Face à une année 2023 « cataclysmique » et des perspectives 2024 peu joyeuses, les professionnels du bâtiment sont en colère, a prévenu jeudi la fédération de promoteurs et constructeurs Pôle Habitat, mettant en garde contre un mouvement comme celui des agriculteurs.

« On sent que la colère monte chez nos adhérents », a affirmé Grégory Monod, président du Pôle Habitat, lors d'une conférence de presse ce jeudi 22 février. Comme les autres fédérations professionnelles, le Pôle Habitat a fait état d'une année 2023 « cataclysmique » pour l'immobilier neuf, avec des perspectives encore plus sombres pour 2024.

« Les ventes de logements neufs aux particuliers, qui constituent l'essentiel du bataillon, abandonnent -38% et tombent à 123 000 unités en 2023, soit moins de la moitié des logements neufs commercialisés en 2021 et presque moitié moins que la moyenne de long terme (222 425 unités en moyenne sur la période 2007-2023) », alerte Pôle Habitat. Les ventes de maisons individuelles neuves ont chuté de 39%, avec seulement 58 500 ventes recensées.

Des plans sociaux dans certaines structures

Et selon la même source, ce ratio va s'effriter encore puisqu'en 2024, les autorisations, qui augurent les mises en chantier de 2025, reculeront encore de plus de 12% sous l'effet de l'effondrement des ventes de 2023, qui s'établissent à -30% tous segments confondus. Des mauvais chiffres qui commencent à avoir des répercussions sur les emplois dans la fillière.

« Jusqu'à présent, on était plutôt dans de l'ajustement, à savoir du non-remplacement de personnes qui pouvaient partir (...). On constate qu'il commence à y avoir, dans certaines structures des plans sociaux », a constaté le président du Pôle Habitat, Grégory Monod. Selon une enquête menée par la fédération auprès de ses adhérents, 16% des emplois ont été supprimés en 2023, et 14% supplémentaires risquent de l'être au premier semestre 2024.

Le Premier ministre Gabriel Attal a affiché le logement comme une des priorités de son action, bien que le monde du logement ait jusque-là plutôt reproché à l'exécutif d'avoir aggravé la crise à coups de coupes budgétaires. Jeudi, les présidents de fédérations professionnelles du bâtiment en Rhône-Alpes ont refusé de rencontrer le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, lui demandant de « l'action ». « Je comprends aussi qu'il puisse y avoir ce genre de réactions, et quelque part je les soutiens », a exprimé Grégory Monod.

« Tant qu'on n'aura pas de concret, on risque d'avoir toujours des réactions comme celles-ci et des actions de plus en plus fortes dans les territoires, et là-dessus, on ne peut que dire : vous récoltez ce que vous avez semé. »

Les promoteurs et constructeurs sont pris en étau entre d'une part, le renchérissement des coûts de construction, provoqué par les coûts des matériaux et une réglementation environnementale plus stricte ; et d'autre part, l'effondrement de la demande, du fait des difficultés d'accès au crédit et de la fin progressive de dispositifs fiscaux incitatifs. « Ça fait plusieurs mois qu'on leur dit que les choses peuvent quand même exploser, et là, j'ose espérer qu'ils vont comprendre que ça risque vraiment de se passer », a ajouté Grégory Monod.