Le gouverneur de la Banque d'Italie, Ignazio Visco, a exprimé mercredi ses inquiétudes quant aux conséquences de la hausse des taux d'emprunt, provoquée par la politique engagée par la coalition populiste au pouvoir à Rome.

« Les conséquences d'une hausse importante et prolongée des rendements des titres d'Etat peuvent être graves », a-t-il déclaré à l'occasion de la Journée mondiale de l'épargne. Le spread, le très surveillé écart entre les taux d'emprunt allemand et italien à 10 ans, « oscille désormais autour de 300 points de base, contre une moyenne de 130 enregistrée sur les quatre premiers mois de l'année », en raison de « l'incertitude sur l'orientation de la politique budgétaire » et « des rapports avec l'Union européenne », a rappelé le gouverneur.

De mai à août, les investisseurs étrangers ont réalisé des ventes nettes de titres italiens pour 82 milliards d'euros, dont 67 milliards de titres publics, a-t-il précisé. Or, la hausse des primes « produit des pertes en capital qui dégradent la situation patrimoniale des banques », lesquelles détiennent quelque 380 milliards de dette souveraine italienne, a-t-il noté.

Et, « directement ou indirectement, le risque souverain retombe sur les familles italiennes », a-t-il expliqué : directement si elles possèdent elles-mêmes des titres, et indirectement via leurs banques, qui, fragilisées, augmentent le coût du crédit et en réduisent la disponibilité aux ménages et entreprises. Enfin, la hausse des taux d'intérêt « se reflète négativement sur les comptes publics », a noté le gouverneur, en estimant à plus de 5 milliards d'euros en 2019 l'augmentation des charges d'intérêts. « La dette publique de l'Italie est soutenable mais la détermination à la maintenir comme telle doit être claire, en mettant le ratio déficit/PIB sur un chemin crédible de baisse durable », a encore déclaré Ignazio Visco.

Le risque d'une « procédure pour déficit excessif »

La coalition populiste au pouvoir à Rome, formée de la Ligue (extrême droite) et du Mouvement Cinq Etoiles (M5S, antisystème), a provoqué l'inquiétude des marchés en décidant d'un budget prévoyant un déficit à 2,4% du PIB en 2019, très au-dessus de ce que prévoyait le précédent gouvernement de centre gauche (0,8%). La Commission européenne a rejeté ce projet de budget, fustigeant « une déviation claire, nette et assumée » par rapport aux règles européennes. Rome a jusqu'au 13 novembre pour lui fournir un budget révisé. Elle s'expose sinon à une « procédure pour déficit excessif », susceptible d'aboutir à des sanctions financières.