Le nouveau règlement européen sur le virement instantané est entré en vigueur hier lundi 8 avril. Conséquence : on connaît désormais la date limite à laquelle les banques françaises devront rendre ce moyen de paiement gratuit. Explications.

Rappel du contexte : la zone euro dispose, depuis 2017, d'un nouveau moyen de paiement ramenant le délai d'un transfert d'argent entre comptes de 24, voire 48 heures à 10 secondes maximum. Un moyen de paiement qui, par ailleurs, fonctionne toute l'année et pas seulement les jours ouvrés.

Las, le virement SEPA instantané, près de 7 ans après son lancement, ne représente, dans de nombreux pays de l'UE, qu'une portion congrue de l'ensemble des virements : 6%, par exemple, en France au 1er semestre 2023 (1).

La raison de ce retard est connue. C'est la conséquence d'un choix fait par la plupart des banques françaises : celui de facturer l'émission des virements instantanés. Selon notre relevé tarifaire, il n'est gratuit que dans 25 banques, sur les 128 observées, et coûte 1,02 euro en moyenne dans les autres. Pire, dans certaines banques, son coût peut monter beaucoup plus haut : 10 euros, par exemple, dans les Banques Populaires si le montant envoyé dépasse les 15 000 euros.

Virement instantané : l'astuce des banques pour faire grimper les prix

Pour mettre un terme à ces pratiques, les institutions européennes n'ont eu d'autre choix que de légiférer. Il s'agit, en effet, d'un enjeu de souveraineté : l'Union européenne veut faire du virement instantané le pilier de son autonomie en matière de paiements, face à la puissance des acteurs extra-européens du secteur : celle des réseaux d'acceptation, comme Visa et Mastercard, et des géants technologiques, comme Apple ou Google, tous états-uniens.

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Pour forcer l'adoption du virement instantané, l'UE va donc imposer une règle : un virement instantané ne pourra pas être facturé à un prix plus élevé qu'un virement traditionnel. En clair, une banque qui ne facture pas l'émission d'un virement (ce qui est le cas de toutes les banques françaises lorsque le virement est initié par le client depuis son espace bancaire web ou mobile) ne pourra plus facturer le virement instantané. Ce qui ouvre évidemment la porte à une généralisation de sa gratuité. « Il ne serait pas souhaitable que les prestataires de services de paiement contournent l'objectif qui sous-tend cette exigence », prévient d'ailleurs le législateur européen.

Alignement tarifaire au plus tard le 9 janvier 2025

Il restait à connaître la date de mise en œuvre du nouveau règlement. C'est désormais le cas, avec l'entrée en vigueur du texte, hier lundi 8 avril 2024 : cet alignement tarifaire devra intervenir au plus tard le 9 janvier 2025.

A cette même date, tous les établissements de crédit auront également l'obligation d'offrir à leurs clients la capacité de recevoir des virements instantanés. C'est déjà le cas de l'immense majorité des banques, néobanques et services de paiement français. La capacité à émettre des virements deviendra, elle, obligatoire le 9 octobre 2025 au plus tard.

A noter que les banques des pays de l'UE dont la monnaie n'est pas l'euro (le Danemark, la Suède, la Pologne, etc.) disposent d'un délai supplémentaire de deux ans, jusqu'en 2027, pour appliquer ce règlement. C'est aussi le cas des établissements de paiement et de monnaie électronique, qui devront s'y conformer au plus tard le 9 avril 2027.

De nouvelles mesures de sécurité

Ces changements s'accompagneront de nouvelles obligations en matière de sécurisation des transactions et de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Le virement instantané, en effet, représente un petit défi pour les banques. Il est, par principe, irrévocable. Néanmoins, dans le cas d'un virement traditionnel, l'émetteur dispose d'un petit délai pour se raviser. Ce n'est plus le cas avec le virement instantané. Résultat : le taux de fraude de ce dernier était, au 1er semestre 2023, comparable à celui de la carte bancaire, mais vingt fois plus élevé que celui du virement classique (1).

Pour limiter, notamment, les risques de fraude au faux RIB, à l'occasion de laquelle le malfaiteur usurpe l'identité d'un tiers connu de sa victime (un proche, un commerçant, un artisan, etc.), les banques devront être en capacité, au plus tard le 9 octobre 2025, de vérifier la concordance entre l'identifiant IBAN du compte destinataire et le nom de son titulaire.

Virement : ces deux nouvelles mesures de sécurité vont vous concerner

(1) Source : Banque de France