Taux d'usure

Pour protéger les consommateurs désireux d'emprunter de l'argent, le législateur définit un taux de l'usure, c'est-à-dire un taux effectif global maximal auquel un prêt peut être accordé. Retrouvez le taux d'usure applicable aux différentes catégories de crédit (prêt immobilier, prêt à la consommation, prêt professionnel) ainsi que la manière dont ce taux « maximal » est calculé.

Qu'est-ce que l'usure et le taux d'usure ?

Selon l'article L314-6 du Code de la Consommation : « Constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des opérations de même nature comportant des risques analogues ».

L'usure est une infraction pénale passible de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 300 000 euros. De plus, les perceptions excessives doivent être reversées au capital de la créance. Si celle-ci a été remboursée entre temps, le prêteur doit restituer les sommes indûment perçues, avec intérêts.

La législation relative à l'usure est régie par le Code de la consommation et le Code monétaire et financier. Il existe un taux de l'usure pour chaque catégorie de financement. Chaque trimestre, le taux de l'usure est déterminé par la Banque de France, puis publié au Journal officiel.

Aujourd'hui, tous les financements aux particuliers et aux associations sont soumis à la législation sur l'usure. Celle-ci impose d'ailleurs aux prêteurs d'informer leurs clients du taux de l'usure en vigueur pour le prêt qu'ils leur proposent. Pour les professionnels, suite aux réformes de 2003 et 2005 (lire plus bas), seuls les découverts en compte restent concernés.

Pour résumé, plus simplement, les établissements de crédit ne peuvent pas consentir des prêts à un taux supérieur au taux de l'usure.

Quel est le taux d'usure en vigueur ?

CatégoriesTaux effectif moyen pratiqué au trimestre précédant
le 4ème trimestre 2023
Taux d'usure
applicable
au 4ème trimestre 2023
Prêts immobiliers ¹
Prêts immo à taux fixe < 10 ans3.30 %4.40 %
Prêts immo à taux fixe ≥ 10 ans et < 20 ans4.35 %5.80 %
Prêts immo à taux fixe ≥ 20 ans4.58 %6.11 %
Prêts-relais4.63 %6.17 %
Prêts immobiliers à taux variable4.14 %5.52 %
Prêt à la consommation
Prêts à la consommation d'un montant
inférieur ou égal à 3 000 euros
16.44 %21.92 %
Prêts à la consommation d'un montant
supérieur à 3 000 euros et inférieur ou égal à 6 000 euros
9.54 %12.72 %
Prêts à la consommation d'un montant
supérieur à 6 000 euros
5.39 %7.19 %

¹ Cette catégorie inclut également le crédit issu d'un regroupement comprenant un ou plusieurs prêts immobiliers dont la part dépasse 60% du montant total de l'opération de regroupement.

Quelle évolution pour le taux de l'usure ?

© MoneyVox

Sur ce graphique s'affiche l'historique du taux d'usure des cinq dernières années. Les données ont été collectées de façon trimestrielle, à l'exception de l'année 2023, où un taux d'usure a été publié tous les mois. Pour simplifier la gestion du graphique, ce sont les taux des mois de mars, juin, septembre et décembre 2023 qui s'affichent ci-dessus.

Comment est calculé le taux de l'usure ?

Chaque trimestre, la Banque de France mène une enquête sur la distribution du crédit auprès des responsables des engagements d'un échantillon représentatif de banques.

Elle opère ensuite une moyenne arithmétique simple des TAEG observés pour les différentes catégories. Cette moyenne est pondérée, en fonction du volume de l'encours des différents établissements observés. La Banque de France obtient alors un taux effectif moyen qui, augmenté d'un tiers, permet de fixer les nouveaux seuils de l'usure. Ces taux d'usure sont applicables pour le trimestre suivant (voir le tableau ci-dessus et le graphique historique du taux d'usure).

