Avec la crise du coronavirus, certaines banques mettent en place des dispositifs spécifiques pour faciliter le remboursement des prêts étudiants. Leur taux d’appel est également très attractif. Mais réfléchissez bien avant d'en profiter.

Cette rentrée 2020 va coûter en moyenne 2 361 euros à un étudiant en licence non boursier, d’après les estimations de la Fédération des associations générales étudiantes, dont près de la moitié pour les frais d’inscription à l’université. En école, et notamment dans les établissements les plus prestigieux, les frais de scolarité dépassent très largement ce montant. Ils ont même explosé en 10 ans. Selon le site Mister Prépa, un cursus complet débuté en 2020 dans les grandes écoles de commerce revient à plus de 38 000 euros, contre 22 000 euros en 2009.

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Le prêt étudiant, une incontournable contrainte

« Malheureusement, il n'y a pas beaucoup d'alternatives au prêt étudiant »

Pour financer leurs études supérieures, les étudiants ne pouvant pas s’appuyer sur l’épargne familiale n’ont souvent d’autres choix que de faire un crédit. « Pour nous, le prêt étudiant n'est vraiment pas la bonne solution. Cela crée sur l'étudiant une pression à se salarier au plus vite, ce qui, avec le fort taux de chômage et le recul de l'âge du premier emploi, est de plus en plus difficile, déplore Helno Eyriey, vice-président du syndicat étudiants Unef. Malheureusement, il n'y a pas beaucoup d'alternatives pour les étudiants. Pour les foyers modestes, la solidarité familiale est, d'autant plus avec la crise, de moins en moins forte. Les aides sociales ne sont pas adaptées aux jeunes, tant en montant qu'en critères d'accès basés sur le salaire des parents. Seul un tiers des étudiants ont le droit à des aides. Il reste le job étudiant, mais le salariat est la première cause d'échec à l'université ». En 2009, l’Insee estimait en effet que seuls 38% des étudiants salariés plus de 16 heures par semaine réussissaient leurs examens, contre 66% pour les jeunes sans emploi.

Passage obligé pour les étudiants, le prêt étudiant est aussi incontournable pour les banques. Pour les établissements bancaires, ce produit est en effet stratégique. Il leur permet de se constituer une clientèle sur le long terme. En effet, les jeunes, insolvables au moment où ils font l’emprunt, se voient proposer un différé de remboursement, ce qui leur permet de commencer à le rembourser plusieurs années après l’avoir contracté.

Produit stratégique y compris avec le Covid-19

Malgré leurs pertes de revenus liées au coronavirus, les banques sont donc, cette année encore, au rendez-vous commercial du prêt étudiant, en proposant des taux d’appel toujours attractifs autour de 0,90% à 1% selon les enseignes. Dans certaines régions, la compétition locale aboutit même à des taux encore plus bas. C’est le cas dans la région lyonnaise, par exemple, où le Crédit Agricole Centre Est met en avant un prêt de 15 000 euros à 0,75%, quand au même moment la Caisse d’Épargne Rhône Alpes affiche un TAEG de 0,79% pour 10 000 euros.

Pour cette rentrée atypique, certaines banques ont même mis en place des dispositifs inédits. La Banque Postale propose aux étudiants et apprentis en difficultés financières de reporter sans frais jusqu’à 6 mois le moment de démarrage du remboursement de leur crédit. « Les clients commençant à rembourser leur prêt personnel entre le 1er mars et le 31 décembre 2020 ont jusqu’au 31 octobre pour demander à bénéficier d’une franchise supplémentaire », nous explique la communication de la banque. Chez LCL, la nouveauté cette année est de proposer jusqu’au 31 octobre un prêt étudiant plafonné de 5 000 euros à 0% pour les enfants de ses clients.

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Un taux canon sous condition

« Le prêt étudiant, c'est de la négociation individuelle »

A en croire les banques, ces dispositifs exceptionnels connaissent un certain succès. Plusieurs constatent cet été une hausse des demandes de prêt étudiant, qu’elles analysent aussi comme un rattrapage après 2 mois d’activité atone durant le confinement.

