Développée aux Pays-Bas dans le giron d'ING, l'application de gestion budgétaire Yolt débarque aujourd'hui en France, après la Grande-Bretagne et l'Italie. Qu'apporte ce nouvel acteur ? Quelles sont ses ambitions dans l'Hexagone ? Entretien avec Frank Jan Risseeuw.

Frank Jan Risseeuw, CEO de Yolt

Frank Jan RISSEEUW est CEO de Yolt, application mobile de gestion budgétaire, filiale de la banque néerlandaise ING

Frank Jan Risseeuw, où et quand a débuté l'histoire de Yolt ?

Frank Jan Risseeuw : « Yolt est née en 2016 de la volonté d'ING, qui cherche à tester de nouvelles manières de gérer ses comptes, et aussi de nouveaux modèles économiques. La première version de notre application a ainsi été lancée à la mi-2016 en Grande-Bretagne, d'abord en version bêta, avant un lancement grand public en 2017. Mais Yolt a dès le début été pensée comme une plateforme européenne. Cette année, nous l’avons donc lancée en Italie et aujourd’hui en France. »

Quel est votre lien, aujourd’hui, avec ING ?

F.J.R. : « Yolt est une filiale d’ING, qui continue d’y investir. Mais nous fonctionnons comme une entreprise indépendante, avec un management et une infrastructure informatique séparés. »

A quoi sert Yolt ?

F.J.R. : « Il s'agit d'une plateforme mobile, disponible sur iPhone et Android, qui permet de se connecter à plus de 60 services financiers en France, principalement des banques, et d’obtenir une vision complète et claire de son argent. Nous consolidons ensuite cette vue - où vous dépensez votre argent, quelles sont les factures à venir, combien vous payez pour vos abonnements - afin d'aider nos usagers à faire les bons choix. Nous les mettons aussi en contact avec des partenaires, qui leur donnent l'opportunité d'économiser en accédant à de meilleurs produits et services. Exemple : nous travaillons en France avec Selectra, une plateforme qui permet, via l'achat groupé, de faire des économies sur ses factures d’électricité ou de gaz. »

Lancement aujourd’hui en bêta privée

Dans un premier temps, Yolt sera proposée en bêta privé, le temps d'adapter l’application aux besoins des usagers français et de développer aussi les partenariats. Les invitations sont envoyées, au compte-gouttes, à ceux qui ont téléchargé l’application, disponible sur les stores iOS et Android. Le lancement grand public interviendra courant 2019, sans plus de précisions dans l’immédiat.

Quelle cible visez-vous ?

F.J.R. : « Tout le monde peut trouver un intérêt à Yolt, mais nous nous adressons plus particulièrement aux 18-45 ans, une classe d’âge généralement à l’aise avec le mobile. Avec la DSP2 (1), le paysage des services financiers mais aussi l’état d’esprit de ces consommateurs vont beaucoup évoluer dans les années à venir. Il y a là une opportunité pour nous. »

Lire sur le sujet : Agrégateurs de compte : ce qui change avec la DSP2

Pourquoi la Grande-Bretagne, l’Italie et la France plutôt que les Pays-Bas, votre pays d’origine ?

F.J.R. : « Ces trois pays ont en commun d'être des marchés très larges. Ils comptent notamment de nombreux millenials [personnes nées à partir du milieu des années 1980, qui ont en commun d'avoir grandi avec le numérique, NDLR], qui ont le désir d'expérimenter de nouvelles manières de gérer leur argent, mais aussi l'obligation de gagner en autonomie sur ce sujet. La France est aussi un marché mature pour les services d'agrégations de comptes, avec plusieurs acteurs déjà installés, comme Bankin’ ou Linxo. »

Justement, qu’est-ce qui différencie Yolt de Bankin’ ou Linxo ?

F.J.R. : « Pour être honnête, nous partageons aujourd’hui beaucoup de points communs avec ces services. Au fil du temps, nous allons toutefois apporter de nouvelles fonctionnalités qui, nous l’espérons, correspondront aux attentes de nombreux usagers. Nous allons également élargir le champ de nos partenariats avec des acteurs français pour certains, mais aussi européens. »

Les Français sont réputés pour être plutôt conservateurs en matière d’argent. Ils changent par exemple peu de banques. Comment espérez-vous les convaincre ?

F.J.R. : « Notre produit sera le même dans tous les pays, mais nous nous attendons effectivement à voir des différences en termes de rythme d'adoption. Les Français ne seront peut-être pas immédiatement aussi réceptifs que les Britanniques [Yolt revendique un demi-million d’usagers en 16 mois outre-manche, NDLR]. Je reste toutefois persuadé qu'il y a, ici comme ailleurs en Europe, une attente pour plus de simplicité, plus d'intelligence, dans la gestion de son argent au quotidien. »

Vous insistez sur le fait que Yolt a vocation à devenir une plateforme européenne. Quel intérêt cela représente-t-il pour vos futurs usagers français ?

F.J.R. : « Dans l’immédiat, les clients français pourront uniquement connecter leurs comptes ouverts en France. Mais, à terme, nous allons faire supprimer les frontières. Un Français qui travaille en Grande-Bretagne, par exemple, pourra ajouter son compte britannique dans son appli française. A terme, Yolt pourra être utile où que vous soyez en Europe. »

(1) Entrée en vigueur début 2018, la directive révisée sur les services de paiement offre notamment un cadre réglementaire et technique à l’activité de nouveaux acteurs du service financier, les agrégateurs de comptes par exemple. Lire sur le sujet : DSP2 : Bruxelles veut un big bang des services de paiement