Souvent décrié, l’achat d’un droit de séjour dans une résidence de vacances cache bien des pièges. Aussi la vigilance reste de mise pour qu’il ne devienne pas un boulet financier.

Multipropriété, timeshare, résidence en temps partagé… Quel que soit le nom qu’on lui donne, il est primordial que le consommateur, tenté d’y placer quelques fonds dans l’espoir de s’assurer des vacances dans un lieu de rêve, réfléchisse à deux fois avant de signer. Surtout que l'histoire de ces résidences partagées a bien mal débuté. Lancée en 1967 par une société française, la multipropriété n’a au début pas séduit les investisseurs. Après un petit tour outre-Manche, les promoteurs ont eu l’idée ingénieuse de faire croire que la formule avait été inventée aux Etats-Unis. Après de multiples scandales qui ont vu la déconfiture de certains investisseurs trompés sur la marchandise, un cadre européen est venu renforcer la sécurité des consommateurs.

Pour éviter des appellations abusives qui pourraient induire en erreur et priver le consommateur des protections légales, le code de la consommation consacre une section entière aux « Contrats d’utilisation de biens à temps partagé, contrats de produits de vacances à long terme, contrats de revente et contrats d’échange ».

Des charges trop lourdes

Le principe du timeshare est le suivant : moyennant une mise plus ou moins élevée, les particuliers peuvent acheter le droit d’occuper une ou deux semaines par an, un appartement ou un bungalow, situé dans une résidence de vacances en France ou à l’étranger. Juridiquement l’utilisation des termes « multipropriété » ou « multipropriétaire » est abusive et frauduleuse car le vacancier n’achète pas un bien immobilier. Vous n’êtes pas, et ne serez jamais ainsi propriétaire du bien immobilier.

Finie l’époque où le consommateur se retrouvait associé malgré lui d’une société immobilière dont il ne pouvait sortir, et se retrouvait à payer de lourdes charges. Désormais, vous signez un contrat avec la société propriétaire des biens immobiliers qui vous donne le droit de séjourner dans un logement situé dans une résidence de tourisme, à des dates fixées à l’avance. Si vous achetez par exemple, un droit de séjour du 1er au 15 juillet : vous pourrez séjourner, dans la résidence, chaque année à cette date, jamais à une autre date.

Atout jadis mis en avant par les vendeurs, l’acheteur peut parfois échanger son droit d’occupation avec celui d’autres personnes dans d’autres régions de France, voire à travers l’Europe et le monde. Entre la théorie et la pratique, il y a toutefois un fossé : les bourses d’échange qui devaient permettent de séjourner dans des lieux de rêve n’ont pas vraiment fonctionné.

La qualité de construction et l’emplacement de ces résidences laissent parfois à désirer. En outre, les résidences génèrent des frais très lourds : plusieurs milliers d’euros par an pour les charges d’entretien et de gestion. Bien souvent, le montant de ces charges est attractif la première année, et augmente ensuite très vite dans des proportions considérables, du fait par exemple de la réalisation de travaux de modernisation ou de l’adjonction d’équipements.

L’offre et le contrat strictement réglementés

Si cette formule vous tente, il est impératif de connaître les droits que vous accordent les articles L 224-69 à L224-89 du code de la consommation pour vous protéger.

Il n'est ainsi plus question d’attirer le consommateur sous un prétexte convivial pour ensuite lui vendre une formule de temps partagé. Toute invitation à une manifestation (week-end, déjeuner, dégustation de vins, visites de locaux de rêve...) ayant pour objet la vente ou la promotion de produits d’utilisation de biens à temps partagé doit indiquer clairement le but commercial et la nature de cette manifestation. Avant tout engagement de sa part, le consommateur reçoit du professionnel de manière claire et compréhensible, par écrit sur support papier ou sur un support durable aisément accessible (internet donc), les informations exactes et suffisantes relatives aux biens ou services pour lesquels il envisage de s’engager. L’offre contient au moins quatorze informations obligatoires selon l’article L224-73 du code de la consommation. Parmi elles : l’identité et l’adresse du vendeur, et s’il s’agit d’une société, sa dénomination, sa forme juridique et l’adresse de son siège social. Le logement et la résidence doivent être décrits précisément ainsi que les installations et équipements communs à la disposition du consommateur (piscine, golf, tennis, discothèque…) avec leurs coûts et leurs conditions d’accès.