Les banques restent toutefois libres d’accorder ou non un crédit et de moduler le taux d’intérêt (c'est le cas aussi pour le prêt garanti par l'Etat détaillé ci-après). « Le prêt étudiant, c'est de la négociation individuelle. Et le rapport de force n'est pas à l'avantage du jeune », souligne Helno Eyriey de l’Unef. Et les meilleurs taux des banques sont souvent conditionnés à l’ouverture d’un compte avec package bancaire, à un montant emprunté ou à une durée de remboursement précise. Par exemple, chez BNP Paribas, le taux d’appel débute à 0,80%, hors assurances, mais passe à 1,50% dès lors que la durée de l’emprunt dépasse 8 ans. D'où l'intérêt de comparer les banques et de ne pas s'arrêter au taux vu sur un encart publicitaire.

Les meilleures conditions sont aussi réservées à certains cursus. Par exemple, les grandes écoles négocient avec certaines banques partenaires, comme BNP Paribas, des taux plus avantageux. Chez l’ex-Crédit Lyonnais, les élèves de grandes écoles et les futures professions libérales se voient ainsi proposer un taux de 0,99%. Il est de 1,50% pour les élèves en faculté, en classe prépa, en doctorat ou en formation professionnelle. « Les enfants de nos clients bénéficient d’une décote, soit 0,80% à 1,25% », ajoute la communication de LCL.

La garantie de l’Etat octroyée à 1% des étudiants

« Tout a été utilisé. Les étudiants ne peuvent plus solliciter de prêts garantis »

A ces offres s'ajoute aussi le prêt étudiant garanti par l’Etat, ce dispositif censé permettre aux jeunes ne bénéficiant pas d’une caution solide d’obtenir plus facilement un emprunt. En proposant ce prêt garanti, les banques habilitées à le faire (Société Générale, Banque Populaire, Caisse d’Epargne, Crédit Mutuel et CIC) bénéficient ainsi d’une sureté de taille.

Si l’étudiant ne parvient pas à rembourser son emprunt, c’est en effet l’Etat, via Bpifrance, qui assume les échéances restantes à hauteur de 70%. Mais en contrepartie, le montant maximal du prêt garanti est plafonné (à 15 000 euros) tout comme l’enveloppe totale de financement. C’est pourquoi, chaque année, seulement 1% des étudiants y ont accès, contre 46% au Royaume-Uni et 76% en Suède, d’après les statistiques gouvernementales.

D’ailleurs, pour cette campagne 2020, « l’enveloppe est partie assez rapidement, nous explique Bpifrance. Tout a été utilisé et les étudiants ne peuvent plus solliciter de prêts garantis dans les banques partenaires ». D’après nos informations, le ministère de l’Enseignement supérieur réfléchissait courant juin à débloquer de nouveaux financements pour cet automne. A priori, il y aura bien une revalorisation de l’enveloppe mais à partir de l’année prochaine seulement. Dans le cadre du plan de relance, présenté ce 3 septembre, le gouvernement a en effet annoncé que la dotation annuelle sera multipliée par 5 en 2021. Cela devrait permettre à 67 500 étudiants d’obtenir un prêt garanti contre 11 500 bénéficiaires potentiels en 2020.

Nos conseils pour votre prêt étudiant :

  • Si vos parents ont des revenus modestes et que la banque refuse de vous prêter de l'argent ou à un taux très élevé, reportez si possible votre demande de prêt à 2021 pour tenter de bénéficier de la garantie de l'Etat.
  • Faites jouer la concurrence. Selon les banques et la compétition locale, les conditions d'emprunt peuvent être très différentes.
  • Vos parents sont de bons clients ; vous allez faire une école prestigieuse ; vous vous orientez vers un métier avec de bons débouchés : faites valoir vos atouts auprès des banques pour obtenir de bonnes conditions d'emprunt. Et n'oubliez pas de demander un différé de remboursement, voire la suppression des frais de dossier.
  • Demandez au secrétariat si votre école dispose de banques partenaires, avec des taux déjà pré-négociés. Mais cela ne vous empêche pas de faire jouer par vous-même la concurrence
  • Regardez bien toutes les conditions qui vont avec le prêt étudiant que l'on vous propose. Si la banque vous suggère d'ouvrir un compte avec une carte bancaire gratuite, c'est a priori bien pour vous. En revanche, si elle vous oblige à prendre un package qui vous coûte plusieurs dizaines d'euros par an, c'est plus discutable.