La banque en ligne d'origine néerlandaise ING a confirmé qu'elle allait prochainement quitter le marché français, laissant ses clients dans l'expectative. Voici quelques pistes pour comprendre ce qui va se passer.

« ING annonce aujourd'hui se retirer du marché de la banque en ligne en France. » C'est par un court communiqué, daté du 21 décembre 2021 que la banque en ligne ING, ex ING Direct, a officialisé son départ. La fin d'un bail de plus de 20 ans, puisque la marque d'origine néerlandaise avait fait ses premiers pas dans l'Hexagone en 2000, avec le lancement de son fameux Livret Epargne Orange (LEO).

Depuis cette date, ING a enrichi son catalogue, qui intègre aujourd'hui des comptes bancaires, de l'assurance vie, de la bourse et des crédits. Elle a aussi rallié de nombreux clients : « environ un million », revendique-t-elle. Un chiffre qui, toutefois, n'a pas bougé depuis 2015. C'est d'ailleurs ce qui explique son retrait : « La décision (...) est liée au contexte économique, notamment l'environnement de faibles taux d'intérêt, à une part de marché limitée et à des résultats financiers négatifs pour la banque en ligne en France », explique la banque sur son Web Café, un forum dédié à ses clients.

Quand ING va-t-elle concrétiser son retrait ? Que va devenir son petit million de clients ? Le point sur ce que l'on sait aujourd'hui.

Quel est le calendrier du retrait ?

Interrogé par MoneyVox, ING n'a pas été en mesure de préciser le calendrier. Quoi qu'il en soit, son départ effectif du marché français n'est pas pour demain.

La banque en ligne a, en effet, confirmé être à la recherche de « tierces parties » susceptibles de racheter son portefeuille de clients. Un processus qui est toujours en cours (lire plus bas). Que cette recherche aboutisse ou non, il faudra ensuite de longs mois, sans doute plus d'un an, pour concrétiser cette sortie. Le temps d'abord d'obtenir les différents feux verts des régulateurs. De laisser ensuite le temps aux clients de réfléchir et, s'ils le souhaitent, de transférer leurs comptes dans une autre banque. Enfin, en cas de reprise, d'effectuer le transfert effectif des comptes des clients restants.

Y aura-t-il un repreneur ?

C'est la volonté d'ING. « Nous sommes en effet en discussion avec des tierces parties. En revanche, nous ne pouvons communiquer aucun nom », a confirmé la communication d'ING en France à MoneyVox. « Les discussions sont en cours et, comme vous le savez, c'est un processus qui peut s'avérer délicat. Si nous parvenons à un accord, nous l'annoncerons de manière appropriée. »

Au cours des derniers mois, toutes les banques en ligne « historiques », celles apparues dans les années 2000 ou au début des années 2010, semblent avoir songé, à un moment ou à un autre, à se porter candidates, afin de renforcer leurs propres bases de clients.

Ces discussions, entamées au moins depuis l'été dernier, n'ont pas encore abouti. Fin novembre, une source annonçait au quotidien Les Echos que « c'était l'affaire de quelques jours ». Mais plus d'un mois plus tard, toujours rien. Selon des informations de La Tribune, publiées le 4 janvier, seuls deux candidats restent en lice : le groupe Société Générale, propriétaire de Boursorama, et le Crédit Mutuel Arkéa, qui détient Fortuneo. Selon cette même source, Crédit Mutuel Alliance Fédérale, actionnaire principal de Monabanq, aurait jeté l'éponge, tout comme le Crédit Agricole, propriétaire de BforBank.

Toutefois, rien ne dit que le repreneur, s'il existe un jour, accepte de reprendre l'ensemble du portefeuille d'ING. Toujours selon Les Echos, Boursorama Banque, qui fait aujourd'hui figure de favorite, ne souhaite pas, par exemple, récupérer ses encours de crédits immobiliers.

Les clients d'ING doivent-ils s'inquiéter ?

Voir sa banque, celle qu'on utilise au quotidien et où on place son argent, quitter le pays n'est jamais rassurant. L'annonce d'ING a laissé dans l'expectative de nombreux clients, qui reprochent à l'enseigne de ne pas les avoir informés directement, mais seulement par voie de presse.

Pour autant, il n'y a pas lieu d'être inquiet, en tout cas sur le devenir des avoirs. Le départ d'ING est un choix stratégique, pas une faillite. Elle reste adossée à sa puissante maison-mère néerlandaise, qui revendique 39 millions de clients dans 40 pays. Les clients bénéficient à ce titre du mécanisme européen de garantie sur leurs dépôts (comptes courants, LEO, comptes espèces des comptes titres et PEA) à hauteur de 100 000 euros par déposant. Les avoirs sur les Livrets A et les LDDS sont, eux, garantis à 100% par l'Etat français. Enfin, l'argent placé sur les assurances vie n'est pas détenu par ING, mais par l'assureur Generali, et reste couvert par le Fonds de garantie des assurances de personnes (FGAP) à hauteur de 70 000 euros par personne.

ING va, par ailleurs, conserver une présence en France, puisqu'elle ne renonce pas à son activité de banque de financement et d'investissement à destination des grandes entreprises (Wholesale Banking).

