Un site internet, actioncivile.com, propose aux emprunteurs immobiliers de mener une action collective contre les banques, afin de les contraindre à leur verser une participation aux bénéfices dégagés par leurs assurances de prêt. Que pense l’association de consommateurs UFC-Que choisir, qui a mené jusqu’ici cette bataille devant la justice, de l'initiative ? Les réponses de Nicolas Godfroy, le responsable de son département juridique.

Nicolas Godfroy, que pensez-vous de l’initiative du site internet actioncivile.com, qui a déjà réussi à rassembler plus de 125.000 plaignants ?

« Elle a l’avantage de refaire parler du véritable scandale que constitue le refus des banques de verser aux emprunteurs une participation aux bénéfices dégagés par leurs assurances de prêt. Plus généralement, l’UFC-Que Choisir voit d’un bon œil toute tentative de simplifier l’accès au droit. Toutefois, dans ce cas précis, nous estimons que l’initiative présente des risques pour les consommateurs, sur lesquels ils sont insuffisamment informés. »

Quels sont ces risques ?

« Il ne faut pas laisser penser aux victimes que tout va être simple. Actioncivile.com, qui se rémunère en prélevant 15% des sommes récupérées dans le cadre d’une action collective, propose aux victimes de mener une médiation en leur nom. Mais si les banques refusent cette médiation, ce qui semble devoir être le cas, les victimes devront aller seules en justice et s’exposer alors à des aléas et des frais. Cette question de la participation aux bénéfices de l’assurance emprunteur est en effet très complexe juridiquement, même pour des professionnels du droit. Les consommateurs qui se risqueront en justice devront affronter directement les banques, qui n’ont pas l’habitude d’aller en justice désarmées. Enfin, en confiant ces affaires à différents tribunaux locaux, le risque est grand d’aboutir à des décisions divergentes. Certains plaignants gagneront peut-être, mais d’autres, avec un dossier équivalent, perdront. L’action de groupe, dont on attend les décrets d’application pour septembre, semble plus adaptée dans ce cas. Elle a l’avantage de ne faire subir aucun risque ni aucuns frais au consommateur, qui peut s’appuyer sur l’association ayant lancé la procédure. »

Où en est l’action d’UFC-Que Choisir sur ce dossier de l’assurance emprunteur ?

« Fin 2012, nous avions demandé à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution [ACPR, l’instance de régulation du secteur financier] de s’impliquer dans le dossier. Sa réponse a été négative, ce qui prouve que le sujet n’est pas seulement juridique, mais également politique. L’UFC-Que Choisir est par ailleurs impliqué dans deux procédures en cours dont une, concernant un crédit à la consommation, devrait donner lieu à une décision de justice d’ici la fin de l’année. »

Au moment de publier ces lignes, le site internet spécialisé dans les recours collectifs a rassemblé près de 125.500 plaignants ayant souscrit un crédit immobilier ou à la consommation entre 1996 et 2012. A la clé, en cas de réussite de l'action collective, une indemnité moyenne promise de 2.750 euros. Plus d'infos sur le sujet : Assurance emprunteur : près de 50.000 particuliers réclament plus de 120 millions d'euros aux banques