La part de la population possédant un Livret A a diminué depuis 2015, selon la dernière étude « patrimoine » de l’Insee, qui note une moindre détention de la part des « jeunes » ménages. Le Livret A reste tout de même le produit le plus répandu, et de loin !

En 2018, 83,4% des ménages français déclarent posséder au moins un livret d’épargne réglementée, selon la dernière enquête de l’Insee. Hors compte-chèques, le livret défiscalisé est de loin le type de produit financier le plus répandu en France, devant l’assurance vie (39%), l’épargne logement (33%), ou les produits boursiers et autres valeurs mobilières (16%). Mais après avoir grimpé jusqu’en 2015, à 85,6%, le taux de détention des livrets réglementés retombe pour la première fois en 20 ans, l’historique de cette étude remontant jusqu’en 1998.

Au sein de la famille des livrets défiscalisés, le Livret A est sans surprise le produit le plus largement répandu dans les ménages français : 73,2% déclarent qu’au moins un membre du foyer en possède un, contre 35% pour le LDDS, 18,7% pour le Livret d’épargne populaire (LEP) et 12,6% pour le Livret jeune. En revanche, le taux de détention de tous ces livrets apparaît sur la pente descendante ! L’exemple le plus flagrant de la baisse est celui du Livret A : en 2015, 75,8% des ménages déclaraient en posséder un. Son pic de détention, à comparer avec 68,3% en 2010. La hausse du début des années 2010 était logique : elle faisait suite à l’ouverture à l’ensemble des banques de la distribution du Livret A.

La conséquence de la faiblesse du taux de rémunération

« Ce recul concerne tous les livrets défiscalisés, mais surtout les Livrets A (ou Bleu) et les LDDS », confirme l’Insee en commentaire. L’institut explique « notamment » cette baisse de détention par la plus faible attractivité du produit : « Après avoir atteint 2,25 % entre août 2011 et février 2013, le taux d’intérêt du Livret A n’a cessé de diminuer, s’établissant à 0,75% depuis août 2015 et ne devant pas évoluer avant 2020. Les taux de rendement réels des livrets défiscalisés sont même devenus négatifs depuis 2017 du fait de la reprise de l’inflation. » Selon les données provisoires, la hausse des prix de la consommation était de 1,9% sur un an à la fin novembre.

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Moins de doublons et de livrets inactifs

L’Insee pointe d’autres éléments d’explication, parmi lesquels « deux évolutions législatives » : « L’existence depuis 2013 de nouveaux outils de contrôle limitant la multidétention de livrets A, et la mise en application en 2016 de la loi relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence. » Dans le cadre de ce texte surnommé loi Eckert, la Caisse des dépôts a annoncé le transfert de 4,63 millions de Livrets A oubliés dans ses caisses en 2016, puis de 565 000 transferts d’avoirs oubliés en 2017.

Cependant, au-delà de ces explications conjoncturelles et législatives, l’Insee relève aussi un moindre engouement des jeunes ménages pour le Livret A. « En France, 78,5% des ménages dont la personne de référence a moins de 40 ans possèdent [un Livret A] début 2018, soit 3,6 points de moins qu’en 2015. » Bref, l'ouverture d'un Livret A n'est plus aussi systématique que dans le passé.

Insee et banques : des statistiques différentes sur le Livret A

L’observatoire de l’épargne réglementée (OER), lié à la Banque de France, annonce chaque année un taux de détention plus élevé pour le Livret A : l’OER estime ainsi fin 2017 à 82,1% son taux de détention dans la population française. Comme expliquer une telle différence avec l’Insee, qui l’estime à 73,2% ? Les statistiques établies par les banques « ne donnent ni d’information sur le nombre ni sur les caractéristiques sociodémographiques des détenteurs », juge l’Insee, qui reconnaît en revanche leur exhaustivité.

En se basant sur des enquêtes larges mais déclaratives, l'institut estime ainsi que son taux de détention de 73,2% est probablement sous-estimé : « L’explication de l’écart réside dans le grand nombre de Livrets A avec des montants inférieurs à 150 euros (un sur quatre environ), que les ménages tendent à oublier : les ménages interrogés ne mentionneraient que les livrets qu’ils jugent économiquement significatifs. » L’Insee rappelle que le taux de détention annoncé par l’OER a été revu à la baisse depuis l’entrée en vigueur de la loi Eckert, et que la vérité se situe donc entre ses 73% et les 82% de l’OER.