La Banque de France a annoncé mercredi la mise en réserves de ses 4,4 milliards d'euros de bénéfices avant impôts, afin de « faire face à des années qui vont être moins favorables », selon son gouverneur, du fait du resserrement de la politique monétaire.

C'est une première depuis 2003. La Banque de France ne versera pas cette année, ni dans celles à venir, de dividende à l'Etat. Celui-ci s'était élevé à 569 millions au titre de 2021 et à près de deux milliards au titre de 2020.

L'institution paiera environ un milliard d'euros au titre de l'impôt sur les sociétés. Les 4,4 milliards d'euros sont techniquement une dotation à un « fonds pour risques généraux ». En décomptant cette dotation, le bénéfice net pour 2022 s'élève à zéro, contre 763 millions d'euros en 2021.

Retournement de la politique monétaire

Cette « année de retournement » de la politique monétaire, selon le gouverneur de l'institution François Villeroy de Galhau, qui s'est exprimé en conférence de presse, a commencé à produire ses premiers effets sur l'institution, même si l'ensemble des revenus ont tout de même crû d'environ 10% à près de 7 milliards d'euros.

Sur les résultats, les revenus liés aux relations avec les banques ont nettement diminué, les dépôts ayant rapporté ces dernières années de l'argent du fait des taux négatifs. « Ca n'est plus vrai sur la fin de l'année » et il a fallu au contraire les rémunérer, a expliqué le gouverneur.

Un autre phénomène a toutefois atténué cette conséquence négative du resserrement monétaire : le durcissement de conditions de prêts géants aux banques (TLTRO) a rendu ces derniers moins coûteux.

La Banque de France a également vu ses revenus liés à ses titres de politiques monétaires plus que doubler, notamment grâce à ceux indexés sur l'inflation.

La Banque de France dans une « situation relativement favorable »

Dans ce contexte, le gouverneur de la Banque de France a tenu à rappeler que l'institution se trouve « en situation relativement favorable », alors que plusieurs grandes banques centrales ont déjà annoncé des pertes pour 2022, sans en dévoiler le montant, comme celle des Etats-Unis, du Royaume-Uni ou de la Suède.

Avec cette nouvelle dotation, les réserves de la Banque de France atteindront 16,4 milliards d'euros et elles « devraient lui permettre de maintenir des résultats à l'équilibre au cours des prochaines années, sans solliciter de recapitalisation auprès de l'État actionnaire », selon le communiqué publié.

« Sur cette période-là, je pense qu'aucune banque centrale au monde ne versera de dividende », a déclaré François Villeroy de Galhau, rappelant que le cycle de taux bas qui s'achève avait conduit à des dividendes « extrêmement élevés ».