Bien entendu, l’offre d’achat doit comporter le prix principal à payer et l’indication des frais accessoires obligatoires s’ils existent. De même, l’offre doit préciser la période pendant laquelle s’exerce le droit de séjour du consommateur, l’interdiction de tout paiement d’avances, la durée du contrat, et sa prise d’effet ainsi que la durée et les modalités du droit de rétractation.

L’offre doit également comporter les informations relatives à la résiliation du contrat, et le fait qu’il peut être régi par une loi autre que celle d’un Etat membre de l’Union européenne dans lequel le consommateur a sa résidence ou son domicile habituel. Lorsque le paiement du prix est acquitté en tout ou partie à l’aide d’un crédit accordé par le professionnel ou par un tiers, banque par exemple, l’exercice par le consommateur de son droit de rétractation du contrat d’utilisation de biens à temps partagé, emporte la résiliation de plein droit, sans frais ni indemnité, du contrat de crédit, prévoit l’article L224-88, code de la consommation.

Un engagement à vie ou presque

Si le consommateur donne suite à l’offre d’achat, le vendeur doit lui remettre un contrat écrit obligatoirement rédigé en langue française dès lors que le consommateur réside en France. Le contrat doit comprendre toutes les informations fournies sur l’offre d’achat ainsi que la date et le lieu de sa conclusion, et la signature des parties. Le consommateur peut souscrire simultanément un contrat d’utilisation de biens à temps partagé et un contrat d’échange, seul ce dernier lui permettant d'échanger son droit d’occupation avec d’autres titulaires. Une ou plusieurs copies de l’ensemble du contrat sont remis au consommateur au moment de sa conclusion.

En théorie, la revente du contrat est possible mais n’y comptez pas : peu de vacanciers vont avoir envie de s’engager pour de longues années alors que des sites spécialisés proposent des millions de locations entre particuliers existent. « Si le bénéfice du bien se restreint qu’à quelques jours par an, votre engagement financier s’inscrit lui dans un temps long ayant pour seule limite la durée de vie maximale d’une société civile immobilière : 99 ans. Il est donc préférable de réfléchir mûrement votre projet avant de vous engager dans l’aventure du timesharing », met ainsi en garde Bercy Infos.

Selon une fiche du ministère de l'Economie, la loi fixe certaines conditions permettant d’obtenir, par le biais d’une décision de justice, l’autorisation de se retirer de la société. Pour ce faire, vous devez vous trouver dans une des situations suivantes : être bénéficiaire des minimas sociaux, tels que le RSA, avoir des revenus inférieurs au Smic, être dans l’incapacité d’accéder au bien en jouissance au regard de la fermeture ou de l’inaccessibilité de la résidence. « Enfin, si vous avez acquis les parts sociales dans le cadre d’une succession depuis moins de 2 ans, vous pouvez, de droit, vous retirer de la société. Vous bénéficiez alors du remboursement des parts sociales », précise le ministère.

14 jours pour se rétracter

Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours francs pour se rétracter du ou des contrats qu’il a signés, sans avoir à indiquer de motif. Un formulaire de rétractation doit être joint au contrat, que le consommateur devra envoyer au vendeur, avant la fin du délai de rétractation, sous la forme recommandée avec avis de réception. Dans le cas où le professionnel n’a pas rempli et fourni au consommateur sur support papier ou support durable, le formulaire de rétraction, ce dernier dispose d’un délai de rétractation d’un an et quatorze jours à compter du jour de la conclusion du contrat ou du jour de sa réception. Même si le formulaire de rétraction n’a pas été fourni, rien n’empêche le consommateur de l’exprimer dans une lettre envoyée sous la forme recommandée avec avis de réception.