Dans un manifeste publié aujourd'hui, un collectif d'associations affiche 16 propositions pour parvenir à une inclusion financière universelle. Parmi elles, certaines cherchent des voies pour restaurer la confiance entre les banques et leurs usagers.

Un collectif d'associations, emmené par le Secours Catholique et l'UFC-Que Choisir (1), publie ce mardi un « manifeste pour une inclusion financière universelle ». 16 propositions qui pour l'essentiel, sont destinées à améliorer concrètement l'accès aux services bancaires et financiers des personnes en difficultés financières et/ou en situation de handicap ou d'illectronisme, mais aussi les demandeurs d'asile.

Certaines, toutefois, ont une portée plus large, concernant l'ensemble des usagers. Elles touchent notamment à deux piliers de la relation bancaire : le statut du conseiller et la tarification des services. Avec l'ambition de restaurer une forme de confiance entre la banque, institution aussi incontournable que redoutée, et ses usagers.

Garantir l'impartialité du conseiller bancaire

Votre conseiller bancaire est-il un simple vendeur intéressé ? Ou un allié, qui a à cœur de défendre vos intérêts ? Un soutien, quand vous êtes confrontés a des problèmes financiers ? Ou un arbitre, prompt à vous sanctionner si votre budget dérape ? Tel que fonctionne aujourd'hui la banque de détail en France, il est tout ça à la fois. C'est sans doute trop.

Parmi les 16 doléances publiées dans le cadre du manifeste, la 12e propose de « réaffirmer le rôle du conseiller bancaire, qui doit être impartial et doit faire passer l'intérêt du client avant celui de la banque ». Comment faire ? En lui donnant plus d'autonomie, estime Aurélien Soustre, membre du Conseil consultatif du secteur financier (CCSF). « Le management continue à mettre la pression sur les vendeurs pour vendre des produits qui rapportent », constate l'ancien cadre bancaire. « Laisser plus d'autonomie au conseiller, sans obligations de résultats, lui permettrait de retrouver le goût de faire son travail et de créer une relation durable et saine avec ses clients ».

Cette évolution devrait nécessairement s'accompagner d'une diminution de la part variable de la rémunération des conseillers. Certes, aujourd'hui les chargés de clientèle ne sont plus intéressés à titre individuel, mais ils continuent à recevoir des objectifs commerciaux et à remplir des tableaux de vente collectifs, à l'échelle de l'agence. Ils déterminent en partie le montant de leur prime annuelle, aux côtés de critères plus qualitatifs, comme l'enrichissement des dossiers clients ou le nombre de rendez-vous pris. Mais au final, la part variable reste le complément indispensable d'une rémunération fixe qui, par ailleurs, est loin d'être mirobolante.

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Pour sortir de l'ambigüité, une autre voie est possible : renforcer leur posture de conseiller expert, en toute transparence. A l'image des conseillers en investissement financier (CIF), les chargés de clientèle pourraient notamment préciser, dans une déclaration d'adéquation, dans quelle mesure les propositions faites répondent aux objectifs définis avec le client et à son profil.

Désensibiliser les banques aux frais d'incident

Deux autre propositions du manifeste concernent les politiques tarifaires du secteur bancaire. La 1ère est une vieille demande des associations de défense des consommateurs : la mise en place d'un plafonnement des frais d'incidents bancaires pour tous les clients. La seconde demande une réforme du système économique des banques, avec la mise en place d'une tarification responsable, apportant de vrais services aux consommateurs.

Combien ces frais d'incidents rapportent-ils aux banques ? En 2017, deux associations de consommateurs, l'Unaf et l'INC avaient estimé la manne à 6,5 milliards d'euros par an. Un chiffre qui n'a jamais été confirmé, mais jamais démenti non plus. Une chose paraît certaine : ces frais sont extrêmement profitables - l'UFC-Que Choisir évoquait en 2018 une marge de 86% en moyenne - et pèsent lourd dans le chiffres d'affaires des banques de détail.

Au-delà de la question du montant en valeur absolue se pose le problème de la répartition. Les frais d'incident, en effet, pèsent massivement sur des ménages déjà fragilisés, ceux qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts et vivent à découvert de manière récurrente. Un sujet particulièrement sensible en ces temps de forte inflation.

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Certes, des plafonnements, exigés par les pouvoirs publics, ont permis de limiter la facture pour les clients identifiés comme fragiles, dont le nombre officiel est de 4,1 millions fin 2021, selon l'Observatoire de l'inclusion bancaire de la Banque de France. Mais il y a des trous dans la raquette : leur nombre réel, lui, est estimé à plus de 8 millions par l'Union nationale des associations familiales (Unaf).

Les banques françaises donnent ainsi une image désastreuse : celle d'institutions dures avec les pauvres et tendres avec les riches. Les clients les plus aisés disposent, eux, de leviers leur permettant de négocier certains frais ou d'accéder à des crédits immobiliers à très faible coût. Remettre en cause cette solidarité inversée serait de nature à restaurer la confiance des usagers.

Pourquoi un tel désamour entre les Français et leurs banquiers ?

(1) Le Secours Catholique-Caritas France, Emmaüs France, APF France Handicap, UFC-Que Choisir, avec Familles rurales et la Confédération Syndicale des familles