Une nouvelle réforme vise à permettre de changer d'assurance de prêt à tout moment. Le gouvernement est favorable à cette mesure censée faire économiser des milliers d'euros à chaque emprunteur. Sauf que les banques n'entendent pas se laisser faire. Explications.

Des dizaines d'euros d'économies par mois, soit au final des milliers d'euros d'économies sur le coût total d'un crédit immobilier, et ce en changeant d'assurance emprunteur à tout moment : c'est l'ambition de la proposition de loi examinée jeudi à l'Assemblée nationale. Présentée par la députée Agri Patricia Lemoine, elle a toutes les chances d'être adoptée dans la mesure où elle a obtenu le feu vert du gouvernement. Redistribuer du pouvoir d'achat aux consommateurs sans que cela ne coûte un centime d'argent public, l'exécutif ne peut qu'être favorable. Mais rien n'est encore joué. « La partie n'est pas gagnée d'avance car nous devons faire face au lobbying très actif de la Fédération bancaire française qui s'oppose à cette évolution et pousse certains parlementaires de la majorité à voter contre », explique Patricia Lemoine dans un entretien accordé à MoneyVox.

Il faut dire qu'elles ont tout intérêt à s'accrocher au système actuel. Les multiples évolutions, depuis 10 ans, n'ont pas permis de libéraliser le secteur de l'assurance emprunteur qui représente 7 milliards d'euros de chiffres d'affaires par an pour 7 millions de foyers assurés. Les banques détiennent aujourd'hui près de 90% du marché. « Résultat, les consommateurs payent le prix de cette absence de réelle concurrence qui leur permettrait d'effectuer des économies substantielles avec des offres alternatives », explique Patricia Lemoine.

Interview de Patricia Lemoine : « la réforme de l'assurance emprunteur va rendre du pouvoir d'achat »

« Une idée de bobos parisiens »

« La concurrence à tout prix, c'est une idée de bobos parisiens qui n'ont aucun sens de la solidarité ! Ces dispositions bénéficieront essentiellement aux courtiers, qui démarcheront les assurés les moins à risque, autrement dit, les trentenaires, et laisseront dans le portefeuille des banques des assurés plus âgés. A la fin, il faudra augmenter leurs primes. C'est injuste », lâche le dirigeant d'une grande banque interrogée par Le Canard Enchaîné.

« C'est une proposition d'américanisation, de Far West de l'assurance qui, à terme, prive les moins favorisés d'un accès à la propriété. Et je le dis avec des termes simples et modérés », abonde Nicolas Théry, président du Crédit Mutuel Alliance fédérale. « Je ne pense pas grand bien de la proposition de loi sur la résiliation infra-annuelle [de l'assurance emprunteur] », ajoute le directeur général du même groupe, Daniel Baal. Le duo de patrons du Crédit Mutuel et du CIC s'exprimait juste après l'annonce le 10 novembre de la suppression du recours au questionnaire de santé pour les clients fidèles.

Supprimer le questionnaire de santé ? « Un coup de com' »

« Il s'agit là encore d'un coup de communication pour tenter de ralentir la mise en place de la résiliation infra-annuelle de l'assurance emprunteur », dénonce le courtier Sécurimut dénonçant au passage « les pratiques de rétention de l'assurance emprunteur du Crédit Mutuel » qui seraient parmi « les plus agressives ». « Le Crédit Mutuel / CIC présente un taux d'externalisation de l'assurance emprunteur sans doute parmi les plus faibles du marché », lâche Sécutimut. D'après lui, moins de 5% des clients ayant un crédit immobilier auraient ainsi une assurance de prêt extérieure à celle de la banque.

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