Les contribuables faisant appel à un conseiller financier ou confrontés à une déclaration excessivement complexe ont cette année un délai supplémentaire pour remplir leur obligation. Parmi eux, les bailleurs qui cherchent à déduire des travaux de leur revenu imposable. Ce qu’il faut savoir, en 6 questions.

1 - Qui profite d’un délai pour déclarer ses revenus ?

Ne cherchez pas votre calendrier : la date limite est bien dépassée pour la déclaration en ligne et sur papier. Il n’empêche, face au contexte exceptionnel de la crise sanitaire du Covid-19, l’administration fiscale a étendu le délai réservé aux contribuables passant par un intermédiaire (expert-comptable, gestionnaire de biens...) à une plus large frange de foyers fiscaux : ceux qui perçoivent des revenus indépendants (BIC, BNC, BA) mais aussi ceux qui perçoivent des revenus fonciers « complexes ». Pour les foyers concernés, l’ultime délai est fixé au mardi 30 juin, à condition de déclarer sur impots.gouv.fr.

Plus précisément, ce délai concerne en priorité les contribuables dits « professionnels », faisant appel à un intermédiaire. Exceptionnellement, en 2020, les foyers fiscaux présentant « les mêmes typologies de revenus » ont jusqu’à la fin juin. La Direction générale des Finances publiques (DGFiP) insiste toutefois sur le fait que ce délai vise surtout les déclarations « particulièrement complexes à établir », en citant par exemple le cas de revenus fonciers perçus via une SCI (société civile immobilière). Pas de panique : si vous devez imputer un déficit foncier, vous pouvez considérer votre déclaration comme complexe. Sachez toutefois que ce délai peut retarder la restitution de l’éventuel trop perçu du fisc, attendue fin juillet.

2 - En temps normal, quelles sont les charges déductibles ?

Le principe du déficit foncier consiste à réduire son revenu imposable en imputant le coût de travaux aux revenus fonciers : les charges étant ponctuellement plus importantes que les loyers annuels, vos revenus fonciers sont négatifs, générant ainsi un déficit lui-même imputable à vos revenus globaux.

En temps normal, la liste des charges pouvant réduire vos revenus fonciers (puis éventuellement créer un déficit foncier) est longue : taxe foncière, frais d’agence, primes d’assurance, intérêts du crédit bancaire, et donc tous les travaux d’entretien et d’amélioration du bien immobilier en location.

Plus de détails sur le déficit foncier « en temps normal »

3 - Pourquoi la déclaration 2020 est-elle à part ?

Flash-back : le 1er janvier 2019, l’impôt sur le revenu est entré dans l’ère du prélèvement à la source. Pour éviter une double imposition des revenus de l’année 2018, le législateur a décidé de gommer les ressources « habituelles » de 2018 à l’aide du crédit d’impôt spéciale « année blanche », le CIMR. Conséquence : faute de revenus imposables à réduire, le déficit foncier avait alors peu d’intérêt.

Pour éviter que les propriétaires bailleurs ne retardent en masse leurs travaux de 2018 à 2019, le législateur a adopté un mécanisme anti-optimisation : la déduction 2019 est limitée à la moyenne des travaux réalisés en 2018 et 2019. La déclaration 2020, qui porte sur les revenus 2019, clôt ce dispositif.

4 - Comment les travaux réalisés en 2019 sont-ils déduits ?

Pour simplifier, si vous avez attendu 2019 pour réaliser des travaux dans un bien en location : ils ne peuvent être déduits qu’à hauteur de 50% ! A deux exceptions près : ils peuvent être déduits à 100% s’il s’agit de travaux d’urgence ou s’il s’agit de travaux effectués sur un logement acheté en 2019.

Année de paiement des travauxTravaux d'urgenceAutres travaux déductiblesTravaux sur immeuble acquis en 2019Travaux déduits en 2018Travaux déductibles en 2019
Immeuble 12018 100 000 100 000100 000
2019 100 000 -
Immeuble 22018 -200 000
2019 200 000-
Immeuble 32018 -100 000
2019 200 000 -
Immeuble 42018 -200 000
201950 000 150 000-
Source : Advenis Gestion Privée

La catégorisation des travaux s’analyse indépendamment pour chaque bien immobilier, comme le montre la simulation ci-dessus réalisée par Advenis gestion Privée. Ce tableau reprend à l'identique le mécanisme que vous trouvez dans la déclaration de revenus. Résultat : dans l’immeuble 1, en réalisant des travaux d’un même montant chaque année, le dispositif anti-optimisation est peu pénalisant. En revanche, dans l’immeuble 3, en choisissant de reporter l’ensemble des travaux d’aménagement à 2019, la déduction est limitée à la moitié du coût des travaux.

5 – Urgence ou « autres » : comment trier les travaux de 2019 ?

Face au cas bien particulier de l’année blanche 2018, le fisc a cherché à distinguer les charges « pilotables ». En clair, les travaux que vous pouviez choisir de programmer en 2018 ou en 2019 à votre guise. Sont ainsi catégorisées comme pilotables toutes les dépenses d’amélioration et d’entretien du logement non impérieuses. Ils ne peuvent être déduits qu’à 50% en 2019 (ou plus précisément à hauteur de la moyenne 2018-2019).

Les travaux d’urgence, qui peuvent eux être déduits à 100%, sont les réparations dus à un cas de force majeure. Il s'agit des travaux faisant suite à une catastrophe naturelle ou à un acte de vandalisme, les opérations décidées d’office par le syndic de copropriété ou encore le remplacement d’appareils nécessaire à la location du bien. La DGFiP liste ainsi quelques exemples de travaux d’urgence : remplacement d’une chaudière hors d’usage, la réparation d’une toiture suite à une catastrophe naturelle, le remplacement d’une porte suite à un cambriolage…

6 - Où reporter vos travaux 2019 dans la déclaration 2020 ?

Un tableau « déduction des dépenses de travaux en 2019 » reprenant ce principe de catégorisation figure dans la déclaration annexe 2044 dédiée aux revenus fonciers. A l’aide de ce tableau, et à l'image de la simulation détaillée ci-dessus, vous allez obtenir un « total des travaux déductibles en 2019 », à reporter aux lignes indiquées dans la notice spécifique de la déclaration « revenus fonciers ». Une tâche ardue qui peut nécessiter l’aide d’un professionnel. In fine, cette déclaration annexe vous permettra d’obtenir les montants précis à reporter aux lignes 4BB et 4BC de votre déclaration « classique » 2042, au paragraphe « régime réel ».

Pour rappel, le déficit foncier est imputable aux revenus globaux (ressources du travail et autres) dans la limite de 10 700 euros par an. Si vous dépassez le plafond, le montant non déduit peut être reporté à l’année suivante.

Travaux uniquement en 2018 : déduits à 150%

A noter : si vous avez réalisé des travaux d’amélioration du bien uniquement en 2018, et non en 2019, vous pouvez profiter une seconde fois du déficit foncier. « Un contribuable qui avait déclaré des travaux en 2018, peut à nouveau les déduire à hauteur de 50% de leur montant, portant ainsi à 150% le montant total de la déduction (100% en 2018 + 50% en 2019) », explique Estelle Billi, ingénieur patrimonial chez Advenis Gestion Privée. Un « effet d’aubaine » qui n’avait toutefois d’intérêt que pour certains contribuables cherchant à réduire d’importants revenus exceptionnels en 2018.

Lire aussi : Comment déclarer vos revenus fonciers au fisc en 2020