PRESIDENTIELLE 2022 - Année après année, rapport après rapport, le constat reste le même pour l'assurance vie, marché pesant pas moins de 1 850 milliards d'euros : faute de pouvoir les transférer, les vieux contrats et plus généralement les contrats des banques restent mal rémunérés, et lourdement facturés. D'où l'idée d'ouvrir totalement la porte au transfert de l'assurance vie : c'est l'une des 10 propositions que la rédaction adresse aux candidats à la prochaine élection présidentielle.

Comment ça fonctionne aujourd'hui

Première enveloppe d'épargne en France, l'assurance vie est massivement placée dans des contrats bancaires chargés en frais et au rendement moindre que des contrats plus récents. Une situation due aux particularités fiscales de ce produit. Il a un atout incomparable vis-à-vis de la plupart des autres placements : une fiscalité très avantageuse... mais ce n'est qu'au bout de 8 ans de détention que vous profitez de cette fiscalité plus douce sur les gains. Passés 8 ans de détention, vous ne payez plus (ou presque plus) d'impôt sur le revenu grâce à l'abattement annuel de 4 600 euros ; il vous reste uniquement les cotisations sociales à régler sur vos gains, en cas de retrait.

Quel rapport avec le fait de transférer votre assurance vie d'une banque à une autre ? Ce placement fait partie des rares produits d'épargne ne pouvant pas être transférés d'un établissement à un autre à votre guise. Vous devez le plus souvent fermer votre contrat ou en ouvrir un nouveau, et ainsi perdre votre « antériorité fiscale » : il faut recommencer le cycle des 8 ans à zéro. Vous pouvez aussi conserver un ancien contrat et en ouvrir un second, auprès d'un distributeur qui vous a séduit, mais là encore il faut tout reprendre à zéro pour le nouveau contrat.

La loi Pacte, en vigueur depuis mai 2019, a tout de même changé la donne, mais seulement en partie : vous pouvez « transférer » une assurance vie sans perdre votre antériorité fiscale... mais uniquement en restant dans la même compagnie d'assurance, et sous réserve que cet assureur accepte ce transfert.

Cette mesure portée par la loi Pacte allait certes dans le sens de l'intérêt des épargnants. Mais elle n'a pas révolutionné le marché de l'assurance vie, malgré une augmentation des transferts en 2021 : 236 000 contrats transformés en 2020 pour 6,8 milliards d'euros, puis 250 000 « transformations Pacte » pour 7,4 milliards d'euros au 1er semestre 2021. Loin des 1 850 milliards placés au global dans l'assurance vie.

Qu'est-ce qui cloche aujourd'hui ?

Comme MoneyVox l'a démontré dans une étude sur le poids des frais sur versement, l'un des nombreux postes de frais de l'assurance vie, déposer de l'argent sur une vieille assurance vie bancaire vous coûte en moyenne 2,81% ! Pour 1 000 euros versés, seuls 972 euros sont investis sur votre assurance vie... et il faut plusieurs années pour ne serait-ce que retrouver sa mise de départ. Or ces frais sont négociables chez les conseillers en gestion de patrimoine, ou inexistants dans les banques et courtiers en ligne. Et les assurances vie de ces derniers affichent souvent des options de gestion bien plus complètes et de meilleures performances.

Une perte estimée à 3,5 milliards d'euros sur les seuls frais de versements... L'existence de cette “barrière fiscale” au transfert de l'assurance vie permet ainsi aux banques de garder la mainmise sur près de 60% de l'épargne déposée sur les assurances vie.

En clair : la « transformation Pacte » n'ouvre pas les portes d'une concurrence pleine et entière, alors que vous pouvez transférer où et quand bon vous chante d'autres produits à « antériorité fiscale » comme le PEL, un PEA, etc.

Ces placements cadenassés par votre banque

Ce qu'il faut changer en 2022

Comment serait-il possible de créer cette concurrence pleine et entière sur le marché de l'assurance vie ? En permettant aux clients de changer d'assureur, de banque ou de courtier quand ils le souhaitent. Sans être cantonné ad vitam aeternam à une compagnie d'assurance ni sans avoir à attendre plusieurs années pour pouvoir changer.

Concrètement, il ne s'agit pas de transférer les produits contenus dans l'assurance vie, fonds euro ou unités de compte propres à la compagnie d'origine, mais de transférer les montants, une fois ces supports liquidés. L'ancienneté fiscale de l'ancienne “enveloppe” assurance vie est, elle, transférée au nouveau contrat que vous avez souscrit.

Du point de vue des épargnants, pouvoir transférer son épargne sans contrainte permettrait d'éviter de se retrouver avec un vieux contrat, souvent délaissé par les banques et assureurs. Surtout, l'augmentation de la concurrence forcera les banques, courtiers ou assureurs à soigner leurs contrats - en particulier les anciens - pour séduire ou retenir les épargnants.

Le tout sans perdre le bénéfice de l'antériorité fiscale, et donc l'effort d'épargne dans la durée réalisé par le client.

Ce qu'il faut modifier dans la loi

Notre proposition nécessiterait de modifier l'article 125-0 A du Code général des impôts, dont le 2° du I permet actuellement de transformer partiellement ou totalement un contrat d'assurance vie sans essuyer les conséquences fiscales d'un dénouement, sous réserve que cette transformation s'effectue par la souscription d'un nouveau contrat auprès de la même entreprise d'assurance.

Ce 2° devrait donc être réécrit ainsi : « Le transfert partiel ou total d'un bon ou contrat mentionné au 1° du présent I (soit les contrats d'assurance vie et contrats de capitalisation, NDR) vers une autre entreprise d'assurance définie à l'article L. 134-1 du Code des assurances n'entraîne pas les conséquences fiscales du dénouement. »

Votez pour cette proposition

Les 10 propositions de MoneyVox pour la présidentielle

L'élection présidentielle est généralement l'occasion pour les candidats de parler économie, sécurité ou éducation. Mais rarement de répondre aux problèmes rencontrés par les Français avec leurs fournisseurs de services (banque, assurance, énergie, télécom...) et qui, parfois, leur empoisonnent la vie et leur font perdre beaucoup d'argent.

Fort d'une expertise reconnue et d'un large auditoire sur les finances personnelles et le budget, MoneyVox a souhaité proposer aux candidats à la présidentielle 10 pistes concrètes pour améliorer le quotidien des Français et leur pouvoir d'achat. Le tout dans un souci de pragmatisme, d'efficacité, et bien sûr dans un esprit non-partisan.

Ces propositions seront transmises aux candidats déclarés, et MoneyVox vous tiendra informé de leurs éventuelles réponses.

1- Forfait mobile, box internet, SVOD... Imposons une résiliation simplifiée !

2- Forfait mobile, transports en commun, autoroutes... Remboursons les clients en cas de défaillance de service

3- Démarchage : permettons d'annuler le contrat après la première facture

4- Permettons le transfert d'assurance vie à tous les contrats, sans perte fiscale

5- Facilitons la résiliation de l'assurance emprunteur à tout moment

6- Crédit immobilier : supprimons les indemnités de remboursement anticipé

7- Frais bancaires : interdisons la facturation sans information préalable

8- Refondons le Livret A pour protéger l'épargne populaire

9- Facilitons le recours à la médiation pour les litiges de consommation

10- Mettons en place un guichet unique des prestataires condamnés