Après des années de baisse, les fonds euros retrouvent des couleurs. Si la moyenne des rendements 2022 approche des 2%, quelques-uns ont atteint ou dépassé les 2,5%. Moneyvox vous dévoile les secrets des cinq fonds qui ont le mieux performé.

Le fonds euros n'est pas mort ! 2022 marque un virage historique pour le marché de l'assurance vie. À la faveur d'un contexte économique favorable (remontée de l'inflation et des taux d'intérêt), les rendements sont repartis à la hausse, avec une moyenne proche de 2%. L'amélioration du marché obligataire, composante importante de ces supports d'investissement, y est pour beaucoup. Mais on peut aussi y voir une réaction face à l'évolution du marché, avec notamment un livret A boosté depuis ce début d'année. Dans cette période d'euphorie, quelques fonds euros, notamment mutualistes, ont livré des taux particulièrement élevés, entre 2,5% et 2,8%. Comment expliquer une telle performance ? Entre volonté marketing, gestion efficace et bonnes surprises, Moneyvox vous détaille les recettes des 5 fonds euros (1) les plus rémunérateurs.

Assurance vie : tous les taux 2022, du meilleur au pire

Top 1

  • Actif général Garance (Garance)
  • Rendement 2022 : 2,80% (2,75% en 2021)
  • Frais sur versements : jusqu'à 3%
  • Encours : près de 3,3 milliards d'euros
  • Distribution : réseau Garance

L'Actif général Garance est « classique », avec près de 75% d'obligations. « Mais la spécificité, c'est qu'elles ont taux de rendement actuariel (TRA) supérieur à 4% », précise Xavier Couratier, directeur technique et finance chez Garance. « Depuis une vingtaine d'années, notre filiale Indep'Am a une gestion de bon père de famille, avec une bonne approche actif/passif. On en bénéficie aujourd'hui. » Pour ne pas diluer ce « trésor », la mutuelle a limité les achats d'obligations ces dernières années. « On s'est réorienté sur le non-côté, pour récupérer des revenus plus intéressants. » 8% du fonds est ainsi investi en « infrastructures et immobilier », le reliquat en « actions et fonds d'actions ».

« Nous étions déjà très haut l'an passé, avec 2,75%. On ne pouvait pas distribuer plus ! »

Pourquoi ça performe ?

En un an, le rendement n'a augmenté que de 5 points de base. « Nous étions déjà très haut l'an passé, avec 2,75%. On ne pouvait pas distribuer plus, vu notre taux de rendement brut ! » Avec des obligations à 4%, le gros du travail est fait : elles offrent 60% de la performance brute du fonds (autour de 3,60% l'an passé). « Le reste est obtenu par les rendements infrastructures/immobilier et la réalisation de plus-values latentes sur les actifs actions. » Garance utilise très peu la mise en provisions, inférieure à 0,2% de rendement en stock. « Ce n'est pas notre stratégie d'accumuler des tonnes de provisions. Le taux distribué à nos adhérents est lié au rendement obtenu dans l'année. » Le levier de la poche diversifiée est à peine activé. « Nous restons en plus-value latente, notamment pour les actions. C'est un peu cela, notre provision. »

À quoi s'attendre ensuite ?

Avec une poche obligataire livrant 4%, Garance a de quoi voir venir. « Une bonne partie de notre rendement annuel est assuré sur une dizaine d'années. » Cela devrait s'améliorer : avec un taux proche du livret A, le premier du classement va forcément attirer les capitaux. « On pourra investir sur des obligations à 4, voire 4,5%. Cela permettra de pérenniser notre rendement. » L'objectif de la gestion est la stabilité. « On est entre 2,8% et 3% depuis plusieurs années. On ne souhaite pas que le taux fluctue de manière trop importante. Nous sommes plutôt sereins sur notre capacité à maintenir ce niveau de performance sur les prochaines années. » Garance n'est pas près de quitter les podiums !

Top 2

  • Retraite mutualiste du combattant (La France Mutualiste)
  • Rendement 2022 : 2,61% (2% en 2021)
  • Frais sur versements : 0% pour 2023
  • Encours : plus de 3 milliards d'euros (plus de 100 000 contrats)
  • Distribution : accès spécifique - Réseau La France Mutualiste

Centenaire, Retraite mutualiste du combattant (RMC) est un contrat spécifique investi sur l'actif général de La France Mutualiste. Comme son nom l'indique, il est réservé à certains militaires (carte du combattant, titre de reconnaissance de la Nation, victime de guerre...) « Il vise à remercier les gens qui ont fait un sacrifice pour la France », résume Simon Le Dily, directeur actif/passif à La France Mutualiste. Une reconnaissance qui se traduit par un bonus de rémunération, des avantages fiscaux et une bonification de l'État. Historiquement, le fonds est diversifié : à côté des obligations, il compte près de 20% d'immobilier (notamment résidentiel) et plus de 15% d'actions. « La poche immobilière est importante, car ce sont des achats anciens : nous sommes à près de 100% de plus-values latentes ! » Le portefeuille action est mixte, entre anciens titres en plus-value et investissements plus récents. Ces dernières années, les provisions ont été dotées, pour atteindre 3,2% de réserve.

