La Banque centrale européenne (BCE) a subi une perte de 1,3 milliard d'euros en 2023, continuant à payer une lourde facture pour sa politique de hausse des taux, un retour à l'équilibre n'étant pas attendu avant quelques années.

Cette perte nette est la première enregistrée par l'institution de Francfort depuis 2004, de 1,6 milliard à l'époque, et représente le quatrième recul annuel de suite du résultat, depuis le bénéfice de 2,4 milliards d'euros en 2019, selon un communiqué publié jeudi.

Le résultat de 2023 aurait été négatif de 7,9 milliards d'euros sans l'assèchement de la provision pour risques, à hauteur de 6,6 milliards d'euros, qui a permis d'éponger partiellement cette perte.

Grâce à ce coussin financier, la BCE avait encore pu afficher un solde équilibré en 2022 au lieu d'une perte.

Le retournement, après « près de deux décennies de bénéfices substantiels », « reflète le rôle et la nécessité » de l'action de la BCE et des banques centrales nationales pour lutter contre l'inflation, explique l'institution.

La BCE a augmenté les coûts d'emprunt à un rythme sans précédent depuis juillet 2022, après que la guerre en Ukraine a fait grimper les coûts de l'énergie et des denrées alimentaires. Ses taux sont maintenus inchangés à un nouveau record depuis octobre 2023

Les taux plus élevés ont « entraîné une augmentation des charges d'intérêt » payées aux banques centrales de la zone euro, explique le communiqué. Résultat : une facture de plus de 14 milliards d'euros d'intérêt l'an dernier, contre 2 milliards en 2022.

Dans le même temps, les intérêts perçus sur la masse d'obligations accumulées par la BCE au cours des années de lutte contre la crise n'ont pas suivi. Ces actifs sont assortis de taux d'intérêt fixes et d'échéances longues, et ont été rachetés lorsque les coûts d'emprunt étaient très bas.

Cet effet de ciseau dans les comptes financiers fait que la BCE devrait « subir des pertes au cours des prochaines années », selon son rapport annuel.

Elle s'attend ensuite à « des bénéfices soutenus », sans préciser à partir de quand. Cela dépendra de la vitesse de réduction de son bilan et de la baisse des taux.

La perte de 2023 viendra toutefois « compenser les bénéfices futurs », a décidé le conseil des gouverneurs de la BCE.

La solidité financière de l'institution gardienne de l'euro est assurée, avec des capitaux propres de près de 46 milliards d'euros, incluant d'importantes réserves de réévaluation, selon ce rapport.

La perte essuyée l'an dernier n'aura donc « aucun impact sur (la) capacité à mener une politique monétaire efficace », explique l'institution.

Tout comme la BCE, les banques centrales nationales de la zone euro devraient afficher, pour certaines d'entre elles, de lourdes pertes au titre de 2023.