Comment se porte la relation banquier-clients à l’âge du web et des applications bancaires ? Comment le numérique a-t-il changé le métier de conseiller ? Les réponses de Béatrice Layan, responsable de l’Observatoire des métiers de la banque.

Béatrice Layan, responsable de l'Observatoire des métiers de la banque

Béatrice Layan est responsable de l’Observatoire des métiers de la banque, organisme paritaire chargé notamment d’étudier l’évolution des métiers bancaires.

Béatrice Layan, la tendance est à la réduction des réseaux d’agences des banques de détail. Quel impact cela a-t-il sur l’emploi ?

Béatrice Layan : « La relation clients reste centrale dans la banque, et les métiers de la force de vente [chargés d’accueils, chargés de clientèle, responsables d'agences, NDLR] y représentent toujours un emploi sur deux. Le gros des troupes est formé par les chargés de clientèle particuliers, qui représentent 18% de la population bancaire. C’est également le premier métier en termes d’embauche : 25% des recrutements. Car il faut le rappeler, la banque continue de recruter. »

Le métier de conseiller a toutefois beaucoup changé au cours des dernières années…

B.L. : « La banque change depuis 30 ans et va continuer à le faire. Mais il est vrai que l’irruption du digital a constitué un grand virage, comme pour l’ensemble des secteurs, qui a contribué à accélérer ce changement. Et ce n’est pas fini. Les attentes des clients ont complètement changé en quelques années. Ils viennent moins en agences et utilisent de plus en plus d’autres canaux, comme les sites ou les applications bancaires. C’est d’ailleurs un motif de fierté pour le secteur bancaire : leurs applications sont les 3e les plus utilisées par les Français, après la météo et les réseaux sociaux. Dans ce contexte, le quotidien des conseillers change aussi. »

De quelle façon ?

« Une relation plus personnalisée »

B.L. : « Les nouvelles technologies permettent une relation plus personnalisée avec le client. Cette personnalisation du service est aussi attendue en agence, où les conseillers doivent intervenir plus en amont de leurs besoins, réagir plus vite à leurs demandes. La multicanalité permet d’avoir des réponses plus rapides qu’avant. »

Certains salariés se plaignent de subir de plus en plus de pression au travail. Confirmez-vous cette évolution ?

B.L. : « L’Observatoire ne comporte pas d’indicateur sur le sujet. Il existe des outils pour accompagner les collaborateurs dans l’accélération du changement, aider les conseillers à répondre aux nouvelles demandes des clients. »

L’une des évolutions majeures dans les agences, c’est la disparition des chargés d’accueil, des guichetiers, et la prise en charge de cette fonction par les conseillers eux-mêmes, souvent à tour de rôle…

B.L. : « Ce choix relève de la stratégie spécifique de chaque enseigne, et ne peut pas être généralisé. Ce qui est vrai, c’est que le rôle des chargés d’accueil a évolué, qu’ils montent en compétence. 4,5% de la masse salariale dans le secteur bancaire est d’ailleurs consacrée à la formation, c’est beaucoup. »

Certaines enseignes évoquent une crise des vocations, des difficultés croissantes à recruter… Confirmez-vous cette tendance ?

« Les jeunes talents voient la banque comme un secteur ancien »

B.L. : « Toutes les industries sont confrontées à des difficultés de recrutement. Et la banque de détail fait partie de celles qui ont du mal à attirer les jeunes talents. Ces derniers ont souvent l’image d’un secteur ancien, hiérarchisé, dont les valeurs ne correspondent pas à leurs attentes… La crise de 2008 n’a évidemment pas aidé. Mais c’est une vision faussée : la banque est un métier utile, qui sert l’économie, exercé par des collaborateurs responsables et qui ont des valeurs. L’enjeu pour les enseignes, qui travaillent toutes sur leur marque employeur, est de mieux le faire savoir, notamment grâce aux contrats d’alternance, nombreux dans le secteur, et qui participent à attirer les jeunes talents dans les métiers de la banque. »