Les prix flambent en ville. Et le confinement a soufflé un parfum d’exode urbain. Qu’il s’agisse d'acheter une résidence secondaire ou de vous installer à la campagne, la maison à 100 000 euros est-elle encore un rêve accessible ?

La « maison à 100 000 euros » : un véritable slogan politique, lancé par Jean-Louis Borloo, alors ministre de la Cohésion sociale, en 2005. Il précisait d’ailleurs : « maison à 100 000 euros tout compris », puisque le projet était de permettre aux ménages – même modestes – de pouvoir à la fois acheter un terrain et faire construire avec cette enveloppe à tout juste six chiffres. Faute de terrains disponibles à bon prix, le slogan a rapidement pris du plomb dans l’aile. Mais il a marqué les esprits, si bien que de nombreux promoteurs promettent encore aujourd’hui de construire des maisons pour moins de 100 000 euros, montant auquel il faut cette fois ajouter le coût du terrain ! Et si vous pouviez vous achetez une maison à 100 000 euros, sans vous lancer dans l’achat de parcelle et la construction ?

Ces maisons existent-elles ? Et où ?

« Aujourd’hui, le prix moyen d’une maison dans l’ancien est de 245 000 euros : ce ne sont clairement plus des biens qui sont au niveau du marché », lance Laurent Vimont, président de Century 21 pour calmer les ardeurs des acheteurs à l'affût de bons plans. « Des maisons à ce prix, elles existent ! Dans la Creuse, par exemple, à une autre époque dans le Perche… mais ces biens sont rares, ou dans un état nécessitant beaucoup de travaux. » Laurent Vimont ne casse donc pas totalement le rêve de la maison à 100 000 euros, mais il le limite à un marché de niche.

Christophe Raffaillac, rédacteur en chef du portail d’information des notaires, Immonot, n’écarte lui pas totalement l’existence de ce marché, même s’il est fortement délimité. En effet, sur ce même portail des notaires, sur les près de 18 000 maisons en vente, environ 6 000 annonces sont catégorisées à moins de 100 000 euros, et pas moins de 400 dans la fourchette 95 000 à 100 000 euros : « Ce sont des maisons de territoires ruraux, principalement dans les départements de la diagonale verte, qui va des Ardennes aux Pyrénées. »

100 000 euros : des maisons habitables ? Ou à rénover ?

Dans certains départements de la diagonale verte, ce prix « rond » n’a rien d’une exception. Christophe Raffaillac précise notamment que 100 000 euros est le prix médian (la moitié des annonces sont au-dessus, la moitié en dessous) en Corrèze sur Immonot.

Le Perche, territoire vallonné et forestier à 2h environ de la région parisienne, autour de Nogent-le-Rotrou, a été identifié à l’orée des années 2000 comme cette terre accueillante pour les petits portefeuilles. Depuis, les prix ont grimpé et, surtout, les biens bon marché ont été dévalisés : « Cela existe encore, mais elles ne sont plus légion », insiste Didier Ktorza, gérant de l’agence Perche Val d’Huisne, au sein du réseau local des Agences vertes : « Les meilleurs affaires, accessibles à 100 000 euros sans avoir tout à rénover, elles ont déjà été achetées ! Elles sont bien plus difficiles à trouver qu’il y a 10 ans. » Les maisons vendues actuellement à 100 000 euros dans le Perche « nécessitent le plus souvent de gros travaux avant d’être habitées », prévient Didier Ktorza : « Le plus souvent, il faut prévoir un gros budget travaux, de près de 100 000 euros, qui double la mise ! » Quelques maisons à 100 000 euros ou moins, habitables sans travaux, existent mais Didier Ktorza les qualifie de « brutes », pas dans les standards des biens les plus confortables…

Pour trouver une maison à 100 000 euros sans avoir à doubler la mise pour les travaux, il faut donc se plonger dans la diagonale verte barrant la métropole du Nord-Est au Sud-Ouest. Même si Christophe Raffaillac, d’Immonot, confirme que la grande majorité des biens avoisinant ce prix symbolique nécessitent « des travaux » : « Ce type de projet de rénovation permet de bénéficier d’un prêt à taux zéro, accessible à condition d’inclure 25% de travaux au financement global dans les zones rurales. »

3 exemples de maisons à moins de 100 000 euros

  • Creuse. Une maison à 94 000 €, pour 73 m2, 4 pièces et un terrain de près de 1 500 m2 à La Saunière, et peu de travaux à prévoir (Century 21).
  • Perche. Une maison de campagne à 89 500 € avec 3 chambres, 1 000 m2 de terrain, mais une salle de bain « à finir d'aménager » (Agences vertes).
  • Lot. « Villa » sur sous-sol et un terrain de près de 5 000 m2, mais avec d'importants travaux à prévoir (Immonot).

Qui sont les acheteurs à l’affût de ces annonces ?

Tout acheteur vise, en règle générale, en premier lieu dans la zone où il veut habiter. La démarche consistant à acheter n'importe où à condition d’obtenir un « petit » prix est marginale... Les premiers acquéreurs des maisons avoisinant encore les 100 000 euros sont donc les résidents des zones où se vendent les biens en question. Mais pas que. « Chez les notaires, il y a une tendance assez marquée, et qui s'accèlère suite au confinement, de gens voulant accéder à des biens plus spacieux, avec un jardin », confirme Christophe Raffaillac, rédacteur en chef d’Immonot. Plusieurs sondages insistent sur cette envie de mise au vert, le dernier du lot étant une étude OpinionWay-SeLoger publiée le 26 octobre (1) : selon ce sondage, 23% des Franciliens recherchent à acheter hors d’Ile-de-France, contre 14% en février.

« Nous avons beaucoup de locataires parisiens souhaitant acheter une résidence secondaire qui pourrait un jour devenir leur résidence principale. On ne change pas de vie du jour au lendemain ! Certains commencent par retaper une résidence secondaire à un prix abordable, puis finissent par en faire leur résidence principale quand ils en ont la possibilité », souligne Didier Ktorza, directeur d’agence dans le Perche.

Dans la quête d’une résidence secondaire à 100 000 euros, Christophe Raffaillac souligne lui que les notaires relèvent « de plus en plus de demandes en Creuse ». Il ajoute que « le marché des maisons à petit prix, dans les zones rurales, intéresse aussi clairement les investisseurs locatifs ».

Du simple au sextuple d'un département à un autre !

Prix médian (50% sont plus chers, 50% moins chers) dans les départements, en octobre 2020 :

  • Alpes-Martimes : 439 600 €
  • Rhône : 322 500 €
  • Gironde : 280 000 €
  • Bas-Rhin : 226 000 €
  • Nord : 158 000 €
  • Hautes-Pyrénées : 138 000 €
  • Orne : 100 000 €
  • Haute-Marne : 75 000 €
  • Creuse : 63 000 €

Source : Notaires de France (barometre.immobilier.notaires.fr)

(1) Enquête réalisée par OpinionWay pour le compte de SeLoger du 3 au 17 septembre 2020.