Unis pour le meilleur et pour le pire… Le pire c’est lorsqu’il faut payer les dettes de son conjoint prodigue. Mais jusqu’où joue le principe de solidarité entre les époux ?

La vie de couple est a priori affaire de cœur mais elle est aussi, qu’on le veuille ou non, affaire d’argent. Et la question financière peut virer au cauchemar au moment de la rupture. Mais que dit la loi quand il y a des crédits à rembourser ?

Subtil règlement de comptes entre époux

Si les époux ont vocation à se partager l’éventuel « enrichissement » (biens immobiliers , épargne…) qui peut naître de leur union, ils doivent aussi se partager les dettes. Quel que soit le régime matrimonial, ils sont solidaires, c'est-à-dire co-responsables, de ces dettes dites « ménagères », même si elles ont été engagées par un seul des conjoints. Il s’agit ici des dépenses ordinaires de la vie courante, notamment dépenses d’alimentation, factures d’eau, d’électricité, de loyer et charges du logement familial, frais de santé des enfants...

Cependant, si les dépenses sont manifestement excessives par rapport au train de vie du couple, « à l'utilité ou à l'inutilité de l'opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant », la solidarité des époux ne joue pas, explique l'article 220 du code civil. Idem pour les achats à crédits et les emprunts, sauf s'ils portent sur des sommes cohérentes compte tenu du niveau de vie du ménage et que les dépenses ainsi effectuées sont nécessaires aux besoins de la vie courante.

Autrement dit, si vous achetez au moyen d’un crédit conso une cuisinière ou un lave-linge, votre conjoint est solidaire du remboursement des échéances, même sans avoir la qualité de co-emprunteur. C’est logique, il s’agit de sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie de tous les jours. A l’inverse, si vous souscrivez un crédit auto pour financer la voiture haut de gamme de vos rêves, vous ne pourrez pas demander à votre conjoint de partager la facture du remboursement des échéances. Sauf s’il a la qualité de co-emprunteur, ou s’est porté caution pour garantir votre emprunt.

Résultat, lorsqu'un époux prend seul un emprunt qui n'est pas nécessaire aux besoin de la vie courante, il n'engage que ses biens propres et ses revenus.

Exception à la solidarité

Depuis la loi Elan de 2018, la solidarité cesse de s’appliquer aux loyers et charges lorsque le conjoint, partenaire ou concubin notoire, quitte le logement familial en raison de violences exercées au sein du couple ou sur un enfant. Seule condition : informer le bailleur par lettre recommandée, avec accusé de réception, accompagnée d’une copie de l’ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales.

Les limites à la protection du conjoint économe

Les règles de l’article 220 du code civil visent à protéger le conjoint vertueux des comportements de son conjoint trop dépensier. Toutefois, cette protection est moins absolue qu’il y paraît. En cause : la communauté légale.

Les époux mariés, sans avoir signé un contrat de mariage devant notaire, sont soumis au régime de la communauté légale, ce qui est le cas de la grande majorité des couples. Ce régime comprend tous les éléments de patrimoine acquis à titre onéreux après la date du mariage : voiture, logement, ameublement, électroménager, salaires, épargne...

Voilà pour le côté positif de la communauté légale : tout ce qui a été acquis pendant le mariage appartient à égalité aux deux conjoints et doit être partagé en deux au moment du divorce. Chacun garde pour soi, en revanche, les bien propres acquis avant la date du mariage ainsi que ceux recueillis au cours de la vie conjugale par donation, donation-partage, héritage, succession...

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Selon le code civil, la communauté légale est composée activement et passivement. Cela signifie qu’elle comprend les actifs acquis pendant le mariage (sauf héritage et donations) et le passif, à savoir toutes les dettes dont les conjoints, ou un seul d’entre eux, sont redevables. Résultat, les dettes ménagères, évoquées plus haut, et plus généralement l'ensemble des crédits en cours de remboursement sont intégrés dans ce pot commun. Au moment du divorce, ces dettes dont vous n'aviez peut-être pas toujours connaissance sont donc imputées sur les actifs de la communauté.

Et selon les tribunaux, le passif est partagé entre les deux conjoints sauf s’il est prouvé, par exemple, qu'une dette ou un crédit bancaire a été souscrit dans l’intérêt personnel d’un des époux. Une preuve difficile à apporter. Ainsi, en 2010, la Cour de cassation a rejeté la demande d'une femme qui contestait, au moment de son divorce, l’imputation sur l’actif de la communauté du découvert bancaire de son époux, expliquant qu’elle ignorait à quoi ces sommes avaient servi. Une jurisprudence confirmée en 2018 par la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire.

Le cas de l'impot sur le revenu

Le Bulletin Officiel des Finances Publiques-Impôts précise que les époux sont responsables solidairement du paiement de l'impôt sur le revenu lorsqu'ils sont soumis à une imposition commune, de la taxe d'habitation lorsqu'ils vivent sous le même toit, quel que soit le régime matrimonial des époux, et de l'impôt de solidarité sur la fortune.