Les livrets bancaires ont beaucoup séduit les épargnants au cours des derniers mois. Pour autant, leur rémunération vient encore de diminuer. Ces produits ont-ils vraiment perdu tout leur intérêt ?

165 milliards d’euros. Voici à vue de nez le montant de la sur-épargne qui sera accumulée par une partie des ménages entre 2020 et 2021 en raison de la crise sanitaire, d'après les derniers chiffres compilés par la Banque de France. Jusqu’ici l’essentiel de ce magot s'entasse sur les comptes courants ou encore sur le Livret A. Ce dernier a enregistré une collecte près de deux fois supérieure à la normale, à plus de 26 milliards d'euros l’an dernier. Et ce malgré une rémunération nette qui est passée de 0,75% à 0,5%. Un succès qui se poursuit avec 6,32 milliards d’euros de plus déposés en janvier. En tout, ce sont plus de 700 milliards d’euros qui s’accumulent sur l’ensemble des produits d’épargne réglementée (Livrets A, LDDS, LEP, PEL, PEP, CEL, livrets jeunes). « Les ménages ne veulent pas s'engager sur le long terme et privilégient des produits liquides. Il y a une volonté manifeste à se constituer une réserve pour faire face à la survenue de problèmes d'emploi ou de revenus », indiquait récemment à MoneyVox l’économiste Philippe Crevel.

L'alternative oubliée des comptes à terme

Les comptes courants ont un inconvénient évident : hormis chez Groupama ou à la Macif, ils ne rapportent rien ! Parmi les autres supports où il est facile de déposer et de retirer son argent, deux familles de produits offrent une rémunération, certes légère, mais une rémunération tout de même ! Dans cette catégorie, il ne faut ainsi pas oublier les comptes à termes (CAT) ou les livrets bancaires, des produits fiscalisés proposés par les banques qui fixent leur propre taux. Selon la Banque de France, les particuliers y avaient déposé près de 285 milliards d’euros à la fin octobre.

Les CAT, qui nécessitent de s’engager à ne pas toucher à son argent sur une période souvent comprise entre 3 mois et 5 ans, ne sont pas à la fête. « L’encours est passé de 75 milliards d’euros au moment de la crise des subprimes en 2008 à 35 milliards d’euros l’an dernier. En un an, les CAT ont encore perdu 5 milliards d’euros », explique Cyril Blesson, associé au sein du cabinet Pair Conseil et éditeur des Cahiers de l'épargne. Bien que les CAT peuvent être mieux rémunérés qu’un livret bancaire ou qu’un Livret A, les ménages ne souhaitent pas voir leur argent bloqué pendant trop longtemps. Et surtout le gain théorique de rémunération sur un CAT paraît aujourd’hui trop faible pour justifier d’en ouvrir un ».

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Un livret bancaire, quand le Livret A est au plafond

A l’inverse, les livrets bancaires sont en bonne forme. 29 milliards d’euros ont été collectés en 2020 après 17 milliards d’euros en 2019, d’après Cyril Blesson. Et pour cause, ils ont de nombreux atouts : gratuits, faciles à alimenter, avec des plafonds élevés. Une illustration célèbre, pour l'anecdote : Roselyne Bachelot a mis 925 595 euros sur son compte d’épargne BNP Paribas d'après sa déclaration de patrimoine publiée fin novembre par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.

Les patrimoines incohérents de nos ministres

Mais le livret bancaire a deux autres avantages de taille : l'argent est disponible facilement et en plus la banque le rémunère. Pour autant, dans la majorité des cas, ce n’est pas le Pérou : 0,11% d’intérêt, en moyenne, d’après la Banque de France. Et ce taux risque de baisser encore puisque deux des acteurs qui proposent les taux les plus intéressants du marché viennent, coup sur coup, de les diminuer. PSA Banque avec son Livret Distingo et RCI Bank avec Zesto sont passées de 0,8% à 0,6% brut. Ces livrets étant fiscalisés, il faut retrancher la flat tax de 30%, soit un taux net de 0,42%, inférieur au 0,5% offert par le Livret A.

Dans ce contexte, les livrets bancaires ont-ils perdu tout intérêt ? Pas forcément. « Nos clients ont principalement déjà leurs livrets d’épargne réglementée au plafond. Chez nous, ils veulent pouvoir rémunérer une partie supplémentaire de leur épargne qui soit disponible immédiatement, et ne pas la laisser sur leur compte courant qui ne rapporte rien », explique Sarah Zamoun, responsable de Distingo. « Aujourd’hui, le profil type de notre clientèle est composé principalement à 60% d’hommes, âgés en moyenne de 57 ans. Mais la donne a un peu changé avec le confinement. Nous avons réussi à toucher une nouvelle population plus jeune entre 30 et 35 ans qui jusqu’ici ne faisait pas forcément de son épargne une priorité, pour ceux qui en ont les moyens bien sûr. Elle est visiblement sensible à l’impact direct de ce placement dans un contexte où l’industrie automobile a été particulièrement touchée par la crise. L’encrage dans l’économie réelle au travers le refinancement des crédits de PSA Banque France a une valeur importante pour ces nouveaux épargnants ».

Livrets bancaires : séparer le bon grain de l'ivraie

A l’image de RCI Bank, la banque de Renault, PSA Banque utilise ses ressources pour prêter de l’argent aux particuliers qui souhaitent acheter une Peugeot ou une Citroën. Dans ce contexte, elle est prête normalement à mieux rémunérer son livret que les banques traditionnelles afin d’attirer les dépôts des particuliers. A 0,6%, la rémunération actuelle de Distingo reste attractive d’autant que « nous continuons à proposer régulièrement des taux boostés pour nos clients et nos prospects tout au long de l’année », se défend Sarah Zamoun. Jusqu’à la fin février par exemple, Distingo offrait ainsi un taux boosté de 3% pendant 2 mois et une prime de 40 euros. De quoi redevenir ponctuellement plus intéressant que le taux du Livret A.

En ce moment, c’est le livret de My Money Bank qui est le mieux-disant. En passant par l'application mobile Cashbee, vous pouvez profiter d’un taux boosté de 2% pendant 3 mois jusqu'à 75 000 euros de dépôts. Ensuite, un taux de base de 0,6% s’applique.

Bien sûr, certains livrets n'ont eux aucun intérêt ou presque : le Livret Epargne Orange ING affiche par exemple, un taux de 0,01% brut ! Il n'empêche : en scrutant les offres du marché des livrets bancaires, il y a de quoi de trouver mieux qu'un compte courant qui ne rapporte rien.

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