Côté produits et services, rien ne change dans l'immédiat. « Les clients continuent de bénéficier des services habituels de la banque en ligne », a confirmé ING. « Clients et partenaires seront informés individuellement avant tout changement concernant les produits et services ».

Des milliers de comptes déjà fermés

ING a confirmé au Parisien avoir déjà commencé à fermer des milliers de comptes, jugés inactifs et peu rentables. Cela concerne des clients détenant des Livrets Epargne Orange et aucun autre produit. « Cette initiative a été lancée dès l'été 2021. Avec un taux d'intérêt de 0,01%, ces livrets sont très faiblement rémunérateurs pour eux », a justifié la direction d'ING au quotidien. Selon l'estimation de l'association France Conso Banque, qui vient de lancer un « collectif de défense », 300 000 clients sont dans ce cas.

Comment va se passer concrètement le retrait ?

Interrogée sur les modalités concrètes de son retrait pour les comptes bancaires, assurances vie et crédits de ses clients, ING n'a pas souhaité, à ce stade, apporter de précisions.

Quoi qu'il en soit, la transition entraînera des frictions pour les clients. Si repreneur il y a, on peut évidemment imaginer que ces derniers bénéficieront d'un accompagnement vers les produits équivalents proposés par la nouvelle banque. Pour autant, même dans ce cas, tout ne pourra pas être automatisé.

Le cas des comptes courants est peu problématique. Bien sûr, le changement de banque entraînera l'édition d'un nouvel IBAN, et donc la nécessité de changer la domiciliation des opérations récurrentes. Il existe toutefois un dispositif, le mandat de mobilité, permettant d'automatiser largement la démarche. Il y aura également édition d'une nouvelle carte bancaire, et en conséquence nécessité de changer ses coordonnées si elles sont enregistrées chez certains fournisseurs : sites de commerce électroniques, services de streaming, portefeuilles électroniques, etc.

La transition sera plus simple pour l'argent placé sur un LEO : un simple virement permettra le transfert vers un livret équivalent proposé par la nouvelle banque. Ce sera en revanche un peu plus compliqué pour les livrets d'épargne réglementée. Il n'existe pas de possibilité de transfert d'un Livret A ou un LDDS d'une banque à l'autre et la détention simultanée de plusieurs de ces produits est interdite par la réglementation. Le transfert ne pourra donc pas être automatique et l'argent devra transiter par un autre compte en attendant l'ouverture du nouveau livret réglementé, avec un risque de perte de quinzaines d'intérêts.

Livret A : comment le transférer dans une autre banque ?

Les transferts de comptes-titres et de PEA entre banques sont possibles et pourront ainsi être mis en œuvre dans le cadre de la transition. Ils sont habituellement payants, mais on peut imaginer qu'ING proposera une franchise de frais dans ce cas précis.

Reste deux cas plus épineux : ceux des assurances vie et des crédits. En ce qui concerne l'assurance vie, ING opère en qualité de distributeur. L'assureur se nomme Generali et c'est avec lui que se gèrera la transition. Il y a plusieurs cas de figure possibles. Si le repreneur travaille également avec Generali (ce qui est le cas, par exemple, de Boursorama), le transfert en lui-même ne devrait pas poser de problèmes. Ce cas de figure a notamment été facilité par la loi Pacte, qui autorise les transferts entre contrats commercialisés par la même compagnie d'assurances sans perte de l'antériorité fiscale pour l'assuré. Le transfert devrait également être possible vers un nouvel assureur, sans perte de l'antériorité fiscale, en cas d'absence de repreneur ou si ce dernier ne travaille pas avec Generali. Il y a un précédent : celui d'ACMN Vie qui, avec l'accord de l'ACPR, régulateur du secteur, a pu transférer son portefeuille de contrats d'assurance vie en ligne à Suravenir.

Les crédits enfin. Dans le fil de son Web Café, ING a promis que les prêts en cours « continueraient selon les mêmes modalités et durée », quel que soit l'organisme repreneur. Dans le cas où ce repreneur refuserait de récupérer le portefeuille de prêts, les contrats existants devraient être transférés à la maison mère, qui en assurera la gestion jusqu'à l'extinction des dernières créances.

Est-il possible de partir tout de suite ?

C'est une possibilité. La convention signée avec une banque est un contrat à durée indéterminée qui peut être rompu unilatéralement et sans préavis si c'est à l'initiative de l'usager. Certains clients, s'exprimant sur notre forum, ont ainsi déjà commencé à transférer leurs comptes et contrats, y compris leurs assurances vie vers des courtiers travaillant également avec Generali.

Un tel choix contraint toutefois à effectuer ces changements en autonomie et, le cas échéant, à payer des frais : frais de transfert pour les comptes-titres et PEA, indemnité de remboursement anticipé (IRA) pour les crédits. Pour l'instant, ING n'a, à première vue, pas l'intention d'en faire cadeau.

En l'absence de risque pour leurs avoirs, les clients ont donc plutôt intérêt à temporiser et à attendre d'en savoir un peu plus que les modalités concrètes du retrait d'ING avant d'enclencher les démarches.

Banque en ligne : le comparatif des offres