Des sénateurs s’inquiètent de la disparition des agences bancaires en zone rurale, et de la création de déserts bancaires. Un phénomène sans doute inéluctable, mais contre lequel il existe quelques parades.

Le 21 novembre 2018, le Sénat discutera en séance publique une proposition de loi émanant du groupe du Rassemblement démocratique et social européen (RDSE). Son objet : lutter contre la désertification bancaire dans les territoires ruraux. Pour cela, la proposition vise d’une part à créer un fonds, géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), dédié au maintien et à la création de distributeurs automatiques de billets (DAB) dans les communes rurales ; d’autre part à introduire un « critère de distance minimale des bureaux de La Poste comportant un DAB » : « seuls 10% de la population d’un département » pourrait ainsi « se trouver éloignée de plus de 5 kilomètres et de plus de 20 minutes de trajet automobile » d’un DAB de La Banque Postale.

La proposition fait suite à une question posée récemment au gouvernement par un autre sénateur, Hervé Maurey, qui faisait également le constat d’une disparition des DAB dans les campagnes françaises et pointait un risque de désertification.

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Pas de désert bancaire, mais...

Peut-on vraiment parler de déserts bancaires en France ? « Non », estime Régis Dos Santos, président national du SNB / CFE-CGC, premier syndicat de la profession bancaire, pour qui « le maillage du territoire par les banques reste encore très serré ». Il est précisément de 549 agences bancaires pour un million d’habitants en 2016, selon les chiffres de la Banque centrale européenne.

Il tend toutefois à se desserrer. Entre 2015 et 2016, ce sont plus de 300 agences, sur 37 600, qui ont disparu, toujours selon la BCE. Un phénomène inéluctable pour Régis Dos Santos : « La clientèle qui vient régulièrement en agence devient rare. La plupart des usagers ne s’y rendent plus que pour les étapes importantes de leur vie : un achat immobilier, un mariage, un succession… » Dans ce cadre, la proximité géographique n’est plus nécessaire, et certaines enseignes, notamment les banques commerciales (BNP Paribas, Société Générale, LCL), font le choix de se recentrer sur les zones urbaines.

Conséquence : nombre de petites villes n’ont plus qu’une seule enseigne bancaire, ce qui pose un problème de concurrence, mais aussi plus concrètement d’accès au conseil bancaire et aux espèces, avec la raréfaction voire la disparition des DAB devenus trop coûteux : le parc français a ainsi diminué de 2000 unités entre 2015 et 2016, pour atteindre 58 500.

Cash-back, fibre et camions-banques

Il existe toutefois quelques parades. « Le paiement sans contact permet de remplacer les espèces pour les petits achats du quotidien », note ainsi Régis Dos Santos. Autre avancée : la régulation en cours de la pratique du cash-back, qui va autoriser les commerçants à fournir des espèces à leurs clients à l’occasion d’un paiement par carte bancaire.

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Côté accès au conseil, la partie est un peu plus complexe. « On pourrait imaginer des agences ‘’cathédrales’’ situées dans les centres urbains, rassemblant 20 ou 30 conseillers qui interagissent avec leurs clients en visiophonie », lance Régis Dos Santos. Une solution qui se heurte encore à la lenteur des débits internet dans les territoires ruraux.

En attendant que l’ensemble du territoire soit fibré, certaines banques en reviennent à des recettes anciennes. « Il y a 40 ans, on voyait des camions-banques dans les campagnes », se souvient le président national du SNB / CFE-CGC. Une idée précisément réintroduite par le Crédit Agricole, qui a relancé depuis une dizaine d’années une flotte d’agences itinérantes dans les campagnes, notamment, du centre de la France. Si tu ne vas pas à l’agence, c’est l’agence qui vient à toi !