Le plan pauvreté du gouvernement, dont la présentation a été repoussée à septembre, devrait intégrer un plafonnement annuel des frais bancaires. Mais qui sera vraiment concerné par ce plafond ?

« Il est indispensable (…) que nous parvenions à un vrai plafonnement des frais bancaires pour que personne ne soit en difficulté parce qu'il est obligé de payer des frais bancaires insupportables et trop lourds ». Dimanche dernier, invité des rencontres économiques d'Aix-en-Provence, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a confirmé que le gouvernement allait légiférer sur un plafonnement annuel des frais bancaires. Ce sera dans le cadre du plan pauvreté, dont la présentation a été repoussée à la rentrée de septembre, pour une entrée en vigueur début 2019.

L’idée de fixer une limite aux frais bancaires que peut payer un client bancaire chaque année est dans les tuyaux depuis la parution du dernier rapport de Observatoire de l’inclusion bancaire (OIB) de la Banque de France. Celui-ci a en effet montré que les personnes en difficultés financières payaient en moyenne 320 euros de frais bancaires par an, la majeure partie suite à des incidents de paiement malgré le plafonnement déjà effectif de certains frais, comme les commissions d’intervention ou les rejets de chèques et de virements.

Qui sera concerné par le plafonnement ?

Malgré les demandes en ce sens d’associations et de syndicats, le plafonnement global des frais bancaires ne devrait pas concerner l’ensemble de la clientèle bancaire. Dans son allocution de dimanche, Bruno Le Maire a d’ores et déjà circonscrit son futur périmètre aux « Français modestes », sans plus de précision.

L’OIB, lui, a affiché comme « priorité » de « développer l’offre spécifique avec des frais mieux plafonnés ». Mise en place à l’automne 2014, cette offre consiste en un forfait de compte à 3 euros maximum par mois, qui intègre notamment une carte de paiement à autorisation systématique, la gratuité des virements et prélèvements, la gestion du compte par internet, les alertes SMS sur solde et un plafond spécifique du prix des commissions d’intervention. Elle est réservée aux clients en situation financière fragile, détectés comme tels par leur banque.

Qu’est-ce qu’un client en situation de fragilité financière ?

Depuis 2014, les enseignes bancaires ont l’obligation d’organiser la détection des difficultés financières de leurs clients, notamment pour pouvoir leur proposer l’offre spécifique. Un décret publié en juin 2014 précise les critères permettant de les caractériser.

Le « statut » de client fragile bénéficie ainsi automatiquement aux clients ayant déposé un dossier de surendettement déclaré recevable, et à ceux, généralement désignés comme « interdits bancaires », qui sont inscrits depuis plus de trois mois au fichier central des chèques (FCC). Mais les banques doivent aussi détecter les clients qui multiplient les incidents de paiement sur une période de trois mois consécutifs et ceux dont les ressources apparaissent comme trop faibles.

Combien de bénéficiaires potentiels ?

La piste la plus probable est donc que le futur plafond global bénéficie uniquement aux bénéficiaires de cette offre. Selon l’OIB, la population bancaire détectée comme fragile représentait en 2017 près de 3,6 millions de personnes, un chiffre en hausse d’1,2 million sur un an.

En revanche, malgré une diffusion en hausse de 40% en 2017, l’offre spécifique ne concerne, elle, que 10% d’entre eux : 351 000 bénéficiaires environ. Un écart qui s’explique sans doute en partie par la mauvaise volonté des banques, mais aussi par le rejet par le public d’une offre perçue comme stigmatisante ou trop limitée. D’où la crainte, du côté des associations de consommateurs, d’une mesure d’affichage, qui ne profite au final qu’à très peu d’usagers.