Mauvaise nouvelle si vous êtes sujet aux problèmes de dos : lors de la signature d'un crédit immobilier, l'assureur qui couvre votre prêt refuse bien souvent de vous assurer pour les conséquences de ces pathologies. Explications.

Détenteur d'un crédit immobilier, pensez-vous être couvert en cas de problèmes de dos ? Si vous avez une assurance de prêt, la question vous a sans doute été posée, soit directement, soit pour savoir si vous avez eu un arrêt de travail lors des derniers mois. Pourquoi ? Pour savoir si vous souffrez d'une MNO, pour « maladie non-objectivable ». Qu'est-ce que c'est ? « Les MNO regroupent les problèmes de dos et les troubles du psychisme, dévoile Christophe Boiché, directeur de l'assurance emprunteur chez Meilleurtaux. Ce sont des pathologies qui ne sont pas médicalement démontrables. »

« Il s'agit de toutes les maladies subjectives, qui ne peuvent être mesurées par un médecin, mais qui sont tout de même des pathologies bien réelles, développe Astrid Cousin, porte-parole du courtier en assurances Magnolia. Les problèmes de dos rentrent donc dans le cadre des MNO, au même titre que la dépression, le burn-out ou la fatigue chronique. Ce sont des pathologies sur lesquelles les assureurs ont beaucoup de difficultés à tarifer. »

Des exclusions pour les emprunteurs déjà victimes de problèmes de dos

Dans ce contexte, une étude publiée en décembre 2022 par le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) et consacrée à l'assurance emprunteur note que « les pathologies dorsales et psychologiques font l'objet d'un traitement particulier sur le marché, avec la mise en place d'exclusions à géométrie très variable d'un contrat à l'autre. Elles ont historiquement été à l'origine de nombreux sinistres en assurance emprunteur et sont considérées comme un motif majeur d'antisélection. »

D'autant que les maladies non-objectivables sont la plus grosse cause d'arrêt de travail aujourd'hui. Selon la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), citée par Capital, la lombalgie (aussi appelé lumbago) toucherait quatre personnes actives sur cinq. De plus, « ce sont des problèmes qui se répètent souvent, poursuit Astrid Cousin. Ça se traduit donc par des baisses de salaires, qui peuvent impacter le remboursement de l'emprunt. » Un mauvais point pour l'assureur, dont le but est de prendre le moins de risque possible au moment de vous couvrir.

Résultat, les personnes ayant déjà été souffert de l'une de ces pathologies seront forcément considérées comme un profil avec un risque aggravé. Et bien souvent, les assureurs refusent purement et simplement de couvrir les problèmes liés. « Dès lors que l'emprunteur déclare un problème de dos, il y aura une exclusion partielle car pour l'assureur, la probabilité d'un nouveau sinistre est trop forte. L'emprunteur pourra donc souscrire une assurance de prêt, mais elle ne le couvrira pas sur les problèmes de dos », développe un assureur interrogé.

« L'assureur peut aussi proposer une surprime ou un rachat d'exclusion, qui dépendra de l'âge et de si le problème est ponctuel ou récurrent, tempère la porte-parole de Magnolia. Mais c'est du cas par cas, cela va dépendre de l'assureur et de votre cas. Mais en général, cela coûte très cher. »

De nombreux emprunteurs couverts, même en cas de pathologie

Qu'en est-il des emprunteurs qui, sans avoir eu de soucis par le passé, souffrirait d'un problème de dos en cours de contrat ? « Il est généralement prévu une couverture en cas d'hospitalisation, car il y a un caractère tangible, détaille Christophe Boiché. Et il existe dans certains contrats des options rachetables, qui permettent d'être couverts pour les maux de dos et les troubles du psychisme, même en cas de non-hospitalisation. » Selon le directeur de l'assurance emprunteur chez Meilleurtaux, de plus en plus de contrats proposent aujourd'hui une « couverture MNO. »

Il faut dire qu'en cas de refus de l'assureur de couvrir un problème de dos qui surviendrait chez un client, la justice est du côté de l'assuré. Par exemple, dans un arrêt rendu le 17 juin 2021, la 2e chambre civile de la Cour de cassation a rappelé que l'article L. 113-1 du Code des assurances impose que les exclusions de garantie soient formelles et limitées.

« En l'espèce, une clause d'exclusion de garantie, dès lors qu'elle mentionne et 'autre mal de dos' n'est pas considérée comme formelle et limitée et ne peut être appliquée. Ceci signifie que, en présence d'une telle mention, l'ensemble de la clause est considérée comme nulle et toute pathologie dorsale, y compris celles explicitement citées dans cette clause d'exclusion, sera indemnisée », rappelle la Cour de cassation.

Une autre donnée est venue rebattre les cartes : la loi Lemoine. Pour rappel, depuis le 1er septembre 2022, de nombreux prêts immobiliers ne necessitent plus de questionnaire de santé. La Loi Lemoine a supprimé le questionnaire médical sous réserve que la part assurée sur l'encours cumulé des contrats de crédit n'excède pas 200 000 euros par assuré (400 000 euros pour un couple) et si le remboursement total du prêt est prévu avant les 60 ans de l'emprunteur. Dans ces conditions, il n'est donc plus possible pour l'assureur de savoir en amont si l'assuré a déjà eu des problèmes de dos. D'où, là encore, la généralisation dans certains contrats de cette « couverture MNO ».

Une chose est certaine : si vous avez déjà eu des soucis de dos ayant entraîné un arrêt et que votre assureur vous pose la question au moment de souscrire le prêt, mieux vaut ne pas mentir. « Ce serait un très mauvais calcul, confirme Astrid Cousin. Si votre assureur le découvre, non seulement vous n'êtes absolument pas couvert, mais surtout cela peut mettre fin à votre contrat d'assurance emprunteur. »