Le nouveau mandat de mobilité bancaire, suivi par l’arrivée prochaine d’Orange Bank, promettent de changer la donne sur le marché de la banque de détail. Une situation qui rappelle celle de la téléphonie mobile, il y a 5 ans, au moment de l’arrivée de Free Mobile. Doit-on également en espérer une baisse des prix ? Eléments de réponse.

C’était il y a un peu plus de 5 ans. Le 10 janvier 2012, Free, heureux inventeur de la box internet, devenait officiellement le 4e opérateur mobile du marché français et choisissait de casser les prix avec un forfait d’entrée de gamme à 2 euros par mois. Quelques mois auparavant, en novembre 2011, la procédure de portabilité du numéro de mobile, qui permet de changer d’opérateur sans perdre son numéro, avait été facilitée et accélérée, suite à une directive européenne. Une conjonction d’événements qui avait entraîné une baisse sans précédent du prix des communications mobiles en France.

L’analogie avec le secteur bancaire en 2017 est évidemment frappante. Le 6 février dernier, les banques françaises ont mis en place un nouveau mandat de mobilité bancaire, destiné à faciliter et accélérer le changement de banque. Une évolution là aussi impulsée par une directive européenne - dite PAD pour Payment Account Directive. Et le printemps prochain va être celui de l’arrivée sur le marché bancaire d’un nouvel acteur, l’opérateur télécom Orange, qui s’est lui-même présenté comme le « Free de la banque » - avant de se rétracter - mais dont la force de frappe suscite la crainte des acteurs en place.

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Tout dépendra de l’offre Orange Bank

Ainsi, peut-on anticiper en 2017 sur le marché de la banque de détail une révolution comparable à celle introduite en 2012 par Free Mobile et la portabilité du numéro de mobile ? Pas impossible, répond Bérénice Goales, directrice marketing & produit France au sein du cabinet de conseil Affinion International, à condition que « les tarifs [proposés par Orange soient] aussi bas qu’attendu [et] associés à des services mobiles innovants ».

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La question, toutefois, divise. Certains doutent de la capacité d'Orange à introduire une rupture tarifaire aussi nette que celle proposée à l'époque par Free Mobile. Surtout, les banques de détail ne disposeraient pas des marges nécessaires pour adapter leurs tarifs. « Les frais bancaires sont difficiles à baisser en ce moment », estime par exemple Benoît Grisoni, le directeur général adjoint de Boursorama, leader de la banque en ligne en France.

Un modèle économique déjà sous pression

Le modèle économique traditionnel de la banque de détail - transformer l’épargne de court terme des clients en prêts à long terme, pour faire court - est en effet sous forte pression, les marges étant réduites en raison des taux historiquement bas imposés par la Banque centrale européenne (BCE). Une conjoncture qui, jusqu’ici, a plutôt eu l’effet inverse. « Les tarifs des établissements traditionnels ont fortement augmenté depuis 2, 3 ans, avec par exemple, la hausse des coûts des cartes bancaires, la généralisation des frais de tenue de compte… », note ainsi Grégory Guermonprez, le directeur de Fortuneo France. Et ce malgré le développement d’une concurrence low cost, celle des banques 100% en ligne.

De manière paradoxale, la mobilité Macron pourrait même accélérer la hausse de certaines lignes tarifaires. Dans son baromètre 2017 des tarifs bancaires, l’association de consommateurs CLCV a ainsi constaté une forte augmentation du coût des transferts de Plans épargne logement (PEL). Un produit d’épargne très courant, souvent très bien rémunéré, mais qui n’est pas pris en charge par le nouveau mandat de mobilité, lequel ne concerne que le compte courant. Une manière, pour les banques, de compenser l’hémorragie ?

Une transformation numérique accélérée

Si la baisse des tarifs bancaires est donc loin d’être assurée, une chose paraît certaine à Bérénice Goales : l’entrée en vigueur du mandat de mobilité bancaire va « créer un effet de volatilité des clients des banques traditionnelles, qui ont bénéficié jusque-là d’une clientèle très fidèle, par inertie ». Une volatilité qui pourrait effectivement profiter aux banques en ligne, désormais bien installées dans le paysage, et aux nouveaux entrants, comme Orange Bank.

« Dans ce contexte, la rétention et la fidélisation deviennent un enjeu pour les banques traditionnelles », poursuit Bérénice Goales. « Elles doivent adopter une nouvelle approche : le package de services ne suffit plus, il faut être capable d’écouter le client, d’interagir avec lui, d’être à l’écoute de ses besoins et de ceux de sa famille, de proposer des services adaptés ». En résumé, dégager une valeur ajoutée qui permette de justifier le prix supérieur demandé.

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Plus sûrement qu’une baisse de prix, l’arrivée conjointe de la loi Macron et de l’arrivée d’Orange Bank va donc contribuer à accélérer une mutation déjà à l’œuvre : la transformation numérique des banques à réseaux.