Signe de reconnaissance de la Nation aux militaires depuis 100 ans, la Retraite mutualiste du combattant est un contrat d'assurance vie en rente viagère bénéficiant de multiples avantages. Mais au fil des années, le marché de l'épargne a évolué. Et, curieusement, pour certains profils, il n'est plus si avantageux.

Mise à jour 6/09/2023

Est-ce un résultat de notre enquête ? En tout cas, la France Mutualiste annonce que désormais, le capital versé aux héritiers représentera 100% des sommes épargnées, revalorisées annuellement de moins de 1%. Nos calculs ne sont donc plus à jour, mais le résultat reste le même : comme vous le verrez dans l'article, le contrat RMC en option réservée reste largement moins avantageux qu'une « bonne assurance vie ».

Cela aurait dû être un article comme MoneyVox en publie régulièrement. Il était prévu de présenter la Retraite mutualiste du combattant, contrat d'épargne retraite aux multiples avantages et réservé depuis un siècle aux combattants, notamment les militaires intervenus à l'étranger.

En signe de reconnaissance pour un public qui risque sa vie pour la France, ces contrats d'assurance vie bénéficient de multiples avantages de la part de l'État et des mutuelles : bonus de rendement, déductibilités fiscales... Leur particularité, c'est que ces contrats ne proposent qu'une rente viagère : à l'âge de la retraite, une formule de calcul prenant en compte l'espérance de vie et les capitaux épargnés permet de déterminer un montant versé annuellement.

Retraite mutualiste du combattant : 4 drôles d'avantages pas si avantageux

Pour MoneyVox, le sujet était entendu : avec tous ces avantages et un podium quasi systématique au palmarès des fonds en euros, la RMC était le meilleur contrat du marché. Ce qui n'a rien de choquant, au vu du public concerné. Nous avons donc souhaité comprendre sa mécanique et ses avantages, pour mieux les expliciter. Mais les choses ont évolué dans un sens inattendu. Au fil des échanges avec quelques distributeurs, certains éléments ont semblé incohérents. De simples calculs grossiers remettaient même en cause cette image de « meilleur contrat » !

La rédaction a donc voulu en savoir plus, et a sollicité plusieurs distributeurs pour obtenir des précisions. La France Mutualiste est la seule mutuelle à avoir pris le temps de répondre. En toute transparence, elle a bien voulu fournir de multiples simulations, calculs et projections selon les âges, les montants des versements, les options choisies... Ces chiffres confirmant nos intuitions, MoneyVox a alors sollicité plusieurs experts (actuaires, courtiers...). L'objectif : comparer la performance annoncée du contrat d'épargne retraite RMC à une « simple » assurance vie optimisée au maximum, en choisissant une assurance vie à frais réduits, afin de s'adapter aux nouveaux standards du marché.

Ce qui a suscité notre curiosité, c'est que les bonus de l'État et le rendement annuel de l'épargne ne s'ajoutent pas au capital, comme pour toute assurance vie. Il fut difficile de le saisir, mais ces éléments n'apparaissent que dans le calcul de la rente. Rente dont le montant dépend d'un plafond annuel pour éviter toute fiscalité. À ce jour, le plafond frôle les 2 000 euros, mais augmente de presque 2% par an.

Pour que la comparaison soit cohérente, il faut déjà préciser un élément. La RMC offre deux options. D'un côté, le « régime aliéné » permet une rente plus importante. Mais aucun capital ne sera transmis aux héritiers en cas de décès. Même si les rentes versées n'atteignent pas le montant épargné ! Il faut donc espérer vivre longtemps pour que le « pari » soit gagnant...

A l'inverse, le « régime réservé » prévoit de reverser 90% du capital épargné, bonifié d'une légère revalorisation annuelle (moins de 1%). Dans ce cas, la rente est logiquement bien moins importante. À ce jour, le régime réservé est l'option majoritairement choisie par les clients. Une information importante pour nos conclusions.

La méthodologie d'un tel comparatif est complexe

Peut-on réellement comparer un contrat multi-subventionné (avantages fiscaux, abondement de l'Etat, etc.) avec une assurance vie ? Voici un exercice périlleux ! L'objectif est de mettre en concurrence ce contrat aux aides multiples face à une épargne vivant un cycle « classique ».

Pour ce faire, la rédaction a dû opérer des choix méthodologiques, en s'appuyant sur l'aide d'actuaires : personne de 35 ans à la souscription, retraits progressifs et non rente à la retraite pour l'assurance vie, rendement moyen estimé légèrement en-dessous de la moyenne des 20 dernières années pour ne pas fausser les résultats...

