Ristourne justifiée ou avantage indu ? La justice administrative a examiné en appel mercredi un recours contre la remise fiscale de deux milliards d'euros accordée à la Société Générale après l'affaire Kerviel, contestée en raison de la responsabilité de la banque dans cette histoire.

La procédure, engagée par le conseiller régional d'Ile-de-France Julien Bayou, vise la publication d'une enquête interne de Bercy sur le bien-fondé de ce rabais, mais aussi l'annulation de la décision qui a conduit la Société Générale à bénéficier de ce crédit d'impôt. Ce dernier, d'un montant de 2,197 milliards d'euros, avait été accordé en 2009 et 2010 au groupe bancaire, confronté à une perte astronomique de 4,9 milliards d'euros, au titre d'un régime fiscal accordé aux entreprises déficitaires et victimes de fraudes.

Un point contesté par Julien Bayou, qui estime que la Société Générale n'avait pas à bénéficier de ce statut de victime, ayant elle-même eu une responsabilité dans les transactions frauduleuses de son ancien trader Jérôme Kerviel, révélées au grand jour en 2008.

Les manquements de la SocGen reconnus

En première instance, fin 2015, l'élu écologiste avait été débouté. Mais entre-temps, « la situation a changé », a souligné lors de l'audience son avocat, Me Jean-Sébastien Boda, en référence à une décision de la Cour d'appel de Versailles, qui a reconnu en septembre 2016 des « manquements » dans les procédures de contrôle de la banque.

« Les carences dans l'organisation et les dispositifs de contrôle et de sécurité de la banque » ont « concouru à la production du dommage, limitant le droit à indemnisation de la Société Générale », avait notamment estimé la Cour, en réduisant de 4,9 milliards à un million d'euros la somme devant être versée par Jérôme Kerviel.

Décision fin octobre

Sans s'exprimer sur le fond de l'affaire, la rapporteure publique, chargée de proposer au tribunal une solution au litige, s'est prononcée pour une annulation du jugement de première instance, en raison d'un problème de « compétence » du tribunal concerné. La demande, au vu de la complexité de l'affaire, n'aurait pas dû « relever du juge unique », comme cela a été le cas, mais aurait dû être tranchée par « une formation collégiale », a-t-elle fait valoir.

La magistrate a en revanche contesté « l'intérêt à agir » de Julien Bayou, en raison de sa qualité de simple citoyen, tout en reconnaissant que ce point faisait débat. « Je pense que la jurisprudence va évoluer », a assuré de son côté Me Boda, invitant la cour à faire preuve d'« audace ». La décision, qui a été mise en délibéré, devrait être rendue d'ici la fin du mois d'octobre.