La hausse de 5,4% du barème permettant de calculer l'indemnité kilométrique a été enfin officialisée à moins d'une semaine du lancement de la campagne de déclaration des revenus 2022. Cette augmentation a un impact plus ou moins bénéfique selon les contribuables. Voici pourquoi.

Il se faisait attendre. L'arrêté qui fixe les barèmes forfaitaires afin de déduire les frais kilométriques de vos revenus à déclarer aux impôts a été publié au Journal officiel vendredi. A noter que vous pourrez déclarer vos revenus 2022 en ligne dès jeudi. Après un bond exceptionnel de 10% en 2022, le barème kilométrique grimpe de 5,4%, au même niveau que les seuils du barème de l'impôt sur le revenu.

Ce barème vous permet comme chaque année de déduire vos parcours domicile-travail et autres trajets professionnels de vos revenus si vous optez pour la déclaration aux « frais réels » au lieu de l'abattement de 10%.

Si ce dernier couvre certaines dépenses courantes, le transport notamment, les salariés qui estiment avoir dépensé davantage pour se rendre au travail peuvent renoncer à cette déduction forfaitaire.

Et donc utiliser l'un des barèmes kilométriques pour profiter d'une déduction aux frais réels : qu'il s'agisse du barème principal pour les voitures ou encore pour les motocyclettes et cyclomoteurs. Mais aussi le barème spécifique aux frais de carburants réservé à l'usage mixte, personnel et professionnel, d'une voiture ou d'un deux-roues. Ce barème revalorisé fait comme chaque année des gagnants et aussi des perdants. Voici pourquoi.

Barème kilométrique applicable aux voitures (en €)
Puissance administrative (en CV)Distance (d) jusqu'à 5 000 kmDistance (d) de 5 001 km à 20 000 kmDistance (d) au-delà de 20 000 km
3 CV et moinsd x 0,529(d x 0,316) + 1065d x 0,370
4 CVd x 0,606(d x 0,340) + 1 330d x 0,407
5 CVd x 0,636(d x 0,357) + 1 395d x 0,427
6 CVd x 0,665(d x 0,374) + 1 457d x 0,447
7 CV et plusd x 0,697(d x 0,394) + 1 515d x 0,470
Barème kilométrique applicable aux motocyclettes (en €)
Puissance administrative (en CV)Distance (d) jusqu'à 3 000 kmDistance (d) de 3 001 km à 6 000 kmDistance (d) au-delà de 6 000 km
1 ou 2 CVd x 0,395(d x 0,099) + 891d x 0,248
3,4,5 CVd x 0,468(d x 0,082) + 1158d x 0,275
plus de 5 CVd x 0,606(d x 0,079) + 1583d x 0,343
Barème kilométrique applicable aux cyclomoteurs (en €)
Distance (d) jusqu'à 3 000 kmDistance (d) de 3 001 km à 6 000 kmDistance (d) au-delà de 6 000 km
d * 0,315(d x 0,079) + 711d x 0,198

Les gagnants

C'est le ministre délégué des Comptes publics, Gabriel Attal, qui a dévoilé, le 23 mars, la revalorisation « de manière exceptionnelle » du barème de l'indemnité kilométrique « de 5,4% ». Celui-ci inclut notamment les dépenses de carburants, les primes d'assurance ou les frais d'entretien. Le ministre a rappelé que cette mesure fiscale concerne plus de deux millions de ménages imposés.

Elle « peut représenter plus de 100 euros pour un célibataire qui gagne 2 900 euros », a précisé Bercy indiquant que cette revalorisation aura un coût pour l'Etat de 140 millions d'euros.

Le ministère de l'Economie a d'ailleurs fourni plusieurs simulations pratiques à Capital. L'une d'elle concerne un célibataire qui a fait 17 200 kilomètres en 2022 au titre de ses déplacements domicile-travail avec une Peugeot 206+ essence 4 CV ayant une consommation de 5,8 L/100 km. Concrètement, cela représente 80 kilomètres par jour sur 215 jours de travail dans l'année. Salarié dans une PME, il touche 2 900 euros net par mois, soit 34 800 euros net annuel.

Selon Bercy, « en l'absence de revalorisation du barème, ses frais de déplacement 2022 auraient été estimés à 6 818 euros (17 200 x 0,323) + 1 262 », lui permettant de diminuer son revenu imposable de 34 800 euros à 27 982 euros. A la clé : un impôt sur le revenu à régler de 1 988 euros pour ce contribuable ayant une tranche marginale d'imposition à 30%.

En revanche, avec la revalorisation de 5,4%, « ses frais de déplacement 2022 seront estimés à 7 178 euros », explique Bercy. Son revenu imposable passe ainsi de 27 982 euros à 27 622 euros. Résultat : 1 880 euros d'impôt sur le revenu en 2023, soit une économie d'impôt sur le revenu de 108 euros.

« Je pense que notre action doit être dirigée avant tout vers ces Français, cette classe moyenne qui travaille, qui a le sentiment qu'on lui en demande toujours plus, soit pour d'autres qui eux ne peuvent pas travailler, soit pour des services publics qui se dégradent alors que c'est financé par leurs impôts », a d'ailleurs illustré Gabriel Attal lors de l'annonce de la revalorisation du barème kilométrique.

Les perdants

La revalorisation du barème kilométrique fait régulièrement l'objet de critiques. L'ancien député écologiste, Matthieu Orphelin, estimait l'an dernier que ce système « favorise les véhicules puissants, ne se destine qu'aux actifs payant l'impôt sur le revenu, et ne cible qu'une faible partie de la population : seulement 2,5 millions de Français payant l'impôt déclarent des frais réels ! Relever le barème des frais kilométriques est donc une fausse bonne idée anti-redistributive qui n'améliorera pas la situation des travailleurs pauvres mais plutôt celle des ménages aisés ».

A noter que le gouvernement a également mis en œuvre une indemnité carburant de 100 euros pour les 10 millions de foyers fiscaux les plus modestes utilisant leur voiture pour aller travailler, en remplacement de la ristourne généralisée à la pompe qui a cessé à la fin de l'année 2022.

Dans les faits, la déduction liée au barème kilométrique est plus élevée pour un contribuable avec une tranche marginale d'imposition haute et qui conduit un véhicule puissant. Mais le barème ne prévoit pas de bonification au-delà de 7 CV. « Les propriétaires de voitures encore plus puissantes et qui sont donc amenés à consommer davantage de carburant profiteront, en partie seulement, de la revalorisation du barème. Elle ne viendra pas intégralement compenser le surcoût des dépenses en frais d'essence. En effet, l'indemnité est basée sur des véhicules moins puissants et qui consomment moins », nous expliquait Olivier Rozenfeld, président de Fidroit, dans un précédent article.

Attention aussi à ne pas surestimer le nombre de kilomètres déductibles puisque, sauf exceptions, il n'est pas possible de déduire plus de 80 km aller et retour par jour entre son domicile et son lieu de travail.

Sans surprise, les autres perdants sont les retraités par exemple car ce barème s'applique seulement aux déplacements professionnels.