dépassant les 7,5%. Peu de placements peuvent en dire autant », observe Paul Bourdois, cofondateur de France SCPI.

Certaines SCPI font encore mieux, avec des rendements records de 8,16% chez Transitions Europe et 7,79% chez Remake Live. Iroko Zen, une SCPI sans frais d'entrée, affiche de son côté un taux de distribution supérieur à 7% pour la troisième année consécutive.

Or, le rendement, c'est le nerf de la guerre. « Lorsqu'on achète des parts de SCPI, c'est avant tout pour générer un rendement régulier sur la durée. Si le prix des parts se bonifie avec le temps, ce n'est qu'un bonus », rappelle Stéphane van Huffel.

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Facteur temps

Et sur ce point, les SCPI n'ont pas déçu. « Depuis 30 ans, le rendement moyen de la pierre-papier a toujours été supérieur à 4%, même en période de crise. Le prix des parts, lui, peut fluctuer, mais au long cours il reste globalement orienté à la hausse », note Paul Bourdois..

Autrement dit : les épargnants les plus impactés par les récentes baisses de valorisation sont ceux qui ont investi récemment. Ceux qui ont une durée de détention supérieure à 8 ans, comme le recommande l'AMF, sont très rarement perdants.

« Les baisses sont vécues comme un choc par les épargnants, puisque dans l'imaginaire des Français, la pierre est associée à un sentiment de sécurité. Mais la SCPI est un placement qui comporte des risques. Et le meilleur allié face à ces risques, c'est le temps », appuie Stéphane van Huffel.

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Retour à la réalité

« Ce que l'on observe en réalité, c'est un retour à la normale. L'immobilier est un placement qui s'inscrit dans le temps long. Pourtant, depuis quelques années, nous étions devenus des traders d'immobilier », estime Stéphane van Huffel.

« Les investisseurs pouvaient emprunter à des taux proches de zéro pour acheter des biens et les revendre à peine deux ans plus tard, en réalisant au passage une plus-value de 20%. Aujourd'hui, c'est terminé », poursuit le dirigeant.

Investir dans les SCPI reste donc une option attractive en 2024. Mais uniquement si vous avez du temps devant vous. Et même alors, la prudence reste de mise. Car toutes les SCPI ne se valent pas. Sans compter que les baisses de prix ne sont pas encore terminées.

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Opportunités à saisir

« D'autres sociétés de gestion devraient révéler la valeur d'expertise de leurs SCPI d'ici la fin du mois de février. Et cette fois encore, on s'attend à ce que plusieurs d'entre elles affichent une valeur de reconstitution en baisse » », confirme Paul Bourdois.

Les véhicules les plus en difficulté sont surtout des SCPI bancaires, investies dans les bureaux, en région francilienne. À l'inverse, les jeunes SCPI qui engrangent une collecte importante bénéficient des liquidités nécessaires pour se positionner sur un marché baissier.

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On assiste par conséquent à l'apparition d'un marché à plusieurs vitesses. Ce qui implique de se montrer plus sélectif dans le choix de vos SCPI, avec un focus tout particulier sur la qualité du parc immobilier et la stratégie d'investissement des gérants.

« Les SCPI qui investissent dans des crèches, des EHPAD, des data centers ou des entrepôts logistiques semblent bien positionnées pour tirer leur épingle du jeu. De même que les SCPI européennes, plus diversifiées et qui bénéficient d'une fiscalité attractive », termine Stéphane van Huffel.

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