Pour connaître les détails de ce comparatif, retrouvez les chiffres détaillés et notre méthodologie dans l'article en lien ci-dessous.

EN DÉTAIL. Retraite mutualiste du combattant : le match chiffré face à une assurance vie sans frais d'entrée

En exclusivité, Moneyvox dévoile les résultats de ce comparatif inédit. Ceci se base sur les calculs fournis par la France Mutualiste, que nous espérons exacts ! Voici la comparaison des gains, selon 3 hypothèses différentes.

Hypothèse n°1. Vous épargnez 1 000 euros par an pendant 28 ans... avant une rente de 24 ans

Verdict de l'hypothèse n°1 : la RMC gagnante seulement si vous renoncez à transmettre votre épargne.

En régime « aliéné », 1 000 euros épargnés par an sur le contrat RMC permettent une économie fiscale de 8 400 euros et une rente moyenne annuelle de 1 998 euros (47 950 euros sur 24 ans), soit 56 530 euros économies fiscales incluses, en 24 ans, sans capital transmissible. En régime « réservé », avec transmission de capital, la rente serait de 367 euros par an, pour un capital transmissible de 27 547 euros. Ce qui fait un total de 44 751 euros, économies fiscales incluses.

En comparaison, les gains de l'assurance vie, si l'on se base sur 2 000 euros de rachats partiels annuels pendant 24 ans de retraite, varient selon le rendement. A 2%, la rente épuise le capital au bout de 22 ans, pour un total reversé de 46 751 euros. Dans le meilleur des cas (2,5% nets) les 48 000 euros de retraits progressifs maintiennent un capital transmissible de 7 852 euros.

Si l'on fait le comparatif, quel que soit le rendement, l'assurance vie fait largement mieux que le régime réservé de la RMC. Avec pourtant un retrait de capital annuel six fois plus important !

Face au régime aliéné, à « rente » comparable, seul le contrat à 2,5% fait jeu égal. La RMC gagne, dans cette hypothèse là. Mais à quel prix ? Avec l'option « régime aliéné », la RMC n'est pas transmissible en cas de décès. Alors que, tout au long du contrat, l'assurance vie permet la transmission d'un capital, certes en décroissance au fil des rachats annuels. La RMC ne domine donc que si l'assuré dépasse les 22 ans de retraite.

Les résultats pour l'hypothèse n°1. Capital épargné avant la retraite : 28 000 €
À la retraite, vous touchez...Capital + gains
à 87 ans
(économies fiscales incluses)
Contrat Retraite mutualiste du combattant (RMC)
« Régime réservé »367 € par an,
en rente
(jusqu'au décès)
44 752 €
« Régime aliéné »1 998 € par an,
en rente
(jusqu'au décès)
56 350 €
Contrat d'assurance vie classique, sans frais sur versement
S'il vous rapporte 2% par an2 000 € par an,
en retrait partiel
jusqu'à 86 ans
46 751 €
S'il vous rapporte 2,5% par an2 000 € par an,
en retrait partiel
(restent 7 852 € aux 87 ans)
55 852 €

Pour la méthodologie et le détail des calculs : « Retraite mutualiste du combattant : le match chiffré face à une assurance vie sans frais d'entrée »

Hypothèse n°2. Vous épargnez 2 432 euros par an pendant 28 ans... avant une rente de 24 ans

Verdict de l'hypothèse n°2 : le « faible » gain du renoncement à la transmission du capital.

Dans cette simulation, nous n'avions que les chiffres du régime aliéné, mais la comparaison reste intéressante. Pour obtenir une rente annuelle de 4 941 euros, il faut épargner 2 432 euros par an pendant 28 ans. Au total, au bout de 24 ans de retraite, l'épargnant militaire aura accumulé 139 018 euros, bonus fiscal inclus. Ce total est supérieur à l'assurance vie, même celle livrant 2,5%.

L'écart, inférieur à 5 000 euros, justifie-t-il pourtant le risque d'un capital intransmissible ? À noter : en régime réservé, les rentes de la RMC sont beaucoup moins importantes. Le résultat serait forcément en deçà de l'assurance vie.

