Voilà un peu plus de 10 ans que toutes les banques ont obtenu le droit de proposer le Livret A à leurs clients, un privilège autrefois réservé à la Caisse d’Epargne, à la Banque Postale et au Crédit Mutuel. Qu’y gagnent-elles ? C’est la question posée par un lecteur de MoneyVox.

Question de Gabriel, le 3 février 2020

« Combien les banques gagnent-elles avec les dépôts effectués sur les Livrets A ? »

2,13 milliards d'euros : c'est le montant des intérêts versés fin 2019 aux 55 millions de détenteurs de Livrets A. Malgré une rémunération au plus bas (0,75% avant le 1er février 2020, 0,50% depuis), le produit d'épargne réglementée rapporte toujours un peu d'argent aux Français.

Qu’en est-il des banques ? Quel profit tirent-elles à distribuer le Livret A et le Livret de développement durable et solidaire (LDDS), ces livrets dont elles ne peuvent pas fixer le taux, imposé par l’Etat ? C’est la question posée par Gabriel, un lecteur de MoneyVox.

Une commission de 0,3%

Pour tenter d’y répondre, nous sommes allés fouiller dans le dernier rapport annuel du Fonds d’épargne, qui couvre l’année 2018. Pourquoi ? Parce que c’est à ce fonds, géré par le bras financier de l’Etat, la Caisse des dépôts et consignations (CDC), que les banques confient une partie de l’argent placé par leurs clients sur les Livrets A. Sa mission est ensuite de transformer ces dépôts en prêts à très long terme, jusqu’à 60 ans, destinés à financer des secteurs désignés comme prioritaires par l’Etat : la construction et la rénovation de logements sociaux, la politique de la ville, les investissements de long terme des collectivités locales…

Lire sur le sujet : Où va l'argent du Livret A ?

La part des dépôts totaux confiés par les banques au Fonds d’épargne est ainsi désignée sous le terme de « taux de centralisation ». En moyenne, celui-ci était, fin 2018, de 59,5% pour le Livret A et le LDDS, et de 50% pour le Livret d'épargne populaire (LEP). En résumé, sur 10 euros placés sur un Livret A, 6 sont confiés au Fonds d’épargne, et 4 sont conservés par l’établissement collecteur. Au total, le montant de l’épargne centralisée a ainsi atteint 253 milliards d’euros fin 2018, selon le rapport annuel du Fonds d’épargne, sur les 435 milliards d'euros placés par les Français sur les Livrets A, LDDS et LEP.

En échange de la collecte et de la centralisation des dépôts de leurs clients, les banques touchent bien une rémunération. Celle-ci prend la forme d’une commission proportionnelle aux montants centralisés vers le Fonds d’épargne. Elle est actuellement de 0,3% pour le Livret A et le LDDS, et de 0,4% pour le LEP. Selon la CDC, le montant total de commissions versées en 2018 a ainsi atteint 1,095 milliard d’euros. Une somme que se sont partagées les banques en fonction des sommes centralisées par chacune. En plus de ces commissions versées aux banques, la Caisse des dépôts prend également en charge la rémunération destinée aux épargnants (0,50% actuellement).

Des dépôts qui coûtent chers

Le Livret A, toutefois, représente aussi un coût pour les banques. Elles doivent en effet rémunérer les 40% des dépôts qu’elles conservent à leur bilan - soit 182 milliards d’euros fin 2018 - à un taux qu’elles ne choisissent pas, puisqu’il est fixé par l’Etat, et qui est bien supérieur aux rendements pratiqués sur leurs propres livrets : 0,50% côté Livret A ; 0,16% en moyenne côté livrets ordinaires, selon la Banque de France.

Au final, sont-elles gagnantes ? Difficile à dire, les banques étant plutôt discrètes sur le sujet. Une chose est certaine : la baisse du taux du Livret A, le 1er février dernier, a été une excellente nouvelle pour elles. Car dans le même temps, leur commission de centralisation, elle, n’a pas baissé.

Voir aussi le comparatif d'une sélection de livrets bancaires