Paiement entre particuliers, cagnottes gratuites, paiement en 4 fois : PayPal, 10 millions de clients revendiqués en France, multiplie les nouveautés. Objectif notamment : convaincre les Français d’abandonner les espèces et le chèque, à son profit. L’éclairage de Francis Barel.

Francis Barel, DG Paypal France, en juillet 2020

Francis Barel est directeur général de PayPal France.

Francis Barel, qui aujourd’hui utilise PayPal en France ?

Francis Barel : « Le dernier chiffre officiel date de septembre 2019 : 10 millions d’utilisateurs actifs, dont un demi-million de professionnels. Parmi ces 500 000 comptes professionnels, on trouve des sites marchands à proprement parler, mais aussi beaucoup de vendeurs indépendants, qui travaillent sur des places de marché web, comme Back Market ou eBay. Du côté des particuliers, nous touchons tous types de profils : des gens qui ont connu PayPal sur eBay il y a 15 ans et qui continuent à l’utiliser pour tous leurs achats en ligne, jusqu’aux plus jeunes, qui s’en servent, par exemple, pour payer leur consommation de contenus en streaming. »

En général, on ouvre un compte PayPal à l’occasion d’un achat en ligne ou d’une cagnotte. Passé cette transaction initiale, les Français continuent-ils à utiliser le compte ?

Francis Barel : « Oui. Les utilisateurs actifs font en moyenne 40 transactions par an : des paiements entre particuliers ; des participations à des cagnottes ; des achats e-commerce de tout montant, en France et à l’étranger ; des règlements d’abonnements numériques (Deezer, Netflix, Uber, etc.). Ça paraît beaucoup et en même temps, c’est moins d’une transaction par semaine. Notre objectif est de passer à une par jour, en multipliant les cas d’usage. C’est pour cela que nous avons lancé ces dernières années le paiement entre particuliers gratuit, les cagnottes gratuites, le QR Code pour payer dans les points de vente physiques ou plus récemment le paiement en 4 fois. »

PayPal a-t-il l’ambition de remplacer la carte bancaire, dont on sait qu’elle n’est pas toujours adaptée à l’univers numérique ?

« Le chèque engendre d’importants coûts cachés »

Francis Barel : « Non, au contraire, nos usagers associent leur carte bancaire à leur compte PayPal, ce qui leur évite d’en renseigner le numéro à chaque paiement en ligne. Non, les ennemis de PayPal - ce n’est pas un secret - sont les espèces et les chèques. Le chèque, notamment, est encore très utilisé en France, alors qu’il est peu efficace et engendre d’importants coûts cachés pour les entreprises. Nous sommes donc heureux de les aider, ainsi que les consommateurs, à ne plus utiliser de chèques et d’espèces, et à choisir des moyens de paiement qui fonctionnent à la fois sur internet, sur mobile et dans les boutiques physiques. »

Malgré tout, PayPal et les portefeuilles électroniques en général restent très minoritaires, même pour le commerce en ligne : moins de 12% des achats, en 2018, contre 80% pour la carte bancaire. Comment l’expliquer ?

Francis Barel : « Je préfère voir le verre à moitié plein : plus de 4 utilisateurs sur 5 en France n’ont pas encore eu le plaisir d’utiliser PayPal pour consommer en ligne ! C’est encourageant : pendant le confinement, nous avons vu des personnes âgées se mettre au commerce électronique pour la première fois, et choisir PayPal pour protéger leur carte bancaire. Car c’est le cœur de notre métier : gérer la sécurité des paiements, pour le consommateur, mais aussi pour le commerçant. »

PayPal vient de lancer en France le paiement en 4 fois. Pourquoi vous aventurer sur un nouveau créneau pour vous, celui du crédit (1) ?

« Seuls les plus gros sites proposaient le paiement en 4 fois »

Francis Barel : « Nous avons voulu anticiper la demande des Français. Le paiement en 4 fois représente aujourd’hui 15% du e-commerce français, et jusqu’à 30 à 40% sur certains sites. La demande est donc bien là. En revanche, nous avons constaté que seuls les plus gros sites marchands - entre 500 et 1 000, sur les 200 000 recensés en France - proposaient cette option. Pourquoi pas les 199 000 autres ? Parce que les acteurs traditionnels du paiement fractionné n’ont pas les moyens de couvrir l’ensemble du marché, et que les sites plus modestes n’ont pas les ressources pour l’intégrer sur leur site. Notre choix a donc été d’intégrer la fonctionnalité directement dans le portefeuille PayPal. C’est le consommateur qui choisit ou non cette option, le commerçant n’a rien à faire : pour lui, c’est une transaction PayPal comme une autre, avec le même niveau de commission. »

Comment appréciez-vous le risque que vous prenez en avançant l’argent à vos usagers ?

Francis Barel : « Nous avons la chance d’avoir de nombreux utilisateurs, certains depuis plus de 10 ans. Nous nous appuyons notamment sur leur historique de transactions pour apprécier ce risque. Sur la base de cet historique, certains de nos clients sont éligibles au paiement en 4 fois, et l’option (2) leur est proposée, avec réponse instantanée, pour régler des biens tangibles, entre 100 et 2 000 euros. »

PayPal fait également des incursions dans le monde du commerce physique. Vous avez par exemple lancé récemment le paiement par QR Code. PayPal peut-il devenir un moyen de paiement du quotidien ?

Francis Barel : « Notre constat, c’est que la limite entre les mondes physique et numérique tend à disparaître. Avec PayPal, on peut déjà prépayer son trajet VTC, ses courses au supermarché ou son hamburger. Cela fait des années que nous sommes intégrés dans de nouvelles expériences de paiement, qui fonctionnent très bien. On avait en tête depuis longtemps de lancer cette expérience QR Code. Avec la crise sanitaire, les gens ont commencé à se méfier du paiement en espèces, voire par carte bancaire. Nous avons donc considérablement accéléré son lancement, de façon à offrir à tous les artisans, restaurateurs, commerçants, une vraie solution 100% sans contact. »

N’est-il pas étonnant de lancer un moyen de paiement basé sur une technologie aussi basique que le QR Code, alors que le paiement mobile NFC, du type Apple Pay, est presque généralisé ?

« Le Covid a changé beaucoup de choses »

Francis Barel : « Il y a encore quelques mois, je vous aurais sans doute répondu oui. La crise du Covid a changé beaucoup de choses. Il y a aujourd’hui des milliers de commerçants qui ont été durement touchés, et qui ont besoin, non seulement de relancer leur activité, mais de la rendre plus numérique. Résultat : nous avons vu de nombreux artisans et commerçants créer leur compte PayPal ces dernières semaines. Ils n’ont ensuite eu besoin que de 30 secondes pour imprimer leur QR Code, le coller sur leur comptoir ou la vitre de leur food-truck et proposer ainsi un moyen de paiement sans contact à leurs clients. »

Quelle sera la stratégie de PayPal dans les mois et années à venir ?

« Notre mission reste l’inclusion financière : permettre à des populations qui étaient exclues des transactions internet de pouvoir y venir facilement et en toute sécurité. »

(1) PayPal dispose d’un agrément d’établissement de crédit au Luxembourg, ce qui l’autorise à prêter de l’argent en France grâce au passeport européen. (2) Option payante : 2,1% du montant de la transaction, dans la limite de 20 euros.