Les prêts bonifiés, administrés ou réglementés par l'Etat, par exemple ceux issus d'un PEL, ne sont pas pris en compte dans le calcul.

En cas de circonstances exceptionnelles (période de forte inflation, par exemple), la Banque de France a la possibilité de ne pas respecter ces règles et de fixer les seuils de l'usure de manière adaptée. Plutôt que d'ajouter un tiers au taux effectif moyen, le gouverneur de la Banque de France pourrait par exemple décider d'y ajouter une marge fixe, par exemple 1 ou 1,5 point.

A compter du 1er février 2023 et pour toute l'année 2023, le calcul du taux d'usure a exceptionnellement et temporairement été mensualisé « afin de permettre, en cette période de remontée rapide des taux, au taux d'usure de s'adapter de façon plus rapide et plus fluide à l'évolution des taux de marché », a justifié le ministère de l'Economie.

D'autres modifications du mode de calcul sont parfois envisagées : certains militent ainsi pour une sortie pure et simple de l'assurance emprunteur de ce calcul. C'est le cas de Bruno Rouleau, président de l'Association professionnelle des intermédiaires en crédits (Apic), qui explique que « le but initial du TAEG, c'est de comparer le taux entre les banques. Aujourd'hui, il y a le TAEA pour l'assurance, donc pas besoin qu'il soit dans le TAEG. »

Prêt immobilier : à qui profiterait un changement du mode de calcul du taux d'usure ?

Dans les autres pays européens

En règle générale, les pays maintiennent des garde-fous pour les crédits aux particuliers mais ont entièrement libéralisé leurs régimes de l'usure pour les crédits aux entreprises. Seules la France et l'Italie font encore figure d'exception.

Selon le second rapport du Comité de suivi de la réforme de l'usure (2013), dans la plupart des pays, le contrôle des taux d'intérêt ne s'appuie pas sur la loi, mais sur la jurisprudence. C'est le cas de la Grande-Bretagne, de l'Allemagne, du Portugal ou encore de l'Espagne. En Allemagne, l'évaluation du caractère usuraire d'un crédit est laissée à l'appréciation des tribunaux qui se basent sur les moyennes du marché publiées chaque mois par la Bundesbank selon la typologie du prêt. L'écart est jugé excessif dès lors qu'il dépasse le double de celui du marché. En Grande-Bretagne, c'est aux magistrats d'apprécier au cas par cas la « normalité » d'un taux d'intérêt.

Comme la France, l'Italie dispose d'une loi régulant les taux d'intérêt. Le taux d'usure y est également réévalué chaque trimestre. Mais un taux d'intérêt y est considéré comme usuraire s'il excède de plus de 50% le taux moyen appliqué par les banques.

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Critique du système actuel et réforme envisagée

Les limites du taux de l'usure sont d'abord liées aux difficultés posées par le Taux Annuel Effectif Global. Par exemple, les éléments entrants dans le calcul d'un TEG/TAEG peuvent être différents d'un établissement bancaire à l'autre, suivant ce que chaque établissement considère comme obligatoire.

Le taux de l'usure est un indicateur empirique. Il suit le taux effectif moyen augmenté d'un tiers. En théorie, il suffit donc que les banques pratiquent des taux de plus en plus élevés pour que le taux d'usure se trouve automatiquement augmenté. Un phénomène que seule la concurrence entre les établissements peut empêcher.

L'autre problème vient actuellement de la temporalité du mode de calcul du taux d'usure. Pour beaucoup d'observateurs, une modification trimestrielle n'est pas adaptée lorsque les taux de crédit immobilier sont réhaussés souvent, parfois de manière bimensuelle.

Selon la Banque de France, il existerait déjà deux méthodes de calcul : lorsque la période est propice au crédit immobilier, comme c'était le cas jusqu'à février 2022 (avec des taux moyens à 1% sur 20 ans), l'institution se baserait uniquement sur le taux moyen des crédits accordés au cours du premier mois du trimestre précédent (par exemple avril pour fixer le taux d'usure du trimestre suivant, du 1er juin au 31 septembre).