« La poche immobilière est importante, car ce sont des achats anciens : nous sommes à près de 100% de plus-values latentes ! »

Pourquoi ça performe ?

Le gain de 61 points de base traduit une volonté de la mutuelle. « Dans ce contexte d'inflation qui remonte, ayant un impact sur le pouvoir d'achat, nous avons souhaité avoir un taux de rendement assez agressif sur ce contrat. » Une partie significative du rendement est portée par une diversification efficace, forte de richesses latentes. « Cela permet de livrer un taux important sans mettre en péril notre fonds en euros. » La France Mutualiste a même pu renforcer ses provisions, « sans avoir besoin de piocher dans les réserves ou de réaliser des plus-values plus que de raison ».

À quoi s'attendre en 2023 ?

Provisions importantes, plus-values latentes, retour des obligations généreuses... Tout est réuni pour que RMC continue de performer. « Nous sommes relativement confiants sur nos capacités à rester compétitifs sur le marché », glisse Simon Le Dily. « On a une bonne gestion des risques, un actif diversifié, un ratio de solvabilité très bon. On a préservé notre capacité à continuer cette politique dans les années qui s'annoncent. » L'objectif n'étant pas de faire un « coup » sur un an, vu la conjoncture, il n'y a pas de raison d'imaginer une baisse en 2023. « Si les obligations continuent de monter, il est raisonnable de penser que le rendement global du fonds en euros montera à nouveau. »

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Top 3 ex aequo

  • Actif général (Carac)
  • Rendement 2022 : 2,50% (1,40% en 2021)
  • Frais sur versements : 0% jusqu'au 30 juin 2023 (hors promo, jusqu'à 3,50%)
  • Encours : Près de 11 milliards d'euros
  • Distribution : réseau Carac

Le fonds euros de la Carac dispose de près de 40% d'obligations publiques et 40% d'obligations privées « de note moyenne A ». À côté, la poche « dynamique » se compose d'actions cotées (8% du fonds), d'immobilier (7%) et d'actifs monétaires et non cotés. Dans la période récente, la mutuelle a doté fortement ses provisions (6% de rendement en stock) et conservé une part de la collecte en monétaire, prête à être investie dès que les conditions s'amélioraient. De quoi protéger « une base de rendement obligataire qui tire le portefeuille vers le haut », selon Fabrice Hammouche, directeur des investissements de la Carac.

« Nous avons fait le choix de servir un taux qui nous positionne dans le haut du classement »

Pourquoi ça performe ?

Pour passer de 1,4% à 2,5%, la Carac s'est montrée « moins prudente » dans ses investissements. L'an passé, la collecte et le stock monétaire ont ainsi été investis dans des obligations plus généreuses, afin d'augmenter le TRA (le rendement moyen des obligations) au-delà des 3%. En plus, la mutuelle a réalisé des plus-values sur son portefeuille d'actions cotées et non cotées, ainsi qu'une plus-value sur une cession immobilière. Mais si le taux augmente autant, c'est que la mise en provisions a été revue à la baisse. « Nous avons fait le choix de servir un taux qui nous positionne dans le haut du classement, souligne Myriam Souveton, directrice marketing. Après une approche très prudente lors de la période de taux bas, nous voulions récompenser nos adhérents. » Et offrir une performance « symboliquement proche des livrets règlementés ».

À quoi s'attendre en 2023 ?

Objectif collecte ! En proposant un taux minimum garanti de 3% pour les versements jusqu'au 30 juin, sans frais de versement, la Carac veut séduire les investisseurs. Si le contexte reste le même, Fabrice Hammouche ne cache en effet pas son « optimisme ». « On peut s'attendre à une belle année. Dans cet environnement, on est confiant dans notre capacité à obtenir un bon rendement de notre actif général. Au-delà de ce socle solide, nous avons des richesses latentes importantes sur nos portefeuilles action et immobilier. » Sans oublier d'énormes provisions. De quoi anticiper un taux proche de 3% en fin d'année ?

Top 3 ex aequo

  • Fonds en euros RES (MACSF)
  • Rendement 2022 : 2,50% (2,10% en 2021)
  • Frais sur versements : 0% jusqu'au 5 mars 2023 (jusqu'à 3% hors promo)
  • Encours : Près de 23 milliards d'euros (400 000 contrats)
  • Distribution : réseau MACSF

« 85% de notre fonds participe au financement des entreprises », annonce Guillaume Rosenwald, directeur général de MACSF Epargne Retraite. L'immense majorité de la poche obligataire, qui représente 2/3 du fonds RES, est historiquement positionnée sur des obligations privées. À côté, il intègre aussi 7% d'immobilier et près de 20% d'actions, d'OPCVM et de non-côté. Le non-côté concerne le monde de la santé, mais aussi d'autres univers : une des dernières plus-values concernait par exemple un château bordelais. Dans la période de taux bas, la MACSF a investi dans des obligations de courtes durées. « En plus, nous avons eu de la chance : beaucoup d'entre elles arrivent à échéance. Nous avons donc l'opportunité de réinvestir dans des obligations plus rémunératrices. »

Pourquoi ça performe ?