Les résultats pour l'hypothèse n°2. Capital épargné avant la retraite : 68 096 €
À la retraite, vous touchez...Capital + gains
à 87 ans
(économies fiscales incluses)
Contrat Retraite mutualiste du combattant (RMC)
« Régime aliéné »4 941 € par an,
en rente (jusqu'au décès)
139 018 €
Contrat d'assurance vie classique, sans frais sur versement
S'il vous rapporte 2% par an4 941 € par an,
en retrait partiel
jusqu'à 85 ans et 11 mois
113 212 €
S'il vous rapporte 2,5% par an4 941 € par an,
en retrait partiel
(restent 15 887 € aux 87 ans)
134 471 €

Pour la méthodologie et le détail des calculs : « Retraite mutualiste du combattant : le match chiffré face à une assurance vie sans frais d'entrée »

Hypothèse n°3. Vous épargnez 10 010 euros par an pendant 28 ans... avant une rente de 24 ans

Verdict de l'hypothèse n°3 : en choisissant le capital transmissible... un match remporté à plate couture par l'assurance vie

Pour ce profil, nous n'avions que les chiffres de l'option réservée avec capital transmissible. Comme pour les autres exemples, cette option est totalement dépassée par l'assurance vie. Ceci, y compris celle avec un rendement de 2% ! L'écart avec la RMC varie de 130 000 à 200 000 euros selon nos exemples, ce qui n'est pas neutre.

Les résultats pour l'hypothèse n°3. Capital épargné avant la retraite : 280 280 €
À la retraite, vous touchez...Capital + gains
à 87 ans
(économies fiscales incluses)
Contrat Retraite mutualiste du combattant (RMC)
« Régime réservé »3 825 € par an,
en rente
451 631 €
Contrat d'assurance vie classique, sans frais sur versement
S'il vous rapporte 2% par an3 825 € par an,
en retrait partiel
581 581 €
S'il vous rapporte 2,5% par an3 825 € par an,
en retrait partiel
649 213 €

Pour la méthodologie et le détail des calculs : « Retraite mutualiste du combattant : le match chiffré face à une assurance vie sans frais d'entrée »

Ce qu'il faut retenir du match assurance vie VS contrat RMC

L'exercice a été complexe, et très technique. MoneyVox s'est efforcé de rendre cela clair. Si nos calculs - réalisés à l'aide d'actuaires - sont exacts, le contrat RMC ne semble pas si avantageux...

Au contraire : quelle que soit l'hypothèse retenue, l'option réservée (capital transmissible en cas de décès) est systématiquement moins intéressante qu'une assurance vie livrant du 2%. Un rendement (net de frais et de prélèvements sociaux) qui devrait être facilement dépassé à l'avenir au vu des tendances actuelles.

Cette sous-performance est tout sauf anodine : l'option réservée est privilégiée massivement par les militaires lors de leur souscription, soucieux de préserver un capital pour leurs proches.

Au vu de notre comparatif, privilégier une assurance vie classique à la RMC en version « réservée » semble bien plus intéressant. Y compris en restant chez l'organisme distributeur (1) du contrat RMC !

En cas de choix pour l'option aliénée, le résultat de la RMC est supérieur, mais l'écart n'est pas si important avec une assurance-vie à 2,5%. Tout en sachant que ces 2,5% sont en dessous des moyennes historiques des fonds euros...

Malgré tout, l'option aliénée reste plus rémunératrice, à une seule condition : vivre longtemps ! Si c'est le cas, on peut tirer un réel bénéfice de ce contrat. À l'inverse, une mort prématurée à la retraite constituerait un fort manque à gagner, puisqu'il faut déjà près d'une décennie pour que la somme des rentes soit équivalente aux sommes épargnées. Une prime de risque qui interpelle forcément, face aux fonds euros transmissibles et leurs capitaux garantis.

MoneyVox ne cherche aucunement à prendre parti, et un militaire dépassant l'âge de 90 ans sera nettement avantagé par le contrat RMC. Mais nos calculs montrent néanmoins quelque chose : alors que ce contrat valorise ceux qui risquent leur vie pour la Nation, les avantages semblent bien maigres face à une assurance vie classique... et ce malgré l'ensemble des bonus, abondements et avantages fiscaux !

Rappelez-vous... Un régime à part, qui dispose de ses propres lignes dans le Code de la Mutualité. Un contrat accessible uniquement aux anciens combattants, victimes de guerre ou leur famille. Une assurance vie aux avantages multiples : déduction fiscale, rente majorée par l'Etat, etc.

Malgré ces multiples avantages, le si spécifique contrat RMC ne parvient pas à écraser la concurrence d'une assurance vie classique. Par conséquent, une question reste en suspens : inventé il y a un siècle, le modèle RMC ne mériterait-il pas d'être revu ?

Assurance vie : les drôles d'avantages d'un contrat censé bonifier la retraite des militaires

(1) La Retraite mutualiste du combattant est un contrat d'assurance vie en rente viagère distribué par de multiples mutuelles : La France Mutualiste, Carac, Mutuelle Épargne Retraite, CNM santé, AGPM, La Financière Militaire... Attention toutefois aux frais sur versement. Les simulations ci-dessus ont été réalisées à partir d'une assurance vie sans frais d'entrée.