Le tribunal de grande instance de Paris a condamné mercredi le site ElectronLibre à verser un euro de dommages et intérêts à la Société Générale pour l'avoir diffamée, en écrivant, en pleine crise bancaire, qu'elle était un établissement non crédible et insolvable.

Les faits remontent au 7 septembre. A 15h58, le site ElectronLibre, édité par la société El Publishing et dirigé par Emmanuel Torregano, avait publié une brève intitulée « Exclusif: la Société Générale écartée du marché interbancaire ». Le site poursuivait en affirmant que « selon un dirigeant d'une grande banque française, les banques ne prêtent plus à la Société Générale sur le marché interbancaire ».

A l'audience du 19 octobre, l'avocat de la Société générale, Me Jean-Yves Dupeux, avait demandé au tribunal de « sanctionner lourdement » cette « atteinte cataclysmique à la réputation de la banque ». Il réclamait 100.000 euros de dommages et intérêts. Dans son jugement, dont les motivations n'étaient pas immédiatement disponibles, la 17e chambre civile a condamné solidairement Emmanuel Torregano et la société El Publishing à verser un euro à la Société Générale « en réparation de son préjudice moral », ainsi que 3.000 euros au titre des frais de justice.

Par ailleurs, ElectronLibre devra publier cette condamnation à la fois dans un journal et sur son site.

« Particulièrement visée par les rumeurs »

La Société générale est « une banque qui, on ne sait pourquoi, est particulièrement visée par les rumeurs », avait regretté à l'audience Me Dupeux, tout en relevant « l'effet multiplicateur formidable » d'internet. « Se voir exclu du marché interbancaire », avait-il expliqué, « voudrait dire que du jour au lendemain une banque se trouve totalement à court de liquidités ou alors qu'elle est obligée d'aller emprunter sur d'autres marchés avec des taux beaucoup plus élevés ». Dans un tel cas, « au bout d'un mois, il n'y a plus de Société générale. Mais vous imaginez la force d'une information comme celle-ci ?! »

« La Société Générale n'a pas été exclue du marché interbancaire », avait-il martelé. « D'ailleurs si cela avait été le cas, aujourd'hui elle n'existerait plus. (...) C'est un mensonge absolu ».

L'avocate du site, Me Hasna Boulet, avait de son côté justifié une telle brève en rappelant que la SocGen était la banque « dont l'action a le plus chuté » entre juillet et septembre 2011. Il était « légitime, avait-elle ajouté, de s'intéresser à la situation » de la banque « qui avait le plus prêté à la Grèce et se trouvait naturellement plus exposée ». « Elle s'est trouvée en difficulté, elle s'est trouvée écartée du marché interbancaire et ça c'est la vérité », avait plaidé l'avocate, tout en faisant remarquer que l'article n'avait « jamais dit que c'était la seule banque française à avoir ces difficultés ». D'ailleurs, avait-elle noté, mi-septembre, la Société Générale a été « la première à reconnaître (...) qu'elle avait des problèmes de liquidités ».