Le gouvernement risque de baisser le taux de rémunération du Livret A à un plus bas historique en février. Le député LREM Jacques Savatier explique en quoi cette décision serait très risquée.

Jacques Savatier, député LREM

Jacques Savatier est député LREM de la 1ère circonscription de la Vienne.

C'est une mauvaise nouvelle qui se profile pour 55 millions d'épargnants. En toute logique, l'application de la nouvelle formule de calcul du taux du Livret A, au 1er février, devrait entraîner une baisse de sa rémunération passant de 0,75%, depuis deux ans, à 0,5%, du jamais vu, ainsi que pour « son cousin » le Livret de développement durable et solidaire (LDDS). Une position déjà défendue cet automne par le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire. Mais cette position est loin de faire l'unanimité au sein de la majorité. Membre de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), le bras armé financier de l'Etat qui centralise 60% de l'argent du Livret A, Jacques Savatier s'y oppose.

Pourquoi militez-vous contre la baisse du taux du Livret A au 1er février ?

Baisser le taux du taux livret A dans le contexte social actuel, c'est risqué

Jacques Savatier : « La décision relève du ministre de l’Economie. À chacun ses responsabilités. Mais comme parlementaire, je ne veux pas me résigner à ce que la seule solution soit la baisse du taux du livret A au 1er février en raison de l’application de la nouvelle formule de calcul. L’argent placé sur le Livret A est une épargne de précaution, en cas de coup dur, sans intention spéculative. C’est l’esprit du Livret A depuis deux siècles qui assure la liquidité et la sécurité d’une petite partie – 10% – de l’épargne des Français tout en la protégeant le plus possible de l’inflation. Regardez le succès de ce support où les Français ont encore placé 14 milliards d’euros supplémentaires depuis le début de l’année. Ils font confiance au Livret A et à la garantie de l’Etat. Baisser le taux du taux livret A dans le contexte social actuel, c’est prendre le risque de détruire un peu plus cette confiance avec les citoyens. Est-ce nécessaire d’en rajouter ? Le risque est de revivre la même situation qu’avec la baisse de 5 euros des aides personnelles au logement (APL). C’est une réponse qui a été très mal perçue par la population. Il faut manier cette question avec beaucoup d’attention. »

Mais selon le patron de la CDC, la baisse à 0,5% ne coûterait environ qu’un euro par mois aux épargnants, en moyenne, tout en allégeant les « charges financières pour le logement social de 317 millions d'euros en année pleine » ?

J.S. : « Bien sûr, on peut penser que ça ne représente pas grand-chose. Mais les gens vont se dire que c’est encore un truc qu’on leur enlève. N’oubliez pas que sur les 400 milliards d’euros placés sur le Livret A et le LDDS, une baisse d’un quart de point, c’est un milliard d’euros de pouvoir d’achat en moins. Quant au logement social, il doit pouvoir continuer à bénéficier de prêts à un taux le plus bas possible, mais rappelez-vous que seulement un peu plus de la moitié de l’argent placé sur le Livret A sert à financer la construction ou la réhabilitation du parc social. »

Lire aussi : Où va l'argent du Livret A ?

Que proposez-vous alors ?

Trouvons des solutions pour protéger cette épargne populaire

J.S. : « Il faut trouver un équilibre dans un contexte de baisse durable des taux d’intérêt. Trouvons des solutions pour protéger cette épargne populaire. Pourquoi ne pas utiliser une partie des liquidités disponibles pour financer la transition énergétique, par exemple, ou pour investir et entretenir des grands projets d’infrastructures publics qui nécessitent des financements sur le long terme ? Miser sur le logement social avait pour but de répondre à la grande transition démographique. Nous pouvons en parallèle répondre aussi à d’autres grands enjeux du moment avec l’argent du Livret A. Cela permettrait de garantir une rémunération aux épargnants au moins au niveau de l’inflation. Regardez les autoroutes. Leur privatisation permet aux actionnaires de s’offrir des rémunérations 20 fois supérieures à celle du Livret A. Idem pour les partenariats public-privé : on aurait pu mobiliser l’argent des Français à la place. Toutes ces pistes, nous allons pouvoir en discuter dans le cadre d’une mission d’information à laquelle je vais participer dès la reprise des travaux parlementaires afin de proposer des solutions pour transformer l’épargne réglementée ».