Le superviseur des grandes banques en zone euro a mis en garde mardi contre les risques pesant sur le secteur du fait de la remontée des taux d'intérêt et des perspectives économiques moroses.

La rentabilité des banques en zone euro est revenue à des niveaux « jamais vus depuis plus d'une décennie », grâce surtout à la remontée des taux d'intérêt pour faire face à l'inflation, a souligné Andrea Enria, président du Conseil de surveillance prudentielle, logé au sein de la Banque centrale européenne (BCE), lors d'une conférence de presse.

Toutefois, « la faiblesse des perspectives macroéconomiques et le durcissement des conditions de financement restent une source de risque pour les banques européennes », a prévenu M. Enria, dont c'était la dernière apparition avant de céder le témoin en janvier à Claudia Buch, actuelle vice-présidente de la Bundesbank.

Le gendarme de près des quelques 110 plus importants groupes bancaires en zone euro voit notamment la hausse des taux accroître l'exposition des établissements financiers à des pertes sur des crédits en portefeuille. La BCE a ainsi relevé les exigences de fonds propres prudentiels pour 20 banques - non identifiées - pour lesquelles elle a estimé insuffisante la provision comptable passée pour couvrir d'éventuels impayés sur les prêts. Par ailleurs, huit banques ont dû constituer un coussin de fonds propres supplémentaires car elles ont accordé des prêts à des clients déjà fortement endettés.

Cela fait qu'en moyenne les exigences en termes de fonds propres supplémentaires ont légèrement augmenté, à 1,2% en moyenne, contre 1,1% en 2023. Les exigences globales sur les fonds propres prudentiels dit « CET1 », rapportés aux actifs à risque, ont également été relevées, passant d'un ratio de 10,7 % à 11,1%.

Ces données ressortent du « processus d'examen et d'évaluation prudentiels » (SREP) effectué par la BCE pour mesurer les risques pesant sur chaque banque.

Accélérer le retrait de Russie

Les grandes banques de la zone euro doivent par ailleurs accélérer le retrait de leurs activités de Russie, où elles s'exposent à des risques peu contrôlables, a affirmé M. Enria.

Globalement, ces établissements et leurs filiales ont abaissé d'« environ 47% leur exposition (en Russie ») depuis le début de la guerre lancée en 2022 contre l'Ukraine, a-t-il souligné. Si cette réduction est « significative », le superviseur a néanmoins « une préoccupation » sur le fait que les banques ne soient « pas toujours en mesure, en raison de la situation spécifique en Russie, d'exercer les contrôles internes (sur les risques pris par leurs) filiales en Russie » Cela « nous pousse à exercer davantage de pression sur les banques pour qu'elles poursuivent et accélèrent ce processus de réduction de taille », a-t-il poursuivi. Bien que « pénible parce que cela a un coût », cette voie doit être « envisagée dans la mesure du possible » par les banques concernées, selon M. Enria.