En revanche, pour fixer le taux d'usure sur les périodes plus complexes pour le crédit immobilier, la Banque de France utiliserait alors une « période étendue », c'est-à-dire les données des trois mois précédents (juillet, août, septembre par exemple, pour le taux d'usure du 1er octobre). Une manière de faire qui reflèterait plus précisément les hausses de taux et éviterait donc un trop gros décalage entre le taux d'usure et des taux de crédit qui évoluent rapidement.

Enfin, lors de discussions menées en janvier 2023, la Banque de France s'est dite ouverte à la possibilité de mensualiser temporairement le calcul des taux d'usure. Une modification chaque mois en fonction des taux du mois précédent : de quoi coller encore plus à la réalité du marché. A la mi-janvier, cette mensualisation provisoire a finalement été validée par Bercy, et devrait être mise en place dès le 1er février 2023.

Les réformes de 2003 et 2005

Les taux de l'usure ont été mis en place pour protéger les emprunteurs d'éventuels abus de la part des banques. Paradoxalement, le législateur a estimé en 2003 et 2005 que cette contrainte avait aussi pour conséquence de fermer les portes du crédit à certaines entreprises jugées trop fragiles pour pouvoir emprunter.

L'article 32 de la loi du 1er août 2003 pour l'initiative économique a donc supprimé le délit d'usure pour les prêts consentis aux entreprises commerciales, industrielles ou financières. Seule demeure la sanction civile (les perceptions excessives sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux et subsidiairement sur le capital de la créance) pour les découverts en compte qui leur sont consentis.

L'article 7 de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) a étendu cette suppression du délit aux personnes physiques agissant pour leurs besoins professionnels (entrepreneurs individuels).

Parallèlement la sanction civile prévue dans le Code monétaire et financier en matière de découverts en compte consentis aux entreprises marchandes a été élargie afin d'inclure également les entrepreneurs individuels.

L'usure des prêts à la consommation modifiée de 2011 à 2013

La loi Lagarde du 1er juillet 2010 a prévu une modification des catégories des crédits à la consommation qui consiste en la seule distinction par niveau de montant emprunté (jusqu'à 3 000 €, entre 3 000 et 6 000 €, et au-delà de 6 000 €). L'objectif de la loi était de rendre les crédits renouvelables moins attractifs pour les prêteurs en imposant un seuil de l'usure identique, pour un même montant emprunté, que ce soit sous la forme d'un prêt amortissable, d'un découvert en compte, ou d'un crédit renouvelable. L'application de ces nouveaux seuils s'est faite progressivement entre le 1er avril 2011 et le 31 mars 2013 avec la mise en place d'un régime transitoire de 2 ans.

La réforme de l'usure sur les crédits à la consommation

L'usure des prêts immobiliers modifiée en 2017

Depuis le 1er janvier 2017, le seuil de l'usure des crédits immobiliers à taux fixe est déterminé selon trois maturités :

  • prêt à taux fixe d'une durée initiale de moins de 10 ans,
  • prêt à taux fixe de 10 ans à moins de 20 ans,
  • prêt à taux fixe de 20 ans et plus.

Avant cette date, il n'existait qu'un unique taux d'usure applicable aux prêts immobiliers à taux fixe, que la durée de remboursement soit de 5 ans ou de 30 ans. Malgré cette amélioration qui semble logique, il arrive que les taux de l'usure pour les prêts de moins de 10 ans soient supérieurs à ceux de 10 à 20 ans, une catégorie qui représente les plus gros volumes de production.

Le taux annuel effectif global, le calcul de TAEG

Vincent MIGNOT
Vincent MIGNOT

Après une maîtrise d’Histoire puis une maîtrise en Sciences de l’information et de la communication, Vincent MIGNOT devient journaliste en... Lire la suite

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