Peut-on rester dans sa maison ou son appartement au décès de son partenaire de vie ? La situation est différente que l’on soit propriétaire ou locataire de sa résidence principale.

Le sort du logement est crucial quand l’un des conjoints décède. La principale angoisse est que le conjoint survivant soit chassé du domicile familial par des héritiers peu scrupuleux, surtout lorsque les enfants sont issus de plusieurs unions. La loi a réagi il y a une quinzaine d’années pour que le veuf ou la veuve puisse conserver son toit sur la tête jusqu’à la fin de sa vie. Le droit au logement du conjoint survivant s’exerce en deux étapes sous forme d’un droit temporaire (article 763 du Code civil) et d’un droit permanent.

Droit temporaire au logement

Le conjoint survivant est assuré de conserver la jouissance gratuite du logement familial appartenant aux époux et du mobilier compris dans la succession pendant l’année qui suit le décès. C’est ce qu’on appelle le droit temporaire au logement. Par jouissance gratuite, il faut comprendre que ni les héritiers du conjoint décédé, ni les enfants communs ou non, ni personne d’autre ne peuvent réclamer un loyer ou une indemnité. Toutefois, le droit temporaire au logement ne s’applique pas quand le conjoint décédé était seulement usufruitier du logement. Cette solution est logique : l’usufruit prend fin au décès de l’usufruitier. Autre cas de figure où cette protection ne fonctionne pas : si le logement familial est la propriété d’une SCI (société civile immobilière), y compris si les deux époux étaient les deux seuls associés. A noter que l’acceptation de ce droit temporaire d’un an ne vaut pas acceptation de la succession.

Le droit temporaire est d'ordre public

Il est obligatoire : le conjoint survivant ne peut jamais en être privé. Pendant l’année qui suit le décès, ce dernier peut rester dans l’appartement ou la maison quoi qu’il advienne. Ce droit temporaire au logement d’un an est également accordé au partenaire de Pacs qui survit à l’autre dans les mêmes conditions que le conjoint survivant, sous une réserve : n’étant pas obligatoire, le partenaire survivant peut en être privé par testament.

Droit permanent au logement

Après ce délai d’un an suivant le décès, le conjoint survivant bénéficie d’un droit d’usage et d’habitation sur le logement jusqu’à son décès. Ce droit, parfois nommé droit viager, lui permet de demeurer dans le logement sa vie durant. Peu importe si ce bien immobilier fait partie de la communauté conjugale ou constitue un bien propre du conjoint décédé.

Le droit d’usage et d’habitation s’impute sur la part d’héritage du conjoint. Si cette valeur est inférieure à celle de ses droits successoraux, il reçoit un complément prélevé sur les autres biens de la succession. Si la valeur est supérieure à sa part dans la succession, le conjoint survivant conserve la jouissance du logement et du mobilier jusqu’à la fin de sa vie sans que les autres héritiers ne puissent lui réclamer quoi que ce soit.

Comme son nom l’indique, le droit d’usage et d’habitation permet au conjoint survivant de vivre sa vie dans le logement familial sans en être propriétaire puisque le bien fait partie de la succession. S’il veut le devenir, la loi lui accorde un droit préférentiel, c’est-à-dire une priorité pour racheter aux autres héritiers leur quote-part. Par ailleurs, le droit de jouissance et d’habitation échappe à la taxation, comme tous les biens, sommes et valeurs que recueille le conjoint. En effet, les transmissions successorales entre époux sont totalement exonérées d’impôt.

Attention. Pour bénéficier du droit permanent au logement, le conjoint survivant doit accepter la succession et dispose d’un an à partir du décès pour manifester aux autres héritiers sa volonté de bénéficier de ce droit d’usage et d’habitation à vie (article 765-1 du Code civil). Le conjoint survivant doit exprimer sa décision aux héritiers sous forme de lettre recommandée avec accusé de réception, même s’il s’agit de ses propres enfants. Enfin, d'un commun accord, le conjoint survivant et les autres héritiers peuvent convertir ce droit permanent en une rente viagère ou en un capital, explique le site des notaires.

Le droit permanent n'est pas d'ordre public

Ce droit peut être limité ou supprimé par la volonté du défunt. Mais celle-ci doit s'exprimer par testament authentique, donc rédigé par un notaire, en présence de deux autres notaires ou par un notaire assisté de deux témoins. En revanche, le fait que le conjoint survivant soit privé de son droit d’usage et d’habitation sur le logement à vie par testament n’a pas de conséquence sur ses droits successoraux.

Le maintien du bail d’habitation en cas de location

Le principe est simple. Le conjoint survivant a droit au transfert du bail d’habitation qu’il ait été signé par les deux époux, ou seulement par le conjoint décédé. Le bailleur ne peut pas s'y opposer. Ce dispositif protecteur s’applique que le logement appartienne au secteur locatif privé, relève des dispositions très avantageuses de la loi de 1948 ou est une HLM (habitation à loyer modéré). De plus, pendant l’année suivant le décès, le conjoint survivant se fait rembourser le paiement des loyers sur la succession.

Le transfert du bail et donc le droit de rester dans le logement, résidence principale du couple, bénéficie également au partenaire de Pacs survivant. Il peut se faire rembourser par la succession du partenaire décédé les loyers qu’il acquitte pendant un an. Attention : le concubin ne peut exiger le transfert du bail d’habitation à son profit que si au moment du décès, le couple vivait ensemble dans le logement depuis au moins un an. Il en va autrement si le bail avait été signé par les deux concubins : dans ce cas, la location continue avec le concubin survivant en sa qualité de co-locataire.

Et en cas d'union libre ?

C'est le cas de figure le moins protecteur. Si vous êtiez propriétaires en indivision, vous n'avez, en principe, pas de droit au maintien dans les lieux. La part de votre concubin décédé revient à ses héritiers qui peuvent demander la vente du logement lors de la succesion. Il en va différament si vous aviez prévu avec votre conjoint le maintien dans le logement, soit en léguant sa part à l'autre dans un testament, soit via la signature d'une clause de rachat dans une convention d'indivision. Reste le cas où vous avez des enfants mineurs en commun avec votre conjoint décédé. Là, vous pouvez faire appel à la justice pour obtenir le maintien de l'indivision.

Si vous étiez locataire, et que le bail avait été signé par vous deux, vous pouvez rester dans le logement. Si le bail avait été signé seulement par votre conjoint, vous bénéficiez, dans le cas de figure le plus courant, du transfert seulement si vous viviez avec le défunt depuis au moins 1 an avant le décès et que le concubinage était notoire (relations continues, stables et connues). Si votre concubinage a duré moins d'1 an, vous devrez obtenir l'accord du bailleur et signer un nouveau bail.

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