2023 sera une année de stabilité, voire de léger recul, pour les prix des services bancaires en France. En fouillant dans les nouvelles brochures des établissements, on trouve pourtant quelques hausses sensibles, parfois au-delà des 2%. Et elles ne doivent rien au hasard.

+2% : tel est le « bouclier tarifaire » annoncé sur les services bancaires en 2023. En septembre dernier, Bercy a, en effet, obtenu du secteur qu'il lève légèrement le pied, en ne répercutant que partiellement l'inflation, attendue autour de 6,5% en décembre.

Ce cap a-t-il été tenu ? Oui, à de rares exceptions près, pour ce qui est des tarifs sur lesquels porte l'engagement des banques, c'est-à-dire les plus représentatifs, ceux facturés pour les services du quotidien. Plus généralement, l'examen des dernières brochures tarifaires publiées par les établissements montrent que les évolutions des prix moyens, service par service, seront souvent contenues sous les 1%.

Certaines lignes vont même connaître des baisses de prix, qui recouvrent toutefois un caractère exceptionnel. Elles sont liées, en effet, à l'alignement des tarifs des banques du groupe Crédit du Nord sur ceux de sa maison mère, la Société Générale, dans le cadre de la fusion entre les deux réseaux. En clair, ce sont surtout les clients du Crédit du Nord et de ses satellites qui verront la facture baisser.

Quelques hausses au-delà des 2%

Voilà pour la vue générale. En fouillant dans les nouvelles grilles publiées, on trouve pourtant quelques dissonances, des lignes tarifaires qui vont subir des hausses de prix supérieures à 1%, voire aux 2% du bouclier tarifaire sur lequel les banques se sont engagées. En voici la liste, par ordre décroissant :

Lignes tarifaires Evolution
2022-2023
Lettre d'information préalable au rejet d'un chèque+6,81%
Retraits hors réseau DAB de la banque+5,74% (1)
Virement instantané (web ou mobile)+3,78%
Chèque de banque +2,80%
Assurance perte et vol des moyens de paiement +2,38%
Offre groupée de services standard+1,84%
Refabrication d'une carte bancaire +1,30%
Frais de transfert d'un PEA (plafond)+1,26%
Autorisation de découvert (frais périodiques)+1,25%

(1) Sur la base d'un retrait hors réseau par semaine.
Revue de 129 brochures tarifaires, émises au plus tard le 04/11/2022 et applicables pour le début d'année 2023, comparaison avec les grilles en vigueur début 2022.

Sans surprise, on retrouve dans cette liste des services qui ne cessent d'augmenter année après année. Nous nous étions livrés, voici un an, au même exercice : détailler, ligne par ligne, les évolutions tarifaires des nouvelles grilles publiées par les établissements pour le début de 2022. La liste des plus fortes augmentations ressemblait beaucoup à celle de cette année. On y retrouvait déjà les retraits d'espèces hors du réseau de DAB de la banque qui a émis la carte bancaire, l'assurance contre la perte et le vol des moyens de paiement, les transferts de comptes épargne, le chèque de banque...

Frais bancaires 2022 : les tarifs qui flambent

Monétisation des incidents de paiement

Ce n'est évidemment pas une coïncidence, mais le reflet de tendances de fond. Les établissements bancaires modèrent leurs politiques tarifaires sur les services les plus exposés, ceux notamment suivis par l'Observatoire des tarifs bancaires de la Banque de France. C'est la conséquence, à la fois, du contexte concurrentiel — l'émergence, en particulier, de banques en ligne qui ne facturent pas les services du quotidien —, mais aussi de la pression intermittente exercée par les pouvoirs publics. Le « bouclier tarifaire » de 2023 n'est pas une première. Par le passé, le gouvernement a même obtenu, en 2019, un gel total des tarifs bancaires.

Les banques augmentent plus franchement le prix de certaines lignes tarifaires moins exposées, parmi lesquels des frais liés aux incidents de paiement. C'est le cas ici de la lettre d'information préalable — parfois appelée « lettre Murcef » — envoyée aux usagers qui vont subir un rejet de chèque. Selon nos relevés, le prix moyen de ce courrier, actuellement facturé plus de 13 euros, va encore progresser de près de 7% en 2023 ! On peut y voir une forme de monétisation des difficultés financières des usagers bancaires, particulièrement mal venue dans le contexte actuel.

Baroud d'honneur sur le virement instantané

Une autre évolution, elle aussi récurrente, n'en reste pas moins étonnante. Comme chaque année ou presque depuis qu'il est apparu dans les grilles tarifaires, il y a 3 ou 4 ans, le prix du virement instantané va encore augmenter en 2023, de près de 4%. Une évolution qui se fait en contradiction totale avec les orientations prises par les autorités, française et européenne, qui souhaitent démocratiser l'usage de ce moyen de paiement.

En avril dernier, le Comité national des paiements scripturaux (CNPS), une enceinte de concertation présidée par la Banque de France (1), avait ainsi pointé le retard français dans le domaine, appelant les particuliers et les professionnels à s'en emparer. On voit mal comment une augmentation de prix pourrait les y encourager.

Il s'agit toutefois d'un baroud d'honneur. Face au refus des banques de renoncer à monétiser, à outrance, le virement instantané, la Commission européenne a décidé d'utiliser la contrainte : il sera prochainement interdit aux banques de faire payer un virement instantané plus cher qu'un virement classique.

Le classement des banques les moins chères

(1) Devenu depuis le Comité national des moyens de paiement (CNMP)