Le fonctionnement est très classique : les obligations apportent un rendement de base « de bon niveau », et un bonus de performance est obtenu grâce à des plus-values sur l'immobilier ou les actions. « Ces deux dernières années, nous avons fait des plus-values importantes sur le non-côté. À tel point que l'on n'a pas tout distribué, et qu'on a pu légèrement doter nos provisions. » 2,50%, c'est donc un taux « raisonnable ». « Nous ne cherchons pas à faire des coups, mais à offrir une régularité de rémunération. Si on n'avait pas réalisé autant de plus-values, on aurait sans doute pris sur notre PPB [provision pour participation aux bénéfices, NDLR], qui est confortable. » Le fonds dispose en effet de plus de 4% de rendement en stock.

« On utilisera notre PPB. Cet argent appartient aux épargnants »

À quoi s'attendre ensuite ?

Vu la conjoncture, le taux annuel devrait tendre vers les 3%. « On fait tout pour », sourit Guillaume Rosenwald. « Nous avons une bonne confiance dans le fait que l'on puisse continuer à augmenter progressivement notre rendement. D'autant plus que l'on utilisera notre PPB. Cet argent appartient aux épargnants. » Les investisseurs peuvent donc s'attendre à quelques bonnes années, sauf événement majeur. « Avec l'augmentation des taux obligataires, il est important d'avoir une bonne collecte. On l'encourage avec une promotion à 0% de frais sur versement. C'est dans l'intérêt de tous : cela nous permet d'acheter des obligations à taux élevé et d'en faire profiter nos adhérents dans les années à venir. Et en parallèle, continuer à réinvestir dans le non-côté. »

Top 3 ex aequo

  • Sécurité Infra Euro (Oradea Vie, Sogecap)
  • Rendement 2022 : 2,50% (2,10% en 2021)
  • Frais sur versements : jusqu'à 4%
  • Encours : près de 700 millions d'euros
  • Distribution : CGPI et banque privée SG

Lancé en juillet 2020, Sécurité Infra Euro (SIE) propose de s'exposer au profil de rendements/risques des infrastructures. Un choix qui n'est pas un hasard : « C'est le profil alternatif qui, par son fonctionnement, ressemble le plus aux obligations, avec des flux prévisionnels connus à l'avance, indique Laurent Doubrovine, directeur développement partenariats chez Société Générale Assurances. Quand il est bien sélectionné, avec les bonnes signatures et les bons projets, le risque est assez bien maîtrisé. » Au 30 juin 2022, la poche « Infra » représentait 56,3% du fonds, dont 24% dans les télécommunications (fibre, tours de téléphone portable...), 20% dans les transports (parking Indigo et Qpark...) et un peu moins de 10% dans les services (distribution d'eau, d'électricité et de chaleur). Les 43,7% restants sont investis dans des obligations de « note moyenne A ».

Pourquoi ça performe ?

Si SIE a livré 2,5% en 2022, en hausse de 40 points de base, c'est qu'il a « bien résisté aux fluctuations conjoncturelles », indique Laurent Doubrovine. « Dans la mesure où il est en collecte nette positive, il a pu suivre la remontée des taux sur le compartiment obligataire. Et la poche infrastructures est bien immunisée contre un certain nombre d'aléas. Certains revenus, par exemple pour les projets d'autoroute, sont indexés sur l'inflation. » L'objectif de gestion est d'obtenir « une performance plutôt stable, moins volatile que celle d'un fonds euros classique. » Mais l'assureur ne fait pas de promesse : dans ses communications, il avertit que le rendement « pourrait être inférieur ».

« Si la collecte devait ralentir, le fonds est bien équipé pour résister »

À quoi s'attendre en 2023 ?

Le fonds est paré à toutes les éventualités. « Si la collecte devait ralentir, le fonds est bien équipé pour résister. » À l'inverse, en cas d'afflux de capitaux, « le fonds bénéficiera de conditions de marchés favorables. D'une part, on peut aller capter des taux plutôt sympathiques en ce moment pour la poche obligataire. Et en matière d'infrastructures, il y a de gros besoins d'investissements. » On peut donc imaginer un rendement proche du taux 2022. « On peut avoir de bons espoirs au vu de la conjoncture... »

Assurance vie : ces entourloupes qui cachent des taux pas toujours si généreux

(1) Sollicitée, la Matmut n'a pas souhaité commenter la performance de son ancien contrat Vie Epargne (2,5% en 2022), car il n'est plus commercialisé.