D'ici quelques jours, une nouvelle néobanque fera son apparition en France. Son nom : OnlyOne. Son credo : limiter l'impact carbone de ses clients. Rencontre avec Kamel Naït-Outaleb, cofondateur de cette banque mobile d'un nouveau genre.

Kamel Naït-Outaleb, cofondateur d'Onlyone

Kamel Naït-Outaleb est l'un des 3 associés co-fondateurs d'OnlyOne.

Vous étiez cadre bancaire. Est-ce que cette ancienne vie vous a donné envie de lancer un compte de paiement à vocation éthique ?

Kamel Naït-Outaleb : « J'ai en effet travaillé 17 ans dans plusieurs banques traditionnelles, au Crédit Lyonnais, à la Banque Populaire et chez HSBC où j'ai passé 13 ans et où je travaillais sur des projets réglementaires très structurants, dont la mise en place des procédures de contrôle client pour détecter la fraude et le blanchiment. En 2017, je gérais un back-office d'une centaine de personnes chez HSBC. Mais à ce moment, en tant que jeune papa, ma conscience écologique et sociétale a pris le dessus. Après avoir fait un MBA en marketing et écrit une thèse qui montrait notamment que les néobanques actuelles n'avaient rien apporté en termes d'éthique, j'ai eu l'envie de créer un établissement qui reflète mes valeurs, une sorte d'hybride entre des néobanques comme N26 et Revolut et des banques classiques à la fibre sociétale comme le Crédit Coopératif et la Nef. »

Votre banque sera-t-elle plus éthique dans « le monde de demain » ?

En quoi votre néobanque OnlyOne peut avoir un impact positif sur l'environnement ?

« Notre valeur ajoutée est de permettre à nos utilisateurs de prendre conscience de leur impact sur l'environnement »

K.N-O : « On propose un compte 100% mobile, respectant les standards des néobanques avec notamment le temps réel et le pilotage de la carte. Notre valeur ajoutée est de permettre à nos utilisateurs de prendre conscience, chiffres à l'appui, de l'impact de leur consommation. Pour ce faire, on a créé un algorithme qui estime leur empreinte carbone en fonction de leur dépense par carte. Il s'appuie essentiellement sur les bases de données de l'Ademe [Agence de la transition énergétique sous tutelle du ministère de la Transition écologique et solidaire, ndlr]. Cette estimation leur permet de se situer par rapport au niveau moyen d'émission d'un Français qui est de 12 tonnes de CO2 par an. Ensuite, nous les conseillons dans leur mode d'achat pour réduire les postes de dépenses les plus polluants, via des défis conso à relever. Notre objectif est de leur permettre d'abaisser de 25% à 40% leurs émissions individuelles pour répondre aux objectifs de réduction des Accords de Paris. »

Vous n'avez pas accès au détail du ticket de caisse de vos clients, n'est-ce pas un sérieux bémol ?

K.N-O : « On a discuté de cette problématique avec l'Association Bilan Carbone qui nous a rassurés. A notre niveau, le premier enjeu est la prise de conscience écologique. Ce n'est que dans un second temps, quand la personne commence à changer ses modes de consommation, que mesurer plus finement son impact peut avoir un intérêt. Regarder le détail des paniers de nos clients est une fonctionnalité que l'on souhaite lancer plus tard, a priori durant le premier semestre 2021. Par contre, notre algorithme tient compte d'éléments fondamentaux comme le fournisseur d'énergie choisi par nos utilisateurs. On sait dire aujourd'hui quelle est l'émission carbone pour 1 euro dépensé chez Enercoop, Total et autres EDF. »

Outre ce volet éthique, que comprennent vos comptes et combien coûtent-ils ?

« Nous ne croyons pas au modèle freemium, incompatible avec une banque éthique »

K.N-O : « Sur la tarification, nous ne croyons pas au modèle freemium choisi par tant de néobanques, pour la simple et bonne raison qu'une néobanque éthique, avec des fonctionnalités innovantes et qui cherche à rémunérer ses salariés et payer ses prestataires décemment, ne peut être gratuite. En outre, on ne voulait pas dépendre totalement de levées de fonds pour nous développer. Nous avons deux formules, payantes donc. La formule de base, à 6 euros par mois comprendra une carte, les virements et prélèvements illimités et 3 sous-comptes pour préparer des projets. Par contre les retraits aux distributeurs, plus polluants que les paiements par carte, seront limités. Il y aura aussi une formule premium qui comprendra notamment la gratuité des paiements en devises, et un pack famille. Nous reverserons 10% des cotisations à des instances pour financer des projets à fort impact social et environnemental. A notre lancement, nous serons partenaires des Nations unies et de leurs fonds UNITLIFE destiné à lutter contre la malnutrition infantile et nous financerons des projets de protection de la biodiversité en France. »

Un compte premium avec des opérations internationales gratuites : n'est-ce pas contradictoire avec votre volonté de limiter l'impact carbone de vos utilisateurs ?

K.N-O : « On a eu ce débat en interne. Et on a fait le choix de ne pas être dans la culpabilisation mais plutôt dans la pédagogie et l'accompagnement de nos utilisateurs. »

En tant que néobanque, vous ne proposez pas de produit d'épargne. Or, c'est avant tout l'usage de l'argent placé qui distingue une banque éthique d'un établissement classique.

« Courant 2021, nous souhaitons proposer des solutions d'épargne éthique à nos clients »

K.N-O : « En effet, et c'est pourquoi, au-delà du seul compte, nous voudrions devenir une plateforme qui agrège les meilleurs produits financiers d'un point de vue sociétal et environnemental. En ce sens, nous discutons avec plusieurs sites de crowdfunding spécialisés dans le financement des projets à impact, afin de relayer leurs offres d'investissement dans l'application OnlyOne. Courant 2021, nous souhaitons également proposer à nos utilisateurs des assurances vie contenant des fonds verts ou labelisés ISR [investissement socialement responsable, ndlr] qui nous paraissent vraiment vertueux. »

Quand allez-vous lancer votre offre de compte ?

K.N-O : « Nous testons actuellement en interne la carte et l'application. Une version beta, accessible à une centaine de personnes, sera lancée d'ici quelques jours, en vue de sortir officiellement et à plus grande échelle OnlyOne entre mi-octobre et fin novembre. »

Avez-vous fixé des objectifs commerciaux ?

K.N-O : « D'ici fin 2021, nous aimerions compter 15 000 à 20 000 clients. »

Voir notre comparatif des comptes courants éco-responsables

Deux autres « néobanques éthiques » Green Got et Helios ont aussi prévu de se lancer dans les prochaines semaines. Qu'est-ce qui vous distingue d'elles ?

K.N-O : « Je dirais que nous tentons d'avoir une approche plus globale moins centrée sur le seul respect de l'environnement. De plus, nous avons créé nos propres outils d'évaluation, nos propres algorithmes afin d'être là aussi totalement indépendants. Mais globalement, on s'inscrit toutes les 3 dans la même démarche. Et cela fait plaisir de voir que l'on n'est pas seul à vouloir agir pour le bien commun. »

Fiche d'identité : OnlyOne
ActivitéNéobanque éthique
Site webhttps ://onlyonecard.eu
Date de créationDécembre 2018
Date de lancementOctobre 2020
Clientèle viséeParticuliers sensibilisés aux questions environnementales et sociales, à la recherche de partenaires qui partagent leurs valeurs
AgrémentAgent Prestataire d’établissement de monnaie électronique
Capital11 730,20 €
Chiffre d'affairesn/a
Nombre de clientsn/a
Effectif actuel10

L'offre OnlyOne en détails