Elles ne sont que trois. Mais elles font beaucoup parler d'elles. Que valent les SCPI sans frais de souscription ? Et faut-il (vraiment) miser sur ces nouveaux acteurs pour faire fructifier votre épargne à moindre frais ?

Un contrat d'assurance vie sans frais d'entrée ? Il y a 20 ans, l'idée aurait pu paraître saugrenue. Mais aujourd'hui, la plupart des assureurs ont revu ces frais à la baisse. Et beaucoup les ont même supprimés.

Peut-on s'attendre à observer le même mouvement dans le petit monde de la pierre-papier ? « C'est le sens de l'Histoire », veut croire Gautier Delabrousse-Mayoux, co-fondateur de la société de gestion Iroko.

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Nouveau modèle

Il y a 6 ans, toutes les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) prélevaient des frais d'entrée. Dans le jargon de la pierre-papier, ces frais s'appellent une « commission de souscription ». Et leur montant est tout sauf anodin.

En moyenne, les SCPI facturent ainsi 10,47% de frais de souscription, selon une étude de Rock-n-Data (1). « C'est plus qu'aucun autre produit d'épargne », indique Gautier Delabrousse-Mayoux.

Ces frais sont payés en une seule fois, au moment de l'acquisition des parts. « Ils servent à rémunérer la distribution, ainsi que la recherche des actifs immobiliers dans lesquels la SCPI va investir votre argent », précise Clément Renault, co-fondateur de Louve Invest.

Pendant longtemps, ces frais ont été présentés comme un mal nécessaire. Le prix à payer pour accéder à la précieuse pierre-papier. Mais la roue tourne. Et sur les 207 SCPI disponibles, trois ont fait sauter leur commission de souscription.

Leur nom : Iroko Zen, Novaxia Neo et Remake Live. Mais que cache le modèle des SCPI sans frais de souscription ? Est-il (vraiment) viable sur la durée ? Et ces SCPI ne se rattrapent-elles pas sur d'autres frais ? Elements de réponse.

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Intérêts alignés

Alors qu'elles n'existent que depuis quelques années, les SCPI sans frais de souscription remportent un succès croissant auprès des épargnants. Remake Live a par exemple atteint 119 millions d'euros d'encours en 9 mois d'existence à peine.

Pourtant, ces nouvelles SCPI ne font pas toujours l'unanimité. Loin s'en faut. « Beaucoup de gens pensent que c'est juste un argument marketing. Et que nous compensons l'absence de commission de souscription par d'autres frais », regrette Gautier Delabrousse-Mayoux.

Il faut dire que Iroko Zen facture 12% de frais de gestion. C'est plus que la moyenne des autres SCPI, qui se situe autour de 11,35%, selon les chiffres de Rock-n-Data. Ces frais grimpent même jusqu'à 18% chez Novaxia Neo et Remake Live.

Cela dit, les frais de souscription et les frais de gestion n'ont pas la même assiette. Les premiers sont calculés sur le montant total de votre investissement. Et les seconds sur les loyers versés.

Résultat ? « Les SCPI classiques gagnent beaucoup d'argent au moment de la souscription. Et certaines sociétés de gestion se focalisent par conséquent davantage sur l'acquisition de nouveaux investisseurs que sur leur gestion », constate Gautier Delabrousse-Mayoux.

Par contraste, les SCPI sans frais de souscription sont surtout rémunérées en fonction des loyers qu'elles font rentrer. « C'est un modèle vertueux. Car les intérêts de la société de gestion sont alignés avec ceux des investisseurs », note Clément Renault.

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Risque de crédit ?

Toutefois, les commissions de gestion ne sont pas toujours les seuls frais prélevés par Iroko Zen, Remake Live et Novaxia Neo. Certaines de ces SCPI sans commission de souscription facturent aussi des frais d'acquisition.

Ces frais s'appliquent lorsque la SCPI achète un nouveau bien immobilier. Et ils ressemblent étrangement à une commission de souscription déguisée. Leur montant est toutefois plus faible. Il atteint 3% chez Iroko Zen.

Mais ce n'est pas tout. « Certains estiment que ce type de frais nous incite à faire de la dette. Et ils ont raison », observe Gautier Delabrousse-Mayoux. Car si les SCPI empruntent auprès des banques pour acheter plus de biens, leur commission d'acquisition sera plus élevée.

De quoi encourager ces SCPI à prendre des risques démesurés ? Pas nécessairement. « Tout cela est très encadré par l'Autorité des Marchés Financiers. On ne peut pas s'endetter à plus de 50% », rassure Gautier Delabrousse-Mayoux. « Et puis la dette n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Au contraire : bien maîtrisée c'est un levier de performance intéressant », poursuit le dirigeant.

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Rendements gonflés

La vraie force des SCPI sans frais de souscription, c'est qu'elles permettent de mettre plus d'argent au travail. Prenons un exemple : si vous investissez 100 euros dans une SCPI qui prélève 10% de frais de souscription, vous allez investir 90 euros en immobilier.

Alors que si vous investissez vos 100 euros via une SCPI avec zéro frais de souscription mais une commission d'acquisition de 3%, vous allez investir 97 euros dans l'immobilier. Autrement dit : pour un même montant collecté, la SCPI achètera plus d'immobilier.

Et cela se répercute sur les rendements perçus. Prenons l'exemple d'une SCPI qui distribue un rendement à 6%. Si 90 euros ont été investis dans l'immobilier, vous toucherez 6% de 90 euros soit 5,40 euros de loyers.

Tandis que si 97 euros ont été investis, vos gains s'élèveront à 6% de 97 euros, soit 5,82 euros. « Cela permet - à immobilier comparable - de rendre net des frais de gestion plus de rendement que pour une SCPI avec frais d'entrée », estime Gautier Delabrousse-Mayoux.

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Sortie anticipée

Les frais de souscription ont toutefois une autre utilité que celle de rémunérer les SCPI et leur réseau de distribution. « Le plus souvent, il faut garder ses parts au moins 8 ans pour amortir ces frais », indique Jonathan Dhiver, fondateur de meilleurescpi.com.

Autrement dit : une fois que les associés ont acheté des parts, ils sont en quelque sorte « liés » à la SCPI, car ils savent que s'ils vendent trop tôt, l'opération ne sera pas rentable. Ce qui renforce la résilience des SCPI. « Si tout le monde décide de vendre en même temps, la SCPI pourrait se trouver en difficulté. L'existence des commissions de souscription permet de limiter ce risque », détaille Jonathan Dhiver.

Les SCPI sans frais de souscription seraient-elles par conséquent plus risquées ? Pas nécessairement. Car ces SCPI ont prévu des frais de sortie anticipée. En cas de revente des parts avant 3 ans de détention, Iroko Zen facture par exemple une commission de sortie anticipée de 6%. Chez Remake Live, la revente des parts avant 5 ans est également pénalisée.

« On ne veut pas être un produit d'arbitrage et avoir à gérer des entrées ou des sorties tous les 6 mois », explique Gautier Delabrousse-Mayoux. « Car l'investissement immobilier s'inscrit dans un temps long. Et cela compliquerait trop la gestion ».

« Cela dit, notre but n'est pas que les épargnants restent captifs », poursuit le dirigeant. « D'ailleurs la durée d'investissement moyenne en SCPI, c'est 23 ans. Les gens ne restent pas juste pour amortir les frais de souscription. Ils restent parce qu'ils sont contents ».

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(1) Etude en date d'avril 2021, réalisée sur un échantillon de 96 SCPI pour les frais de gestion, et 97 SCPI pour les frais de souscription.