Il faut profiter du scandale « LuxLeaks » pour « obliger » rapidement les gouvernements européens à harmoniser enfin leurs politiques fiscales vis-à-vis des entreprises, a plaidé mardi l'eurodéputé français Alain Lamassoure, à la tête d'une commission parlementaire chargée de faire la lumière sur ces pratiques fiscales décriées.

« Ca fait 20 ans que nous nous sommes engagés dans un processus de rapprochement des bases de l'impôt sur les sociétés, or cette démarche n'a toujours pas abouti », a souligné l'ancien ministre français du Budget, qui a présidé lundi la première réunion de cette commission composée de 45 eurodéputés.

« Le moment est venu, grâce à LuxLeaks, de sortir ce dossier de l'hibernation, pour forcer les ministres des Finances à avancer, sur un dossier où ils étaient trop heureux de faire du surplace », a ajouté Alain Lamassoure, qui s'exprimait lors d'une conférence de presse à Strasbourg.

« Une chance raisonnable » d'évoquer le sujet au Conseil

« On peut avoir une chance raisonnable pour que d'ici la fin du semestre un Conseil européen évoque le sujet », a-t-il encore dit. Mais il faudrait pour cela que les chefs d'Etat et de gouvernement forcent la main de leurs ministres des Finances, a-t-il ironisé.

Le mois dernier, le Parlement européen avait décidé de créer une commission spéciale chargée de mettre au jour les pratiques fiscales décriées de certains Etats membres, comme celles révélées dans le cadre de la retentissante affaire LuxLeaks, sur le système des rescrits fiscaux (ou « tax rulings ») proposées aux multinationales par le Luxembourg, et qui leur permettent d'optimiser l'impôt.

Cette commission, lancée pour une durée initiale de six mois, devra formuler des recommandations pour contrer ces méthodes. « Si nous ratons cette occasion, j'ai peur que nous perdions encore une dizaine d'années », a souligné Alain Lamassoure, pour qui la concurrence fiscale entre Etats européens n'est pas un problème en soi, « mais seulement si elle est transparente et loyale ».

« Nous ne sommes pas des justiciers, mais des législateurs »

« Nous ne sommes pas des justiciers, mais des législateurs. Notre rôle n'est pas de blâmer tel ou tel », a observé l'élu, soulignant que les pouvoirs du Parlement européen en la matière étaient de toutes façons très limités puisque la fiscalité relève exclusivement des Etats.

Sur ce dossier, les députés travaillent en parallèle avec la Commission européenne, présidée par l'ancien Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, et qui selon Alain Lamassoure a été « piquée au vif » par le scandale Luxleaks. La Commission enquête depuis juin 2013 sur les pratiques de rescrits fiscaux dans plusieurs pays européens, qui favorisent l'évasion fiscale des entreprises.

En décembre 2014, après les révélations concernant le Luxembourg, elle a élargi sa collecte de renseignements à tous les Etats de l'Union européenne. Et le 18 mars, elle devrait présenter un texte prévoyant l'échange automatique d'informations entre pays sur les rulings.