La loi Lemoine, qui réforme l'assurance emprunteur, est entrée en vigueur ce mercredi 1er juin 2022. Si des observateurs notent déjà une flambée des tarifs sur les contrats sans questionnaire de santé, les défenseurs de la réforme mettent en avant les bénéfices pour les emprunteurs.

Pour les emprunteurs, c'est le début d'une nouvelle ère. Depuis le mercredi 1er juin 2022 (pour les nouveaux contrats), l'entrée en vigueur progressive (1er septembre pour les contrats en cours) de la loi Lemoine vient chambouler l'assurance emprunteur. « Une loi utile pour beaucoup de Français qui vont faire des économies sur leur crédit immobilier », assure Patricia Lemoine, députée Agir qui a porté cette loi.

Cette réforme majeure prévoit notamment la possibilité de résilier son assurance emprunteur à tout moment pour profiter d'une offre concurrente moins chère et/ou avec de meilleures garanties. Si cette mesure est plutôt bien accueillie par le secteur, notamment par les assureurs alternatifs qui y voient une occasion de grapiller des parts de marché aux bancassureurs (qui détiennent pour le moment 88% du marché ndlr), un autre point de ce projet plait beaucoup moins aux assureurs. Car la réforme acte aussi la fin du questionnaire médical, pour les emprunts de moins de 200 000 euros remboursés (par personne, soit 400 000 euros pour un couple) avant le 60e anniversaire de l'assuré.

Une hausse de tarifs temporaire ?

Pour les assureurs, cette mesure s'apparente à proposer des contrats « à l'aveugle ». Nombreuses étaient alors les compagnies à prévoir des hausses de 15 à 20% sur les contrats impactés par la fin du questionnaire de santé. Sur les premiers jours, les contrats de ce type ont globalement augmenté « de 15% à 40% selon les compagnies, pour une moyenne de 25% de hausse environ », note Astrid Cousin, porte-parole de Magnolia.fr. Une tendance confirmée par d'autres observateurs du milieu.

Incompréhensible pour Patricia Lemoine, qui estime que la réforme de l'assurance emprunteur est également synonyme d'économies pour les assureurs : « Ils vont faire des économies sur les médecins conseils qui sont actuellement payés pour analyser le risque, mais aussi sur l'administratif avec moins de personnel en charge à la fois de compléter le questionnaire mais aussi de l'analyser. Logiquement, il n'y a aucune raison que le coût de l'assurance emprunteur augmente de manière significative. »

Pour Daniel Gremillet, sénateur Les Républicains ayant porté le projet de loi au Sénat (stade auquel la mesure sur la fin du questionnaire de santé a été ajoutée, ndlr), « ce texte relance une dynamique d'offres. Face à cela, il y a ceux qui veulent faire vivre la peur et utilisent ce prétexte pour augmenter les tarifs, mais on voit bien aussi qu'il y a des propositions d'assureurs qui sont rentrés dans le jeu de la concurrence et qui comprennent que la fin du questionnaire médical est une opportunité. »

La concurrence pour contenir la hausse des tarifs

« Très peu d'assureurs augmenteront à terme leurs prix dans ces proportions-là, confirme Patricia Lemoine. À partir du 1er septembre, le jeu de la concurrence va se mettre en place pour tous les contrats. Les assureurs trop chers vont se retrouver évincés du marché. » « Peut-être que ce segment d'assurances va devenir un marché de compétition, c'est une possibilité, concède Astrid Cousin. Peut-être que c'est un marché que les compagnies vont vouloir attaquer et qui sera demain compétitif. Mais il faut du temps avant de s'en rendre compte, pour le moment c'est trop tôt pour le dire ».

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Autre point de grief pour les assureurs, la rapidité demandée pour s'adapter. Certains assureurs ont d'ailleurs préféré stopper l'assurance emprunteur le temps de proposer une offre à jour. Promulguée le 28 février pour une entrée en vigueur le 1er juin, la Loi Lemoine n'a laissé que trois mois aux banques et aux assureurs pour faire évoluer leur offre. « C'est un délai assez court mais je n'ai pas eu de retour, notamment des banques, sur le fait que cette date n'était pas tenable », balaie Patricia Lemoine.

La députée estime qu'il faudra peut-être attendre la fin de l'année 2022 pour y voir plus clair. « C'est pourquoi l'évaluation obligatoire que nous avons fixée dans les deux ans maximums aura toute son importance pour s'assurer qu'il n'y a pas d'effets néfastes pour les assurés et les assureurs. »

D'ici là, d'autres dates seront particulièrement scrutées par les compagnies d'assurance, à commencer par le 31 juillet. Car la loi Lemoine, sur certains points, a la particularité d'être évolutive et de pouvoir être modifiée par décret en Conseil d'Etat. Fin juillet, les sénateurs proposeront ainsi au gouvernement d'élargir le champs des maladies comprises dans la convention Aeras, qui facilite l'accès à l'assurance et à l'emprunt des personnes ayant ou ayant eu un problème grave de santé.

Prêt immobilier : allez-vous profiter ou être victime de la fin du questionnaire de santé ?

« Il y a un certains nombre de maladies avec lesquelles on vit très bien aujourd'hui et qui n'ont pas à entraîner une surprime ou un refus d'assurance », note le sénateur Daniel Gremillet. Ainsi, les assurés atteints de diabète pourraient demain ne pas payer plus cher qu'un assuré lambda.

Et ce n'est pas tout. Le site Légifrance précise qu'un « décret en Conseil d'Etat pourra également définir des conditions plus favorables pour l'assuré en termes de plafond de la quotité assurée et d'âge de l'assuré. » Techniquement, un décret en CE pourrait ainsi augmenter le plafond de 200 000 euros et l'âge limite pour la suppression du questionnaire de santé dans les prochains mois. Une évolution perpétuelle qui devrait encore forcer les assureurs à s'adapter.

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