Ce n’est pas parce que vous venez de recevoir la lettre d’une société de recouvrement qu’il faut payer les yeux fermés. Bien au contraire. Les pratiques abusives dans le secteur incite à la prudence.

Vous avez peut-être été approché par une société de recouvrement amiable à la suite d’une facture non payée de téléphone, d’électricité, d’une prime ou cotisation d’assurance, de l’échéance d’un crédit bancaire impayée, ou de tout autre somme que vous devez et dont vous ne vous seriez pas acquitté. Mais force est de constater selon plusieurs enquêtes de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) que certaines sociétés de recouvrement recourent à des pratiques abusives, voire agressives, prélèvent indûment des frais, utilisent parfois des moyens de pression et d’intimidation. Ce que vous devez savoir pour ne pas vous faire avoir.

Des règles à respecter

Une société chargée de recouvrement amiable ne peut agir qu’après avoir conclu une convention avec le créancier qui lui donne le pouvoir d’encaisser des sommes pour le compte de ce dernier. La convention conclue entre la société de recouvrement et le créancier comporte obligatoirement quatre mentions : le fondement et le montant des sommes dues, avec l’indication des différents éléments de la créance ; les conditions et les modalités de son assurance responsabilité civile professionnelle ; les conditions de la rémunération à la charge du créancier ; les conditions de remboursement des fonds encaissés pour le compte du créancier.

Dans la lettre qu’elle adresse au débiteur, c'est-à-dire la personne qui doit de l’argent, la société chargée du recouvrement amiable a l’obligation d’y indiquer, sous peine d’une amende d’au moins 1 500 euros, une série de mentions (article R124-4 du Code des procédures civiles d’exécution) : son nom, son adresse ou son siège social et l’indication qu’elle exerce une activité de recouvrement amiable ; le nom et l’adresse de son client à savoir l’organisme qui l’a chargée de recouvrer la créance impayée ; le fondement et le montant de la somme réclamée en distinguant clairement la dette elle-même, et les éventuels intérêts ou toute autre somme réclamée en plus ; les modalités de paiement (chèque, carte bancaire, mandat postal...). En cas de doute, la société de recouvrement doit prouver qu’elle vous a effectivement envoyé une lettre comportant la totalité des mentions obligatoires.

Une profession encadrée

Selon la réglementation, des personnes physiques ou morales peuvent se charger du recouvrement amiable des créances. Elles doivent, avant tout début d’activité, adresser au procureur de la République rattaché au tribunal judiciaire du lieu de leur siège social (article R 124-2 du code des procédures civiles d’exécution) la justification de la souscription d’un contrat d’assurance responsabilité civile professionnelle. Elles ont aussi l'obligation de justifier l’ouverture d’un compte bancaire affecté exclusivement à la réception des sommes encaissées pour les créanciers.

Frais de recouvrement interdits

La société de recouvrement peut-elle vous réclamer une somme plus élevée que celle dont vous êtes redevable ? Autrement dit, peut-elle vous faire payer le coût de son intervention ? C’est non, la loi l’interdit (article L121-21 du Code de la consommation et article L111-8 du code des procédures civiles d’exécution), sauf décision contraire d’un juge. D’ailleurs la société de recouvrement doit vous informer de cette interdiction de principe en reproduisant, sur la lettre qu’elle vous envoie, une partie des dispositions de l’article L111-8 du Code des procédures civiles d’exécution. Le texte devant figurer sur la lettre est le suivant « Les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier, sauf s’ils concernent un acte dont l’accomplissement est prescrit par la loi au créancier. Toute stipulation contraire est réputée non écrite, sauf disposition législative contraire. Cependant, le créancier qui justifie du caractère nécessaire des démarches entreprises pour recouvrer sa créance peut demander au juge de l’exécution de laisser tout ou partie des frais ainsi exposées à la charge du débiteur de mauvaise foi ».

Ne pas se laisser impressionner

Lorsque vous recevez une demande de paiement d’une société de recouvrement, il est indispensable de vérifier si vous devez réellement la somme mentionnée. Demandez ensuite à la société de recouvrement de justifier qu’elle est bien mandatée pour agir, et pour cela de vous fournir copie de la convention qu’elle a conclue avec son client.

Si la somme est réellement due, il est inutile d’attendre : effectuez le paiement auprès de la société de recouvrement ou directement auprès de votre créancier, en n’oubliant pas d’en avertir cette dernière. Rien ne vous empêche aussi de négocier des délais de paiement : une société de recouvrement vraiment professionnelle pense à juste titre qu’un règlement en plusieurs fois vaut mieux que pas de règlement du tout.

Lorsque vous estimez que le montant réclamé est indu, envoyez une lettre recommandée avec accusé de réception à l’organisme demandeur pour expliquer votre refus de payer (facture déjà réglée, contestation sur le fond…). Si la société de recouvrement amiable utilise des méthodes inacceptables, envoyez-lui une lettre recommandée, avec accusé de réception, lui enjoignant de mettre fin à ses agissements illégaux. N'oubliez pas : une société de recouvrement est un prestataire de services mandataire qui ne peut procéder ni à des saisies, ni vous poursuivre en justice. Même dans la situation où une décision de justice vous ordonne de payer une dette, seul un huissier de justice dispose des moyens juridiques coercitifs pour vous faire payer. Sachez aussi qu'un agent de recouvrement ne peut pas pénétrer dans votre domicile : il risque un an d’emprisonnement et 15 000 euros d'amende (article 226-4 du Code pénal). Si la société de recouvrement amiable exerce sur vous des pressions, déposez une plainte non seulement auprès de la DGCCRF, mais aussi en cas d’urgence auprès du commissariat de police ou de l’antenne de gendarmerie de votre domicile.

De multiples condamnations

Les sociétés de recouvrement amiable de créances n'échappent pas à la justice. Certaines ont été condamnées pénalement notamment pour avoir utilisé des formulaires ressemblant à ceux des huissiers de justice ; proféré des menaces téléphoniques à l’égard de plusieurs débiteurs ; adressé un courrier menaçant le débiteur d’alerter les services sociaux ; omis d’écrire les mentions obligatoires sur la lettre envoyée au débiteur ; ou encore après avoir eu des agissements s’apparentant à du harcèlement. Pensez aussi à rappeler au créancier que les agissements de la société de recouvrement qu’il a mandaté engagent sa responsabilité civile.