Le délai de jouissance peut vous priver de 3 à 6 mois de rendement lorsque vous investissez dans une SCPI. Pourtant, peu d'épargnants intègrent ce facteur dans le choix de leur fonds immobilier. A juste titre ?

Quand vous achetez des parts de SCPI, vous le faites dans l'espoir de percevoir un loyer mensuel ou trimestriel. Toutefois, cette récompense se fait parfois attendre, puisque certaines SCPI vous font patienter jusqu'à neuf mois avant de verser vos premiers loyers.

La raison ? Ces SCPI appliquent ce qu'on appelle un « délai de jouissance », c'est-à-dire qu'elles prévoient une période pendant laquelle, après avoir acheté vos parts, vous n'êtes pas éligible aux loyers correspondant à votre investissement.

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Argument marketing

« Le délai de jouissance a une justification économique. Il offre à la société de gestion le laps de temps nécessaire pour trouver un bien immobilier dans lequel investir l'argent des nouveaux entrants », explique Clément Renault, CEO et cofondateur de Louve Invest.

En moyenne, sa durée s'élève à 3,4 mois. Toutefois, on constate de fortes disparités d'une SCPI à l'autre. Certaines sociétés de gestion appliquent un délai de jouissance de six mois. C'est notamment le cas des SCPI Corum XL et Foncière Des Praticiens.

« Ce délai offre à la société de gestion le laps de temps nécessaire pour trouver un bien immobilier dans lequel investir l'argent des nouveaux entrants »

D'autres véhicules d'investissement, en revanche, ne prévoient aucun délai de jouissance. C'est par exemple le cas des SCPI Aestiam Pierre Rendement, Carac Perspectives Immo, ou encore Patrimmo Commerce. Mais comment l'expliquer ?

« Pour ces SCPI, la suppression du délai de jouissance est souvent un argument marketing. Il s'agit d'une façon de redynamiser leur collecte en proposant un supplément de rendement à l'épargnant », décrypte Paul Bourdois, cofondateur de France SCPI.

Autre cas de figure : les SCPI qui ne sont plus en expansion, c'est-à-dire dont les retraits surpassent les montants collectés. « Ces SCPI n'ont pas besoin d'acheter de nouveaux biens immobiliers, le maintien d'un délai de jouissance n'est donc pas justifié », observe Clément Renault.

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Impact mitigé

Pour bien comprendre l'impact du délai de jouissance sur votre rendement, prenons l'exemple d'un épargnant qui investirait 100 000 euros dans une SCPI qui génère une performance annuelle de 5%, soit un rendement cible de 5 000 euros pour l'épargnant.

Si cette SCPI applique un délai de jouissance de six mois, l'épargnant ne commencera à cumuler des loyers qu'à compter du premier jour du septième mois. Autrement dit, son gain sera divisé de moitié la première année, soit un manque à gagner de 2 500 euros.

Faut-il pour autant privilégier systématiquement les SCPI sans délai de jouissance lorsque vous sélectionnez les fonds dans lesquels vous souhaitez investir ? Pas nécessairement. Car ce délai peut avoir un impact positif sur les performances au long cours de vos SCPI.

« Les fonds collectés ne dorment pas sur un compte courant. Le plus souvent, ils sont placés sur des comptes rémunérés », explique Clément Renault. Or, en période de taux zéro, les SCPI se précipitaient pour investir ces fonds, puisqu'ils ne rapportaient rien.

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Mais avec la remontée des taux directeurs des banques centrales, ces comptes rapportent à présent 4% voire 4,5% par an, ce qui permet aux SCPI de prendre leur temps pour identifier des opérations immobilières à haute rentabilité.

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Effet de levier

De quoi booster les rendements de la pierre-papier. Cela dit, les meilleures sociétés de gestion ont une stratégie différente. « Certaines SCPI, comme Iroko Zen, travaillent avec un pipe [canal, NDLR] d'acquisition très resserré, ce qui leur permet de créer un effet de levier », note Clément Renault.

Concrètement, ces SCPI parviennent à investir les fonds collectés en moins d'un mois. Elles génèrent ainsi des rendements de 7% ou 8% avec l'argent des nouveaux associés, mais sans les reverser pendant la durée du délai de jouissance, ce qui gonfle mécaniquement leurs performances.

« C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles les jeunes SCPI sont capables de proposer des rendements aussi spectaculaires : leurs associés historiques, encore peu nombreux, se partagent les loyers supplémentaires générés avec les fonds des nouveaux arrivants », indique Clément Renault.

« On parle de 3 mois de rendement à l'échelle d'un investissement qui va durer 8, 10 ou 15 ans »

Alors quelle place donner au délai de jouissance lors du choix de vos SCPI ? « Ce délai est souvent source de frustration pour nos clients, mais on parle de 3 mois de rendement à l'échelle d'un investissement qui va durer 8, 10 ou 15 ans », répond Clément Renault.

« Privilégiez les SCPI avec un délai de jouissance court si vous hésitez entre deux véhicules qui proposent des performances équivalentes ou si vous souhaitez acheter des parts de SCPI à crédit sans devoir piocher dans votre trésorerie », complète Paul Bourdois.

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