Face à la faiblesse endémique de l’inflation, l’éventualité d’une nouvelle baisse du taux du Livret A - fixé à 1,25% depuis bientôt un an - au 1er août prochain semble faire son chemin au sein du gouvernement. Celui-ci pourrait toutefois user de son pouvoir de dérogation pour limiter le repli à 1%, plutôt que 0,75%, au nom de la défense du pouvoir d’achat de l’épargne populaire.

0,75% ou 1% ? Depuis que le gouverneur de la Banque de France a déclaré, hier sur BFMTV, que le taux du Livret A, actuellement de 1,25%, « devrait baisser un peu » le 1er août prochain, la question se pose de savoir dans quelle mesure. Comme l’a également rappelé Christian Noyer, la réponse à cette question dépend, en théorie, de l’évolution de l’indice des prix. C’est en effet la principale variable qui entre en compte dans la formule de calcul du taux du Livret A (1).

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L’Insee a justement publié ce matin son indice des prix à la consommation (IPC) du mois de mai. Sur un an et hors tabac, il en reste, comme en avril, à une hausse de 0,6%. S’il se maintient à ce niveau en juin, le taux du Livret A devrait logiquement baisser à 0,75% au 1er août prochain. Mais il suffirait d’une hausse d’un petit dixième de point d’ici là pour que le repli soit contenu à 1%.

L’invocation du « pouvoir d’achat »

L’expérience montre toutefois que la fixation du taux du Livret A, avant d’être le simple résultat d’une formule arithmétique, est avant tout un choix politique. Le gouvernement dispose en effet du pouvoir de déroger à la règle de calcul, y compris à l’occasion des révisions normalement automatiques d’août et février. La question est donc : a-t-il l’intention de le faire, ou non, et dans quelle mesure ?

Les récentes déclarations sur le sujet sont restées volontairement floues. Manuel Valls, le 26 mai dernier, n’avait ni écarté, ni confirmé, cette éventualité. « Nous verrons, je ne commente pas les informations, les rumeurs », avait déclaré le premier ministre à RTL. Le ministre des finances, Michel Sapin, n’a pas été beaucoup plus précis, ce matin sur RMC-BFMTV.

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Il a toutefois rappelé ce qui est devenu un cliché de la parole gouvernementale sur le Livret A : « Je tiens à conserver le pouvoir d’achat de l’épargne des plus modestes des Français ». Ce qui, il faut le rappeler, revient à enfoncer une porte ouverte. En vertu de la règle de calcul déjà évoquée, le taux du Livret A est quasi-indexé sur l’évolution de l’indice des prix. C’est même sa raison d’être : prémunir l’épargne populaire contre le risque d’un rendement négatif par rapport à l’inflation, et donc d’une perte du « pouvoir d’achat ».

Une probable dérogation

Toutefois, cette évocation laisse penser que le gouvernement envisage sérieusement d’user de son pouvoir de dérogation au moment de trancher, dans un mois. Le « coup de pouce » au pouvoir d’achat des Français a en effet été invoqué à plusieurs reprises par le prédécesseur de Michel Sapin au ministère des Finances, Pierre Moscovici. A chaque fois, il s’agissait soit de préparer le terrain, soit de justifier une dérogation à la formule de calcul évoquée plus haut. Le scénario probable pour le 1er août est donc le suivant : soit la formule de calcul donne un taux de 1%, et Bercy devrait acter la baisse ; soit elle donne un taux de 0,75%, et il devrait user de son pouvoir de dérogation pour le maintenir à 1%.

Quoi qu’il en soit, le taux du Livret A a toutes les chances de descendre, le 1er août prochain, à un taux historiquement faible. Ce faisant, il tirera vers le bas les rémunérations des autres produits d’épargne réglementée (LDD, LEP, CEL, etc.) mais aussi, très probablement, celle des livrets d’épargne fiscalisés.

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(1) Les règles de rémunération du Livret A sont fixées par le règlement n°86–13 du 14 mai 1986, mis à jour en 2011.